CHAPITRE 1 (2 sur 2)

1.3.2. Des évolutions conceptuelles importantes.

L’influence croissante des conceptions du « clan latin » par rapport à celles du « clan anglo-saxon ».

Le dilemme entre conceptions du « clan latin » et conceptions du « clan anglo-saxon » est très prégnant sous Torres Bodet[1]. De mère française, parlant couramment le français, fin connaisseur de l’histoire de France, poète et créateur d’une revue littéraire au Mexique, lié aux milieux littéraires français[2], Torres Bodet a un profil d’intellectuel francophile. Il a été influencé par l’IICI[3], ayant participé à ses réunions dans les années 1930 à Paris en tant que membre de la représentation diplomatique du Mexique ; il en a retiré « une profonde impression », et, estimant que cet institut a fait « œuvre de pionnier en matière de coopération intellectuelle »[4], il le revendique comme un modèle pour l’Unesco[5]. Il affirme l’ambition de faire de cette organisation « la République vivante des esprits »[6], de la mettre au service des « génies créateurs »[7]. Pour lui, les projets de l’Unesco devront « amener les personnalités du monde intellectuel à travailler en commun au profit de l’humanité »[8], et l’Unesco doit devenir un « aiguillon » pour les consciences[9]. Sa conception est humaniste au sens classique[10].
Par son profil intellectuel et sa parfaite maîtrise du français, Torres Bodet se lie beaucoup plus aisément avec les fonctionnaires français qu’anglo-Saxons, ressentant beaucoup plus d’affinités naturelles avec ceux-là qu’avec ceux-ci[11]. Ainsi, à peine élu directeur-général, il nomme René Maheu directeur de son cabinet. Celui-ci se souvient :
« Dans l’avion qui nous ramenait à Paris [au retour de la conférence générale de Beyrouth au cours de laquelle Torres Bodet a été élu directeur général], il m’a invité à aller le voir le lendemain, à son hôtel. Là, après un entretien de deux heures, il m’a demandé de devenir son directeur de cabinet et j’ai immédiatement accepté : il y avait eu entre nous une sympathie immédiate et sa conception humaniste de la mission de l’Unesco rejoignait tout à fait mes idées personnelles »[12].
C’est le début d’une étroite collaboration :
« Pendant quatre ans, nul ne fut plus étroitement, plus fidèlement associé que moi, jour après jour, à son immense effort. Il fut mon chef et il fut mon ami ; il est demeuré mon ami et mon guide. C’est à ses côtés que je découvris, par expérience vécue, que l’Unesco, oeuvrant sur les esprits, n’a d’efficacité véritable, quelle que soit sa technicité, que si elle est elle-même une réalité spirituelle. […] En un mot, je compris de lui que l’Unesco est une entreprise humaniste. »[13]
Dans la lignée de l’esprit « latin » qui avait caractérisé l’IICI, Torres Bodet se montre extrêmement soucieux d’intéresser les intellectuels à l’action de l’Unesco. Il exprime cette volonté dans ses discours :
« Les écrivains, les chercheurs, les philosophes et les artistes doivent sentir, comme citoyens libres d’un monde qui aspire à l’être, que les tâches de l’Unesco sont leurs propres tâches, que la mission de l’Unesco est leur mission. [...] Chaque fois que j’aurai l’occasion de me faire entendre d’un groupe d’intellectuels, de quelque nationalité qu’ils soient, je répéterai le même appel. »[14]
Cette conception est soutenue par les États membres « latins » : l’Italie soutient explicitement une conception de la mission de l’Unesco conforme à « l’esprit européen et latin »[15] ; la France défend l’idée que la mission de l’Unesco doit relever principalement du « domaine de la coopération intellectuelle internationale »[16]. Elle soutient la volonté de Torres Bodet d’accroître la « part du budget de l’Unesco qui ne va pas aux ‘analphabètes’ ou aux pays sous-développés, mais bien aux élites pensantes du monde », puisque cette politique est « en harmonie avec la ligne générale de la politique française à l’Unesco, qui a toujours soutenu que si les analphabètes étaient dignes de toutes les attentions, ceux qui savaient lire n’étaient pas de ce fait méprisables ». Ainsi, alors que les États anglo-saxons soutiennent la priorité à l’alphabétisation, les États latins estiment que, du point de vue du « but ultime de l’Unesco », qui est « le conditionnement pacifique des esprits », « de nombreuses autres activités sont plus importantes : collaboration scientifique internationale, amélioration des manuels scolaires, échanges de personnes, études des états de tensions, etc. »[17].
Dans cette opposition entre deux « clans », il faut souligner le rôle crucial des langues. Le fait que Torres Bodet s’exprime couramment en français a beaucoup contribué à donner une place prédominante au sein du Secrétariat aux fonctionnaires français, et donc aux idées françaises. Ainsi, durant son mandat, l’influence du sous-directeur général américain, Walter Laves, décline beaucoup au profit de celle des Français Jacques Havet, Jean Thomas, Jean-Jacques Mayoux, et surtout René Maheu[18]. Des personnalités importantes du monde politique français, comme Robert Schuman[19] et Georges Bidault[20], accordent un intérêt croissant à l’Unesco. La période de Torres Bodet correspond ainsi à une expansion de l’influence de « l’esprit latin »[21].
Cela se traduit aussi par la participation de plusieurs intellectuels de premier plan à l’Unesco. Ainsi, Bertrand Russell, Jean Piaget, et le sociologue brésilien Ozorio de Almeida[22] participent à la conférence générale de 1949, Helen Keller participe à la conférence générale de 1950[23], Maria Montessori aux conférences générales de 1950 et de 1951[24]. Les ethnologues Claude Lévi-Strauss, Alfred Métraux, Michel Leiris, Georges-Henri Rivière, P.-D. Gaisseau, Jean Servier[25], accomplissent des missions et écrivent des publications pour l’Unesco. En 1952, Jean-Paul Sartre propose à l’Unesco, sans succès, de rédiger un ouvrage sur le thème « Race et économie »[26]. C’est souvent par des réseaux de connaissances que ces intellectuels entrent en contact avec l’Unesco. C’est le cas de Claude Lévi Strauss : ayant fait la connaissance aux États-Unis pendant la guerre d’Otto Klineberg, professeur à Columbia, d’Alfred Métraux, et de Robert Lowie[27], il est engagé par l’Unesco grâce à ces contacts, et en particulier grâce à Alfred Métraux, pour réaliser des missions ponctuelles[28] ; ainsi, en 1951, Alfred Métraux le choisit pour rédiger une des publications de la série sur le racisme, Race et Histoire[29], qui deviendra célèbre. En 1952, il entre au Conseil international des sciences sociales (CISS), une des ONG culturelles créées et chapeautées par l’Unesco. En 1953, c’est à lui d’offrir à son tour un poste à son ami Georges Balandier[30]. L’ethnologue Georges-Henri Rivière, quant à lui, entre en contact avec l’Unesco par l’intermédiaire du Musée de l’Homme, réalise diverses missions pour l’Unesco et rédige des articles pour la revue Museum. En 1948, il devient directeur du Conseil international de la musique (CIM), autre ONG culturelle dépendante de l’Unesco[31]. Quant à Michel Leiris, c’est comme Lévi-Strauss grâce à Alfred Métraux qu’il est recruté par l’Unesco pour accomplir des missions ponctuelles[32].
L’accroissement de l’influence « latine » a pour corollaire un déclin de l’influence anglo-saxonne. Alors que de nombreuses personnalités britanniques avaient été très actives dans la gestation et les toutes premières années de l’Unesco, durant le mandat de Torres Bodet plusieurs fonctionnaires anglo-saxons quittent l’organisation[33]. Cette tendance est observée avec inquiétude par les diplomates anglo-saxons. En décembre 1948, A. Compton observe que le groupe des pays « européens latins » « est très influencé par la direction intellectuelle française et ne partage généralement pas l’insistance mise par les États-Unis sur la participation des « masses » à l’Unesco »[34]. En 1950, Paul Matthews, diplomate de l’ambassade britannique de Paris, estime : « il semble y avoir un certain retour à l’esprit de l’IICI de l’avant-guerre, et ce retour est particulièrement inspiré par les Français, auxquels le DG [directeur général] actuel accorde une très grande attention »[35]. Matthews s’inquiète de « la croissance de l’influence française par rapport à l’influence anglo-américaine à l’Unesco », jugeant que les hauts fonctionnaires de l’Unesco sont désormais tous « de profil culturel principalement français » ; « le DG lui-même se considère comme français de cœur » ; le seul haut fonctionnaire américain, Douglas Schneider, chef de la section des communications de masse, serait selon Matthews lui-même « en réalité français dans son orientation culturelle »[36]. Matthews s’alarme des désaccords presque systématiques entre clan latin et clan anglo-saxon, et estime que cette opposition récurrente entraîne « un réel risque pour l’Unesco d’être divisée dans son esprit sur la définition de ses véritables fonctions » ; il voit dans ce clivage persistant un grave risque d’affaiblissement de l’organisation[37]. Cet alarmement traduit bien l’inquiétude du « clan anglo-saxon » devant la prise de conscience de son affaiblissement. La même année, l’Américain Kenneth Holland, « conseiller du département d’État sur les affaires de l’Unesco », remarque que l’antagonisme entre Français et Américains au Secrétariat se reflète sur le plan des programmes, et observe avec anxiété que la conception française, d’un « programme ‘conceptuel’, ‘philosophique’ » est en passe de l’emporter sur la conception américaine, d’un « programme pratique »[38].
L’augmentation de l’influence « latine » se traduit aussi par l’augmentation du nombre des intellectuels et artistes qui collaborent avec l’Unesco : Chris Marker ; Jean Rouch[39], etc.
L’humanisme et l’universalisme de Torres Bodet, liés à sa culture classique et latine, trouvent leurs échos dans les affirmations de délégués et de membres du personnel marqués par la même culture. Ainsi, le comte Jacini, délégué de l’Italie, se revendique comme « authentique héritier de l’humanisme de Rome »[40].
Torres Bodet tient à ce que l’Unesco garde une orietnation nettement intellectuelle et il revendique explicitement l’héritage de l’IICI, qui avait plutôt été, dans les toutes premières années, un contre-modèle. « Dans une large mesure, l’Unesco renoue avec la tradition de l’IICI auquel, entre les deux guerres, la France a voué un si noble intérêt », souligne-t-il ainsi en 1952[41].
Cette évolution se traduit aussi au niveau de la langue. Comme l’observe un diplomate américain en 1949, « l’organisation est confrontée cette année à des problèmes sémantiques liés au changement de l’anglais vers le français comme première langue ». Ainsi par exemple, le terme « work plan », employé dans les deux premières années, et qui désignait des justifications budgétaires, étant désormais traduit en « plan de travail », désigne dès lors un programme de travail, d’où des malentendus dans l’administration[42].
Les rapports hebdomadaires de K. Holland au département d’état américain sont révélateurs de la rivalité entre clan latin et clan anglo-saxon durant ces années. Il observe que « l’intérêt et la coopération croissants des Français à l’Unesco […] va poser des problèmes avec nous dans les domaines où la préférence française sur les domaines culturels va heurter notre fort intérêt pour les communications de masse »[43].
Le passage de Huxley à Torres Bodet entraîne un net changement de style. Comme l’observe un diplomate américain : « avec l’arrivée du nouveau DG et de ses méthodes particulières de mener les choses, la mise au point du programme a subi une révolution plus qu’une évolution. Beaucoup des choses qui avaient été apprises par une expérience douloureuse en 1947 et 1948 ont dû être réapprises pendant les neuf ou dix premiers mois de cette année ». Il observe qu’alors que « Huxley était si intensément personnel dans son approche, le DG actuel est, en revanche, intensément impersonnel et en même temps intensément sensible aux forces politiques, ce que Huxley n’était pas »[44].
L’accroissement de l’influence latine durant ces années est à nuancer. Ainsi, malgré les efforts de Torres Bodet, l’influence anglo-saxonne se développe elle aussi à l’Unesco dans ces années. Elle est notamment importante dans le département des sciences sociales, où prédominent les sociologues américains[45].
En outre, malgré les efforts de Torres Bodet, l’aspect intellectuel des sessions des conférences générales et du conseil exécutif, ainsi que la qualité des activités intellectuelles, s’estompent rapidement. Ainsi, George V. Allen, président de la délégation américaine à la conférence générale de 1948, observe l’échec de la conférence générale à attteindre « un haut niveau intellectuel » ; il affirme : « le fait qu’aucune session de la conférence générale n’ait encore réussi à avoir le haut niveau intellectuel et moral que beaucoup de gens semblent attendre est sans doute un indice de l’immaturité et de la relative faiblesse de l’Unesco » ; il observe « l’aridité intellectuelle et le bas niveau de la discussion, l’absence de discours remarquables »[46]. De même, à la conférence générale de 1949, la délégation américaine observe que cette conférence a davantage le caractère d’une « réunion d’affaires » que d’une conférence intellectuelle[47].
L’époque de Torres Bodet correspond donc à un retour de la prédominance de l’esprit « latin » sur l’esprit « anglo-saxon ». Elle voit aussi le développement croissant de revendications régionalistes de la part des États extra-occidentaux.


L’influence du « Point 4 » de Truman dans l’évolution vers l’aide au développement.

Comme le montre l’orientation des discussions à la conférence d’Elseneur (1949), la perspective adoptée par l’Unesco dans le domaine de l’éducation dans ses premières années est en fait plutôt européenne et non pas mondiale. Dans ces années, les problèmes de l’éducation examinés par l’Unesco sont analysés à l’aune des problèmes de l’éducation qui se posent alors en Europe. Ce n’est que peu à peu que l’Unesco apprend à comprendre la spécificité des problèmes d’éducation dans les pays d’Afrique, d’Amérique latine et d’Asie.
Sous Torres Bodet est amorcé le virage vers un intérêt croissant pour l’aide au développement, l’aide aux pays en voie de développement. Laves souligne en 1951 l’importance que l’Unesco se consacre au développement économique[48].
Evans estime que c’est l’influence du discours de Truman du 20 janvier 1949 et de la mise sur pied des « experts du point 4 » américains (experts du Aid Program) qui a déterminé l’orientation de l’Unesco vers l’aide aux pays en voie de développement[49]. L’Unesco a fait la promotion de ce discours de Truman. Celui-ci a été prononcé un mois apres la première résolution de l’ONU relative à l’assistance technique. En mars 1949, l’Ecosoc définit les conditions d’exécution de l’assistance technique de l’ONU :
« 1) l’assistance en vue du développement économique sera fournie dans le cadre d’une action collective et toujours à la demande du pays intéressé ; 2) cette assistance sera destinée à accroître la productivité dans des domaines où la population toute entière pourra en profiter ; 3) le gouvernement bénéficiaire assumera une partie des frais (jusqu’à 50% en pratique) ; 4) l’assistance fournie ne devra en aucun cas servir de prétexte à l’ingérence politique ou économique de l’étranger dans les affaires intérireures des pays interessés. » [50]
Dès le lancement de l’assistance technique de l’ONU, il est prévu que l’Unesco y participe. Cette nouvelle perspective suscite l’enthousiasme de Torres Bodet. En 1952, celui-ci fait l’éloge de l’assistance technique, qu’il désigne comme une « noble entreprise de solidarité »[51]. Torres Bodet fait également l’éloge du « magnifique principe du ‘point Quatre’ ». Mais ce n’est pas tant pour faire l’éloge des États-Unis que plutot pour affirmer au contaire qu’« à l’origine même du point 4 » se trouve le concept d’éducation de base, dont il rappelle que c’est l’Unesco qui l’a mis au point[52]. C'est-à-dire qu’il s’efforce de ne pas faire apparaître l’assistance technique de l’Unesco comme inspirée du point 4, mais le point 4 comme inspiré des théories de l’Unesco.

Le développement des revendications régionalistes.

Entre 1948 et 1952, les États extra-occidentaux, principalement les États latino-américains et arabes, s’organisent pour lutter contre la prédominance des États occidentaux, et à cet effet expriment des revendications régionalistes.
Lors d’un débat confidentiel en séance privé du conseil exécutif en février 1949, le Brésilien Berredo Carneiro préconise que l’Unesco soit réorganisée sur une base régionale, sur le modèle de l’Union panaméricaine et de la Ligue arabe. Selon lui, l’organisation du monde sur des bases régionales est l’une des tendances de l’époque contemporaine, et l’Unesco devrait s’y adapter, sous peine de perdre en efficacité. Torres Bodet, tout en déclarant « comprendre parfaitement, en sa qualité de Mexicain, que l’Amérique latine désire posséder un centre régional », se montre réticent face à cette tendance, et défend la vocation universaliste de l’organisation. D’une manière générale, les délégués des pays occidentaux tendent à s’opposer aux volontés de régionalisation : pour John Maud, délégué du Royaume-Uni, comme pour Roger Seydoux, délégué de la France, si l’Unesco se régionalisait, elle perdrait son caractère universel, qui fait sa valeur et sa force. Roger Seydoux estime que le régionalisme, s’il est utile dans les domaines militaire et économique, est dangereux dans le domaine culturel, où il ferait entrer en jeu des intérêts nationalistes ; cela justifie selon lui le fait que le régionalisme est mentionné dans la charte de l’ONU, alors qu’il ne l’est pas dans la charte de l’Unesco[53]. Cependant, sous la pression des tenants de la régionalisation, et notamment de Berredo Carneiro, le principe de la création d’un centre régional de l’Unesco en Amérique latine est adopté : ainsi en juillet 1949, le « Bureau régional de l’Unesco pour l’hémisphère nord » est créé à La Havane[54].
Ainsi s’amorce une tendance à la régionalisation, sous l’impulsion des États membres. C’est également principalement sous l’impulsion des États membres que se développe un rapprochement croissant avec l’Eglise.

Un rapprochement croissant avec l’Eglise.

Parmi les délégués, plusieurs sont favorables à une implication plus grande de la religion catholique dans les affaires de l’Unesco. Ainsi, Holcroft, délégué de Nouvelle-Zélande, affirme que « la religion est le plus puissant des moyens d’influence pour changer les attitudes »[55]. Dans une interview, le comte Jacini, président de la délégation italienne, souligne l’importance qu’ont selon lui les enseignements de la Bible pour l’action de l’Unesco[56]. Plusieurs États membres font ainsi pression pour orienter de plus en plus l’organisation vers une reconnaissance des religions. Les débats au Congrès américain en 1950-51 témoignent de l’hostilité de l’opinion américaine à la perspective d’une Unesco « sans Dieu »[57].
Bien que non croyant lui-même, Torres Bodet, prenant en compte le fait que les croyants sont alors nettement majoritaires dans le monde, manifeste une grande attention aux questions spirituelles et religieuses[58]. En outre, Dag Hammarskjöld, secrétaire général de l’ONU, chrétien pratiquant, encourage l’Unesco à se rapprocher du christianisme[59].
En 1952, un pas important est franchi dans l’institutionnalisation des relations entre l’Unesco et l’Eglise catholique : Mgr. Roncalli, le futur pape Jean XXIII, est nommé Observateur du Saint Siège auprès de l’Unesco. La création de ce poste concrétise un resserrement des relations entre le Vatican et l’Unesco. Dès lors, l’ancien organe de liaison entre le Vatican et l’Unesco, le CCIC, devient moins essentiel au Vatican, qui par conséquent cesse de le financer ; le CCIC passe alors sous la responsabilité et le financement de la « Conférence des présidents des Organisations Internationales Catholiques (OIC) ». Cette institution, qui représente les diverses ONG catholiques, s’efforce de défendre les intérêts de celles-ci auprès des instances nationales et internationales[60]. La même année, l’archevêque anglais Godfrey, au nom du Saint-Siège, insiste auprès du gouvernement anglais pour que les membres de la délégation britannique aux conférences générales de l’Unesco soient des chrétiens, notamment catholiques, et soient capables d’ « aider à sauvegarder les traditions chrétiennes européennes »[61].
En octobre 1951, le pape Pie XII incite les catholiques à concourir aux efforts des organisations internationales oeuvrant pour la « compréhension mutuelle » et le « respect réciproque »[62]. Ainsi, entre 1948 et 1952, une évolution nette est accomplie, aboutissant à l’officialisation et au resserrement des relations entre l’Unesco et l’Eglise.
Ce rapprochement se traduit concrètement dans les projets sur le terrain. Ainsi, le CREFAL se dit héritier d’une entreprise missionnaire du XVIe siècle, qui s’était développée au même endroit, à Patzcuaro. En 1531, un prêtre, le père Vasco de Quirogua, s’était installé parmi les indiens Tarasques de Patzcuaro et y avait lancé une campagne intensive d’éducation. Elle avait consisté non seulement en l’apprentissage aux Indiens de la lecture et l’écriture, mais aussi en l’apprentissage de différentes activités manuelles : travail de l’osier, de la céramique, du cuivre, sculpture sur bois[63]. Plusieurs articles et publications mettent en parallèle cette ancienne entreprise missionnaire et celle lancée par l’Unesco au même endroit quatre siècles plus tard, présentant le Crefal comme s’inscrivant dans la filiation de cette action missionnaire[64]. En outre, l’expérience de radio Sutatenza, en Colombie, soutenue par l’Unesco, est menée par deux prêtres, le père Salcedo et le père Rodriguez, ancien boursier de l’Unesco[65]. Le chef de mission du projet pilote de Chine en 1949, Hubbard, est un ancien missionnaire[66]. Le missionnaire catholique Maurice Quéguiner définit l’éducation de base à l’intention des missionnaires catholiques, en ajoutant, par rapport à la définition de l’Unesco, la dimension religieuse, spirituelle, « une mystique de vie »[67].
Les membres du CCIC, notamment Jean Larnaud et Maurice Quéguiner, contribuent beaucoup au rapprochement entre l’Unesco et la religion catholique. Ainsi, dans une brochure du CCIC, Maurice Quéguiner se dit « frappé » par le préambule de l’acte constitutif de l’Unesco par le fait que « nous n’y trouvons aucune mention de Dieu ni de la dépendance de l’homme à son égard. Cette omission qui froisse profondément tous les croyants : chrétiens, juifs, musulmans et hindous, et qui ne satisfait qu’une petite minorité d’athées, est susceptible de mener dans la pratique aux pires errements. Les valeurs, les droits et les devoirs ne sont-ils pas fondés en Dieu et l’ignorer ne conduit-il pas à l’anarchie individuelle, morale et sociale ? ». Dans ce texte, qui s’adresse aux catholiques et en particulier aux missionnaires, Quéguiner exprime sans ambages la position des catholiques à l’égard de l’Unesco :
« Il appartient donc aux catholiques de faire en sorte que personne n’use des moyens et du prestige de l’Organisation pour faire triompher des mouvements qui leur soient hostiles et que, d’autre part, l’Organisation avec laquelle ils collaborent, n’envahisse pas leur propre terrain d’action, mais leur laisse au contraire toute latitude pour donner, de leur coté et par leurs moyens, ce complément chrétien sans lequel toute entreprise est pour les croyants tronquée ». « Dans son inspiration et ses fins, elle [l’Unesco] se rencontre en plusieurs points avec la doctrine chrétienne et se prête à notre égard à une possibilité de collaboration vraiment satisfaisante et fructueuse. »[68]
Ce rapprochement concerne non seulement la religion catholique mais aussi les bouddhistes. Ainsi, les prêtres bouddhistes japonais soutiennent l’expérience des télé-clubs au Japon, dans les années 1950[69] ; de même, en Thaïlande au début des années 1950, les moines bouddhistes collaborent au projet d’assistance technique de Chachoengsao[70].
Cependant, il faut nuancer ce rapprochement avec la religion. Parmi les fonctionnaires de l’Unesco de cette époque, plusieurs sont très laïques, comme André Lestage, membre de la ligue de l’enseignement[71].
Malgré l’enthousiasme initial de Torres Bodet et la sincère conviction qu’il apporte à la défense des conceptions de l’Unesco, celles-ci restent marquées d’incertitudes et de contradictions, ce qui entraîne peu à peu un découragement et une crise de confiance généralisés.

1.3.3. Torres Bodet, de l’enthousiasme à la désillusion et à la démission.

Des incertitudes et des contradictions.

Le flou des conceptions et l’éparpillement des projets.
Les débats tenus à la conférence générale et au conseil exécutif révèlent la difficulté des délégués à trouver des compromis pour faire s’accorder leurs conceptions divergentes[72]. Par conséquent, le flou persiste sur les objectifs, et l’accord ne parvient pas à se faire sur des priorités claires et concrètes à donner au programme. Les États membres, en particulier les États-Unis, déplorent l’abondance et l’éparpillement des projets[73], et estiment que cet état de chose provient de l’échec à définir une « philosophie de base » de l’Unesco[74]. Torres Bodet lui-même admet que le programme de l’Unesco est « éparpillé »[75], « trop abondant, trop dispersé »[76], et reconnaît que le cloisonnement de l’organigramme en départements distincts produit des conséquences néfastes, entraînant une « lamentable antithèse » entre science et culture, qui fait que ces deux domaines « suivent des routes distinctes » au lieu d’aller de pair[77].
Ce sont les Américains qui portent le jugement le plus sévère, comme le directeur général adjoint, Laves : « l’Organisation ne peut plus continuer à voter son programme sans avoir une compréhension claire de ce qu’elle veut accomplir et de quels sont les meilleurs moyens pour l’accomplir », s’exclame-t-il. Il déplore que le programme ait été augmenté peu à peu « par accrétion », et que cette inflation ait été encouragée par des « intérêts particuliers »[78]. Il regrette que le programme « manque de réalisme ». Il exhorte les États membres à se mettre d’accord pour en opérer une « clarification »[79]. Il déplore le « manque d’orientation précise » des activités de l’Unesco, et l’explique par « l’obscurité de la constitution » et « l’incertitude et le manque de direction de la conférence générale ». Il attribue ce flou à l’ambiguïté de l’Acte constitutif, qui laisse entendre que promouvoir l’éducation, la science et la culture serait en soi un facteur de paix. Laves critique le fait que le programme de l’Unesco ait été « divisé presque à la manière d’un cursus universitaire en différentes aires de savoir »[80]. L’américain Robert S. Smith, qui rédige en 1949 une étude sur La formulation du programme de l’Unesco, souligne le problème de la prolifération et de la dispersion des projets et l’importance d’en limiter le nombre. Il souligne l’importance d’un « principe unifiant ». Il souligne la nécessité d’élaborer des critères plus précis pour la sélection des projets ; il propose, par ordre de critère du plus au moins important : « a) le projet est-il faisable en termes de budget et de personnel ? b) si le Secrétariat ne peut pas se charger du projet, est-ce qu’une ou plusieurs commissions nationales peuvent le faire ? c) est-ce qu’une autre organisation qualifiée peut faire ce projet ? d) quel est l’effet multiplicateur de ce projet ? e) ce projet contribue-t-il à la paix et au bien-être de l’humanité ? »[81]. De même, la délégation américaine à la conférence générale de 1949 souligne le grave problème de la dispersion du programme et la nécessité de le concentrer[82]. L’Américain Sharp déplore le « programme compliqué que seules quelques délégations peuvent comprendre »[83].
L’ONU est elle aussi critique sur ces défauts ; à la conférence générale de 1950, ses représentants observent les efforts des « anti-proliférateurs » mais aussi leur échec à enrayer l’augmentation du nombre de projets[84].
La presse observe les « tâtonnements » de l’Unesco devant son « immense champ d’action », le « fourmillement d’initiatives et de tentatives parfois sans lendemain, dont il est difficile d’apprécier l’importance respective ou le bénéfice réel, et dans lesquelles la parole l’emporte trop souvent sur l’action »[85].

L’ethnocentrisme.
L’ethnocentrisme, qui s’était déjà manifesté durant la période de Huxley, perdure sans réel infléchissement sous Torres Bodet. Celui-ci le déplore, regrettant la quasi-absence de participation des intellectuels d’Afrique, d’Asie, et d’Amérique latine à l’Unesco, et affirmant, mais sans résultat, la nécessité d’« un meilleur équilibre de l’intelligence » entre Occidentaux et non-Occidentaux[86]. On observe aussi un occidentalocentrisme involontaire et inconscient dans la manière dont les projets de l’Unesco sont mis en oeuvre. En 1947, le premier volume du Book of Needs (« manuel des besoins » des pays devastés par la guerre) porte uniquement sur des pays d’Europe ; ce n’est que le second volume, paru en 1949, qui evoque les besoins en reconstruction des pays asiatiques, donc un peu tard[87]. Des projets d’esprit universaliste sont souvent, dans leur réalisation pratique, orientés dans un sens occidental. Ainsi, en 1948, les deux premières collections publiées par le Centre international d’échanges littéraires, La peinture européenne de 1860 à nos jours et La peinture italienne de la Renaissance, portent sur des thèmes européens. De même, le premier tome de la nouvelle série de l’Index translationum, publié en 1950, accorde une place prépondérante aux traductions d’œuvres européennes[88]. Et la célébration des grands hommes organisée par l’Unesco concerne essentiellement des Occidentaux. En 1949, le recueil Autour de la nouvelle déclaration des droits de l’homme s’efforce de prendre en compte les représentants des différentes zones géographiques. Cependant, si les peuples africains sont évoqués, ce n’est qu’en tant que « peuples non autonomes » et « sociétés primitives », et les articles les concernant sont écrits par des Occidentaux[89]. Les publications et périodiques produits par l’Unesco durant cette première période sont le plus souvent édités uniquement en anglais et en français, les deux langues officielles de l’organisation, ce qui exclut les populations de nombreux États membres. C’est le cas de l’Index translationum, du Bulletin international des sciences sociales (édité en anglais et français à partir de 1949), de la revue Current Sociology (éditée en anglais de 1952 à 1957), de la revue International Political Science Abstracts (éditée en anglais de 1952 à 1954), et des dictionnaires de terminologie des sciences sociales réalisés à partir de 1957. Cela s’observe aussi à travers les images. Ainsi, un timbre belge sur l’Unesco en 1951 montre un homme blond faisant la classe à des enfants noirs, et cette image est marquée de paternalisme et de sentiment de supériorité occidental[90].
Enfin, les États membres occidentaux se montrent dans ces années généralement peu intéressés par les besoins des États extra-occidentaux. Ainsi, Torres Bodet évoque dans ses Mémoires la déception qu’il a éprouvée lors de sa rencontre en 1951 avec le chancelier Adenauer et le président Theodor Heuss, devant leur froideur et leur absence d’intérêt pour les projets visant les masses sous-développées[91].

Un progressisme politique et social en réalité limité.
D’autre part, les positions progressistes affichées par l’Unesco ne se traduisent pas par des actions sur le plan pratique. Si l’Unesco affirme en 1951 le principe de « l’accession graduelle de tous les peuples à l’indépendance politique et aux responsabilités internationales »[92], elle fait preuve en réalité d’une extrême prudence au sujet de la question coloniale[93]. Les relations entre l’Unesco et les puissances coloniales sont alors très cordiales[94]. Les délégations de ces États comprennent des administrateurs coloniaux[95]. En effet, les deux partenaires ont des intérêts communs. Ces relations sont marquées par une intense coopération, sous la forme de consultations et d’arrangements officieux. Ainsi, à l’été 1951, l’Unesco, avant de publier son rapport sur « l’usage des langues vernaculaires dans l’éducation », le soumet officieusement aux services coloniaux des trois principales puissances coloniales (France, Royaume-Uni, Belgique), pour consultation. Sur la demande de l’Unesco, la Commission nationale française organise une réunion officieuse au Quai d’Orsay, pour présenter le projet de rapport de l’Unesco aux fonctionnaires français intéressés. Une consultation semblable est organisée avec le Colonial Office britannique, et avec le Ministère des colonies de Belgique[96]. Ce procédé de consultations officieuses, bien qu’il soit, au sein de l’Unesco, dénoncé par René Maheu, qui évoque « les justes critiques qu’un pareil traitement préférentiel peut nous valoir de la part des autres États membres et ce que ce précédent peut enlever à notre indépendance », est utilisé couramment. Les avantages que l’Unesco retire de cette collaboration officieuse avec les puissances coloniales sont importants ; ils consistent dans des « avantages diplomatiques immédiats » et dans « la valeur technique de la documentation » fournie par les puissances coloniales[97]. Ainsi, loin de s’opposer au système colonial, l’Unesco s’accommode de ce système et entretient avec les puissances coloniales des relations très étroites, ce qui va à l’encontre des principes progressistes qu’elle professe.
En outre, à cette époque, la délégation italienne comporte un ancien collaborateur de Mussolini, De Clementi[98]. Cependant, il faut préciser que ce n’est pas l’Unesco qui est responsable du choix des membres des délégations des États membres. Il faut aussi observer que cela n’est pas spécifique à l’Unesco, en rappelant que l’Allemand Kurt Waldheim, devenu secrétaire général de l’ONU à partir de 1971, avait été lié au nazisme.
De même, l’admission de l’Espagne franquiste à l’Unesco en 1952 apparaît en nette contradiction avec les idéaux progressistes de l’organisation, bien que pour certains, cette admission constitue au contraire un moyen de faire pénétrer en Espagne, au moyen des publications et des programmes de l’Unesco, une influence démocratique[99].
Ces défauts et ces contradictions internes donnent lieu à une crise de confiance.

Une évolution vers la crise de confiance.

Devant le décalage entre les aspirations idéales qu’il avait mises en l’Unesco et la réalité concrète, Torres Bodet se décourage peu à peu. Moins d’un an après son entrée en fonction, il affirme sa déception au sujet de la lenteur des progrès de l’Unesco[100] ; il affirme : « les résultats obtenus me frappent beaucoup moins que les obstacles qui demeurent »[101], « je suis bien loin d’être satisfait de notre œuvre »[102]. « Pouvons-nous nous déclarer satisfaits ? […] Les réponses, on le sait, sont fort pessimistes »[103]. Ce pessimisme se fonde sur le constat lucide d’une disproportion entre les ambitions de l’Unesco et ses moyens réels. « Notre programme est immense et les ressources dont nous disposons pour le mettre en œuvre sont bien limitées ! » Il observe que, « du fait de l’insuffisance des moyens », l’action de l’Unesco est « si restreinte qu’elle risque de paraître purement symbolique »[104]. Il estime que l’organisation connaît « une sorte de crise de croissance »[105], et évoque le risque « que l’Unesco ne s’ankylose en pleine croissance »[106]. Il est déçu de la réticence des intellectuels à y participer[107]. Au fil du temps, l’insatisfaction et le pessimisme ne font que croître chez Torres Bodet. Début 1951, il affirme ressentir « à chaque moment la sensation de ne pas réaliser pleinement ce qu’[il] souhaite. Au terme de chaque effort, [il se] retrouve face à [lui-] même, seul »[108]. Il se sent désabusé face à à la « lenteur » des activités, qui, de plus, lui « apparaissent destinées à la déroute »[109]. Ce sentiment intense de désillusion est à la mesure des espoirs illimités qu’il avait placés dans l’Unesco[110].
Peu à peu, Torres Bodet communique ses doutes et sa désillusion croissante au personnel et aux délégués[111], même à ceux qui étaient initialement parmi les plus ardents soutiens de l’Unesco, comme Berredo Carneiro[112]. Ainsi, en février 1949, Gabriel Marcel, délégué français à la conférence générale de Beyrouth, affirme dans un article de presse : « je dois avouer qu’elle m’a surtout apporté des déceptions »[113]. Selon Antonina Vallentin, la mission de l’Unesco apparaîtrait peu à peu aux délégués comme « quelque chose d’irréel » et d’irréalisable, consistant en de vains efforts pour « réconcilier l’irréconciliable » ; assistant à la conférence générale de 1949, elle souligne l’atmosphère de désillusion qui s’en dégage, évoquant « cet air triste et distingué des prophètes voués à l’échec » qui caractériserait les délégués[114]. En 1950, M. Montagnier, le chef du bureau des conférences, écrit à Ascher que, malgré la « crise très grave » que connait l’Unesco, « néanmoins je continue à espérer que lorsque la situation itnernationale se sera clarifiée, l’Unesco aura un très grand rôle à jouer. C’est cet espoir qui me retient dans l’organisation, alors que j’aurais beaucoup de choses intéressantes à faire au service de mon pays »[115].
De même, le personnel de l’Unesco ressent du découragement ; ainsi, en 1949 A. Métraux écrit à un ami : « Cette année est sans doute la dernière que je passe à l’Unesco car j’ignore si je suis d’humeur à vivre ainsi dans l’irréalité d’un univers dont rapports et conférences font la seule substance »[116]. La démission de Laves en janvier 1950 participe de cette atmosphere de découragement du personnel[117].
La première démission de Torres Bodet, en 1951, reprise quelques jours plus tard, ébranle fortement le moral du personnel et des délégués[118]. Evans observe : « cela nous paraissait insensé. Alors nous nous sommes tous mis à genoux et l’avons supplié de rester ». Il observe que les Américains, et notamment Howland Sargeant, président de la délégation américaine, ont beaucoup œuvré à faire rester Torres Bodet, tandis que les Britanniques, et notamment John Maud, président du conseil exécutif, voulaient qu’on prenne sa démission au mot[119]. La démission reprise de Torres Bodet n’est cependant pas bien perçue par le département d’état américain, qui critique un geste « irréfléchi », une « manifestation d’humeur égoïste »[120], qui évoque « le tour de force du DG », qui « a laissé tout le monde ébahi », et estime que sa démission n’était en fait que « du bluff », et affirme : « en tout cas, c’est la dernière fois qu’il pourra avoir recours à une telle manœuvre en toute impunité »[121].
La démission définitive de Torres Bodet en 1952 [annexe 11] ouvre une grave crise de confiance. Elle est ressentie avec beaucoup d’émotion et de tristesse par les délégués et le personnel. Ainsi, Alfred Métraux écrit dans son Journal :
« 22 novembre 1952 : séance émouvante de l’assemblée, à laquelle le DG donne sa démission. (…) Discours très émouvant de Piaget, demandant au DG de rester. Applaudissements. Second discours du DG, encore meilleur, sur le thème : « je suis un homme brûlé, je n’ai plus le courage et la foi ». Tout le monde est ému et bouleversé »[122].
De même, la commission nationale américaine observe que cette conférence générale a été « dramatique », marquée par « de vifs débats », des « moments de grand espoir », et des moments « proches du désespoir »[123].
Luther Evans, qui dit avoir beaucoup d’ « affection » et d’ « admiration » pour Torres Bodet, observe que sa démission était motivée par le refus de la conférence générale de voter son budget, et par la prise de conscience que « les pays sous développés avaient contre eux les grandes puissances dans le domaine budgétaire »[124].
Il faut observer qu’un tel découragement est à cette époque caractéristique de l’ensemble du système de l’ONU. Ainsi, en 1949, Maheu observe que M. von Ernst, directeur général de l’UIT, est complètement découragé : « laudator temporis acti, il ne voit partout aujourd’hui que désordre et impuissance»[125] ; le secrétaire général de l’ONU, Trygve Lie, est également découragé en 1952, ce qui l’amène à démissionner[126].
A la fin de l’année 1952, l’Unesco a déjà connu deux directeurs-généraux, deux personnalités très différentes par leurs conceptions et par leur style mais qui ont eu pour point commun un véritable enthousiasme pour l’Unesco et une vision idéaliste de leur mission. Cette période a vu éclore et se développer plusieurs conceptions, divergentes et parfois opposées, de la mission de l’Unesco, ainsi qu’un foisonnement de projets. Pourtant, fin 1952, une période se clôt : la démission de Torres Bodet, due aux difficultés à s’accorder sur les conceptions directrices et à les mettre en pratique, entraîne une crise de confiance durable.
C’est la fin du foisonnement d’idées et de projets, et de la formulation d’espoirs idéalistes dans le rôle de l’Unesco. Les mandats des deux directeurs généraux suivants, Evans et Veronese, de 1953 à 1961, vont correspondre à une période moins riche sur le plan des conceptions.

1.4. Evans (1953-58) et Veronese (1958-61) : une période de transition ?

La personnalité des directeurs généraux qui se succèdent alors, John Taylor (directeur général par interim de décembre 1952 à juillet 1953[127]), Luther Evans (de juillet 1953 à décembre 1958), et Vittorino Veronese (de 1958 à sa démission en 1961) n’est pas très riche en nouveaux développements conceptuels et ne permet pas plus que la précédente de parvenir à un consensus sur les conceptions[128].

1.4.1. Des dirigeants moins charismatiques.

John Taylor (1952-53) : un directeur général intérimaire progressiste mais effacé.

L’Américain John W. Taylor, qui avait été directeur général adjoint pour l’administration à partir de décembre 1950, assure l’intérim de Torres Bodet pendant sept. mois, le temps qu’un nouveau directeur général soit élu. Lié à la National Education Association, président de l’université de Louisville (Kentucky), Taylor est un esprit progressiste et novateur. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, il a assuré la charge de dirigeant des affaires éducatives et religieuses dans le gouvernement militaire de la zone américaine de l’Allemagne. En 1951, il a fait de son université la première des États du Sud des États-Unis à supprimer entièrement les barrières raciales pour les étudiants. Il a également créé, dans le cadre de cette université, des programmes éducatifs et culturels diffusés par radio, les radio-assisted correspondence courses, système précurseur d’enseignement à distance, et a mis en place à Chicago une association de télévision éducative, le CETA (Chicago Educational Television Association)[129]. Son intérêt pour l’éducation des masses, la paix et la question du racisme, et son espoir idéaliste en l’Unesco (il déclare en devenant directeur général adjoint : « j’ai l’impression que la position que j’ai le privilège d’occuper est celle pour laquelle je me suis préparé toute ma vie »)[130], lui confèrent un profil adapté pour le poste de directeur général. Cependant, la brièveté de son mandat ne lui permet pas de peser de manière significative sur l’orientation des conceptions de l’Unesco. Il semble se caractériser surtout par sa « discrétion »[131]. C’est hors de l’Unesco qu’il s’est épanoui et a appliqué ses idées, notamment en matière de communications de masse, avec le CETA qu’il dirige jusqu’en 1971 et qui toucherait dans les années 1960 plus de 900 000 enfants[132]. Il quitte l’Unesco à la suite de l’élection de Luther Evans en juillet 1953.

Luther Evans (1953-58) : un homme pragmatiste épris de bonne administration, de planification, d’efficacité.

Autant Torres Bodet était un intellectuel proche du « clan latin », autant Evans est incontestablement un représentant du « clan anglo-saxon ». Né au Texas en 1902 dans une famille modeste de fermiers, il passe les dix premières années de sa scolarité dans une école à maître unique, où il n’assiste aux cours que six mois par an, travaillant à la ferme familiale l’autre moitié de l’année. Après un doctorat de science politique portant sur le système des mandats de la SDN, il enseigne dans diverses universités américaines, puis devient en 1935 directeur des archives de la Work Progress Administration, l’une des agences de secours créées dans le cadre du New Deal. En 1939, grâce au bibliothécaire du Congrès Archibald MacLeish (l’un des futurs fondateurs de l’Unesco), il devient directeur des documents juridiques à la bibliothèque du Congrès. En juin 1945, il succède à MacLeish. Il participe avec lui à la conférence constitutive de l’Unesco en novembre 1945. Il devient l’un des premiers membres de la Commission nationale américaine pour l’Unesco en 1946, puis son président en 1952. À partir de 1949, il représente les États-Unis au conseil exécutif. Evans était lié avec Torres Bodet depuis 1946, l’ayant rencontré au Mexique dans le cadre d’un voyage avec la American Library Association[133].
Comme ses deux prédécesseurs au poste de directeur général, et comme la plupart des Américains ayant participé à la création et au début du fonctionnement de l’Unesco, Evans est démocrate, et a été marqué dans les années 1930 par l’expérience du New Deal de Roosevelt[134]. Il en a retiré un grand intérêt pour la planification.
A la tête de l’Unesco, Evans se caractérise par son pragmatisme, sa volonté de bonne administration et d’efficacité concrète. Dès son discours d’entrée en fonction, il déclare vouloir servir l’Unesco non pas en idéaliste mais en « administrateur de profession »[135]. Alors que ses prédécesseurs avaient estimé que les résultats de l’action de l’Unesco n’arriveraient qu’à moyen ou à long terme[136], Evans exige « des résultats pratiques et immédiats »[137]. Les évocations que font de lui les anciens fonctionnaires insistent sur cet aspect : il est décrit comme un « Texan au caractère pratique »[138], « fervent adepte du fonctionnalisme »[139], « administrateur épris de bonne gestion »[140], « très grand administrateur »[141]. Par son style nettement moins intellectuel et distingué que ses deux prédécesseurs, il est considéré comme « un bien sympathique et truculent Texan »[142], et est surnommé par son personnel « un cow-boy dans un champ de culture »[143].
Soucieux surtout d’efficacité administrative, Evans ne se préoccupe pas de développer un appareil conceptuel pour guider les actions de l’Unesco. Il se déclare opposé à l’idée d’une culture mondiale unique et d’une mission théorique pour l’Unesco[144]. Il tranche ainsi nettement avec les idées et le style de Huxley et de Torres Bodet. À l’extraordinaire foisonnement de conceptions qui avait accompagné les premières années de l’Unesco succède un quasi-vide théorique. Plus que son prédécesseur, Evans est favorable au développement des sciences sociales à l’Unesco[145]. Cependant, le gouvernement américain est hostile à un grand développement des activités de sciences sociales[146]. Evans diminue l’importance du programme de communications de masse (bourses, échanges de personnes)[147]. Cependant, en 1966, dans une interview, il affirme que son mandat de directeur général lui a fait prendre conscience de l’importance des communications de masse pour œuvrer à la paix : « en travaillant à l’Unesco j’ai pris une conscience accrue de l’extrême importance de faire se connaître les uns les autres les peuples, cultures et civilisations de différentes parties du monde »[148].
Evans s’efforce de faire de l’Unesco davantage un catalyseur qu’un agent d’œuvre : « mobiliser plus que développer »[149]. Evans impose l’idée que l’Unesco ne peut être qu’un catalyseur, qu’elle ne peut faire que des actions d’ampleur limitée[150].
Evans est opposé aux déclarations éloquentes et idéalistes qui ont marqué les débuts de l’Unesco ; il estime que c’est une tentation à laquelle il ne faut pas céder, il fait au contraire des discours « terre à terre », « prosaïques », bien qu’on l’incitait à faire des discours « éloquents », « qui arrachent des larmes » et « qui remuent le cœur ».
« J’ai résisté aux tentations de lancer des appels irréalistes à une conversion religieuse des peuples dans l’intérêt de la paix, ou de faire des grands prêches sur l’avènement d’un nouvel esprit d’humanité chez tous les hommes afin d’accomplir la paix. Au lieu d’instaurer dans l’Unesco dans un esprit de grands mots émotifs, ce qui est si courant chez les gens qui soutiennent les Nations Unies, […] j’ai adopté une approche prosaïque, réaliste, gestionnaire, et j’ai essayé de focaliser l’attention précisément sur ce que nous proposions de faire […]. Je pense que ces appels émouvants à l’humanité doivent être faits. Cependant, ma conviction est qu’il ne revient pas au chef de l’Unesco de les faire. Laissons les hommes politiques des États membres les faire. Laissons le pape les faire. Laissons les chefs religieux les faire. Laissons les intellectuels les faire. Mais le DG de l’Unesco est le manager d’une petite opération aux grands objectifs et dotée de peu d’argent, où il s’efforce d’améliorer les choses par une bonne gestion. »[151]
Durant les années de Evans, sous l’impulsion de celui-ci, le personnel tend à devenir plus « administrateur » ; c’est ce qu’observe Métraux dans ce journal en 1955, écrivant à propos de Alva Myrdal : « Je suis frappé de sa nature administrative »[152].
Paul Rivet, à la conférence des commissions nationales européennes pour l’Unesco, en 1956, prend acte du changement d’orientation impulsé par Evans : « il est certain que la conception initiale de l’Unesco s’est peu à peu estompée pour faire place à une conception nouvelle ». Il observe qu’à la conférence générale de 1956, « le DG a eu le courage de consacrer tout un chapitre de son rapport aux échecs » de l’Unesco ; il observe la priorité à des préoccupations « plus réalistes » qui est désormais celle de l’Unesco. « Elle est devenue un organisme central de distribution de services et d’aide aux États membres, et surtout aux pays sous-développés »[153].
Cependant, malgré les efforts de rationalisation de Evans, les projets de l’Unesco restent toujours marqués de « vague » et d’ « imprécision », comme le déplore Métraux, qui regrette que sa directrice Myrdal « ne se rend pas compte des difficultés pratiques »[154].
A l’issue de son mandat à l’Unesco, Evans devient président de la Commission des États-Unis pour les réfugiés, et directeur de la bibliothèque de l’université de Columbia[155].

Veronese (1958-1961) : un catholique antifasciste.

L’Italien Vittorino Veronese est issu de l’ascension sociale. Fils d’une institutrice et d’un ouvrier électricien, il est boursier, ce qui lui permet de devenir avocat et professeur de droit. Son parcours professionnel s’oriente ensuite vers l’administration bancaire, où il obtient des postes importants dans la banque italienne (président de l’Institut central de crédit, et du Consorzio di credito per le opere pubbliche). Sur le plan idéologique, il participe activement aux milieux catholiques italiens (étant lié très tôt à la Federazione Universitaria Cattolica Italiana, la FUCI, puis devenant en 1943 secrétaire général du Mouvement catholique des diplômés universitaires, puis au lendemain de la guerre président de l’Action catholique italienne, et membre du conseil d’administration de la Fondation Premi Roma pour la jeunesse). Il se caractérise aussi par l’antifascisme. Pendant la guerre, contraint à l’inaction à cause de son refus d’adhérer au fascisme, il se consacre à l’étude des problèmes sociaux et éducatifs. Il anime le groupe intellectuel chrétien-démocrate de la revue italienne Studium. Ce groupe, auquel participe entre autres De Gasperi, rédige en 1943 le Codice di Camaldoli, manifeste d’action sociale d’esprit chrétien-démocrate, qui exercera une influence marquante sur les hommes politiques qui rédigeront la Constitution italienne au lendemain de la guerre[156].
Il s’est lié à l’Unesco dès l’adhésion de son pays en 1948 : membre de la Commission nationale italienne, il participe à ce titre à la conférence générale. En 1952, il devient membre du comité d’experts de l’Unesco pour l’étude du droit de participation à la vie culturelle. La même année, il devient le représentant de l’Italie au conseil exécutif ; il y reste jusqu’à son élection au poste de directeur général, en devenant même le président à partir de 1957[157]. Socialement et politiquement conservateur, Veronese voit la solution des problèmes de l’humanité dans l’attachement aux valeurs et aux structures sociales traditionnelles, comme la famille et la religion[158].
Lorsqu’il accède au poste de directeur général, il est bien vu de la presse mondiale [annexe 12]. Il est décrit par le New York Times comme « un intellectuel européen » typique, « un homme aux talents multiples » ; « dans tout campus universitaire, il serait immédiatement pris pour un professeur ». Le New York Times observe qu’il va sans doute « placer davantage l’accent sur les aspects culturels et esthétiques de l’Unesco » que son prédécesseur[159]. De même, le magazine français Images le présente comme « doué d’une immense culture, d’une vaste expérience et d’une grande probité intellectuelle », comme ayant un « enthousiasme communicatif »[160]. Quant à la presse italienne, elle est en fait divisée : si le journal chrétien démocrate Il Popolo consacre un éditorial à son élection, en revanche la presse communiste italienne refuse de s’associer à cet enthousiasme, étant hostile à Veronese parce qu’il est un homme de finances et à cause de son engagement catholique marqué, et estimant qu’il n’a aucun titre à occuper ce poste. Ainsi pour le quotidien communiste L’Unità, Veronese « n’a à son actif aucune oeuvre de quelque genre que ce soit et ne s’est jamais consacré à la moindre activité culturelle. Il a passé toute son existence dans les milieux politiques et financiers liés au Vatican ». Cette élection « est l’expression de la pire intolérance idéologique et de la politique impérialiste la plus réactionnaire »[161].
Veronese ne reste pas longtemps en poste ; dès 1960, affaibli et dépassé, il cède à plusieurs reprises l’interim provisoire de ses fonctions à Maheu ; puis, en octobre 1961, il démissionne[162], désignant Maheu comme directeur général par interim[163], conformément au souhait des États-Unis[164].
La personnalité moins charismatique de ces deux directeurs généraux par rapport aux deux premiers, et leur absence de projet d’envergure pour doter l’Unesco de conceptions directrices nettes, font des années 1953-1961, par opposition avec les sept. premières années, une période où peu de développements conceptuels nouveaux sont introduits.

1.4.2. Des conceptions peu renouvelées.

Une influence dominante des conceptions anglo-saxonnes.

Pour atteindre le but de l’Unesco qui est la paix, l’accent est mis durant ces années, sous l’influence des conceptions anglo-saxonnes, sur deux éléments, à des échelles différentes : le rôle des communications de masse, et celui des communautés locales[165].
Les Anglo-Saxons imposent la volonté de planification rigoureuse et de concentration des objectifs, et l’idée qu’il faut opérer une « stricte limitation » de la portée des actions de l’Unesco, que l’organisation doit se limiter à « agir comme un stimulant, une pompe, un catalyseur »[166]. Cependant, ils prônent aussi un net développement des activités d’assistance technique[167].
Le développement de ces conceptions anglo-saxonnes est favorisé par la présence d’un directeur général américain (Taylor puis Evans) puis d’un directeur général sous l’influence politique des États-Unis (Veronese). En effet, comme l’observe le gouvernement américain en 1958, « Veronese n’est pas susceptible d’avoir une vision exclusivement européenne des problèmes intellectuels. Cela devrait rassurer ceux qui considèrent que l’Unesco tend à une concentration excessive sur les problèmes des intellectuels européens »[168]. Il est aussi favorisé par l’influence croissante du personnel américain et britannique, des membres des délégations américaine et britannique, et de la commission nationale américaine[169], de même que par l’éloignement du pouvoir de Français comme Maheu, envoyé par Evans en poste à New York. Ces conceptions sont soutenues par les représentants de l’Inde, comme Maulana Azad[170].
Evans affirme que sa tournée en Asie dans le cadre de son mandat de directeur général l’a marqué et l’a convaincu de l’urgente nécessité de lancer un grand programme d’alphabétisation des adultes ; ses discussions avec Nehru sur le problème de l’analphabétisme y ont contribué[171].
Sous Evans, le personnel de l’Unesco est de moins en moins intellectuel. Ainsi, à Alva Myrdal succède Guy de Lacharrière, diplomate du Quai d’Orsay, à la tête du département des sciences sociales[172].
Le fort accroissement de l’influence des conceptions anglo-saxonnes est observé avec inquiétude par le gouvernement français dès le début du mandat de Evans. Ainsi, la direction des affaires culturelles note « un renforcement des positions américaine et britannique au sein du conseil exécutif », et y observe la prévalence de « la tendance anglo-saxonne en faveur d’une orientation des activités de l’organisation vers l’assistance technique aux pays sous-développés » ; elle observe un véritable tournant dans l’orientation conceptuelle du programme : « le programme de l’Unesco est désormais marqué par la conception anglo-saxonne des organisations internationales et remet en cause l’équilibre réalisé depuis 1946 entre les différentes activités de cette institution spécialisée »[173]. Le développement croissant des activités d’assistance technique entraîne l’inquiétude de la France :
« Quelles que soient les assurances données à la France, en ce qui concerne l’importance des crédits qui seront affectés à des domaines d’activités où notre pays occupe une place de premier plan, il ne faut pas se dissimuler que le programme « rénové » de l’Uneso est désormais marqué par la conception anglo-saxonne des organisations internationales et remet en cause l’équilibre réalisé depuis 1946 entre les différentes activités »[174].

Cette prise de conscience du déclin des conceptions « latines » à l’Unesco devant l’influence croissante des conceptions « anglo-saxonnes » conduit à des luttes idéolgiques.

Les luttes d’influence entre conceptions anglo-saxonnes et conceptions « latines ».

Cette période est marquée par la radicalisation de l’opposition entre le « clan latin » et le « clan anglo-saxon », à la fois au sein du Secrétariat et parmi les délégués des États membres. Un clivage net oppose les États « latins » favorables aux activités intellectuelles et scientifiques, et les États « anglo-saxons », favorables aux actions sur le terrain, à destination des masses. Le discours prononcé en 1953 devant Evans par le président de la commission nationale italienne illustre bien cette opposition : « il est certain que nous inclinons plutôt vers les activités culturelles et scientifiques que vers l’éducation de base »[175], affirme-t-il. Ces propos sont une façon de s’opposer aux conceptions anglo-saxonnes représentées par Evans.
Les fonctionnaires français ou francophones forment un groupe soudé par leur hostilité à Evans. Delavenay évoque Evans de manière très péjorative dans ses Mémoires :
« De petite taille, trapu, mâchoire carrée de bouledogue, verbe haut et souvent vulgaire, la voix aigüe, Evans devait souffrir durant ses années à la tête de l’Unesco, d’un complexe d’infériorité culturelle face à des hommes comme Jean Thomas ou René Maheu. Mais il compensait en agressivité ce sentiment d’appartenir à une civilisation relativement fruste »[176].
Un véritable « choc culturel » se manifeste entre Evans et les fonctionnaires européens, comme le laissent percevoir les correspondances internes ainsi que les rapports confidentiels des réunions du personnel. Delavenay témoigne de l’opposition nette entre Evans et Jean Thomas lors de ces réunions : « Dans ces moments-là nous frémissions du choc de deux cultures, de deux conceptions des relations humaines »[177]. Entre les deux hommes c’est une opposition non seulement de conceptions mais aussi de caractère, entre la « fougue texane » d’Evans et « la prudence européenne et ‘normalienne’ de Jean Thomas »[178]. Comme l’observe en 1958 l’ambassade américaine de Paris dans une lettre confidentielle, à propos de Evans :
« Sa tendance à appeler un chat un chat, son caractère dur et hargneux, son supposé irrespect pour les choses « Culturelles » avec un grand C et sa préoccupation déclarée pour les besoins des régions sous-développées ont suscité une considérable rancœur et une haine parmi les Européens de l’Ouest et du Sud »[179].
Ce choc culturel se manifeste aussi au sein de chaque département, entre fonctionnaires des deux « clans ». Ainsi, au département de l’éducation, une mésentente profonde oppose le Britannique John Bowers et le Français Jean Guiton[180]. De même, Delavenay évoque les « tensions » existant en 1954 entre le directeur du département des communications de masse, l’Américain Douglas Schneider, et son collaborateur le Français Philippe Desjardins-Wolf[181].
Ce clivage se manifeste clairement à travers la rivalité entre la langue française et la langue anglaise au sein du Secrétariat. Huxley, qui s’exprimait en anglais, avait eu pour plus proche collaborateur l’anglophone Laves ; Torres Bodet, qui avait privilégié la langue française, s’était entouré de préférence du francophone René Maheu. Avec Luther Evans, c’est le retour à la langue anglaise : il s’exprime exclusivement dans cette langue et s’entoure de collaborateurs anglophones. « Mieux valait lui parler anglais s’il l’on voulait être bien compris », se souvient Delavenay[182]. Dès lors, le fait de ne pas maîtriser l’anglais devient un véritable handicap, qui conduit à la marginalisation des fonctionnaires qui sont dans ce cas. Ainsi, pendant ces années, Roger Caillois, qui ne parle pas anglais, ne parvient pas à faire entendre ses idées au sein de sa division[183].
Malgré la domination des conceptions anglo-saxonnes, au sein du Secrétariat, le « clan latin » maintient une forte influence, grâce à l’importance numérique des Français. Ainsi, en 1954, sur les 349 postes de cadre supérieur de l’Unesco, 46 sont occupés par des Américains (soit 13%), 76 par des Français (soit 22%), et 60 par des Britanniques (soit 17%)[184]. C’est aussi en marge du Secrétariat, dans les réunions des commissions nationales et dans les diverses conférences, que les conceptions françaises affirment leur importance. En 1956, le gouvernement français se montre très satisfait de la conférence des commissions nationales organisée par la commission nationale française, qui selon lui « a montré que la France exerçait dans les milieux intellectuels en Europe une influence incontestable »[185]. La même année, les diplomates américains assistant à la conférence sur l’éducation publique organisée par l’Unesco et le BIE à Genève observent avec satisfaction que « les communications et les idées de la conférence sur l’éducation publique sont teintées très fortement par le langage français et les pratiques éducatives françaises »[186].
L’élection de Veronese au poste de directeur général en 1958 entraîne une réorientation vers les conceptions « latines », étant donné que Veronese, s’exprimant en français, accorde une place prioritaire aux fonctionnaires français. En effet, avec l’arrivée de Veronese, Maheu revient au Siège et retrouve le rôle prépondérant qu’il avait dans la gestion de l’Unesco avant d’être envoyé en poste à New York[187]. L’année suivante, il est nommé par Veronese directeur général adjoint, ce qui suscite la satisfaction du gouvernement français : « on ne peut que se féliciter de ce projet qui renforcera la position de la France à l’Unesco en plaçant un directeur général adjoint français auprès d’un directeur général qui n’utilise que notre langue dans l’exercice de ses fonctions »[188].
Ainsi, malgré la prédominance des conceptions anglo-saxonnes, les conceptions « latines » restent influentes durant cette période, et le Secrétariat est le théâtre d’une concurrence entre ces deux tendances. Il ne s’agit pas d’un renouvellement conceptuel, mais de la radicalisation de l’opposition entre des tendances apparues dans les premières années. Il en va de même avec la poursuite de l’orientation spiritualiste.

La poursuite de l’orientation vers le spiritualisme.

Durant ces années, l’orientation de l’Unesco vers une sensibilité spiritualiste, qui s’était affirmée durant les années précédentes, se poursuit. Il ne s’agit donc pas, là non plus, de l’apparition d’une conception nouvelle, mais de la continuation et de l’accentuation d’une orientation apparue précédemment.
Luther Evans, protestant pratiquant, est le premier directeur général à exprimer explicitement sa foi religieuse dans le cadre de ses fonctions, en en appelant, dans son premier discours, à « Dieu tout-puissant » pour l’aider à accomplir sa tâche[189]. Plus tard, il déclare que l’Unesco a un grand rôle à jouer pour « résoudre le problème spirituel du monde »[190]. Par ces affirmations, il contribue à poursuivre le rapprochement entre l’Unesco et les institutions religieuses. Veronese, catholique pratiquant, exprime lui aussi sa foi religieuse dans le cadre de ses fonctions. Dans l’un de ses premiers discours, il déclare : « Vers Toi, mon Dieu, j’élève mon âme ; en Toi, je mets ma confiance ; Toi, dont les sentiers sont amour, justice et vérité »[191]. Il contribue pendant son mandat à stimuler la coopération entre les organisations chrétiennes américaines et l’Unesco[192].
Cette inflexion spiritualiste est liée non seulement à la sensibilité des directeurs généraux, mais aussi à celle d’une partie du personnel, des représentants des États membres à la conférence générale et au conseil exécutif, et des membres des commissions nationales[193]. L’Irakien Matta Akrawi au Secrétariat[194], l’Italien Gian Franco Pompei au conseil exécutif[195], le Péruvien Garcia Calderon à la conférence générale[196], le Français Louis François à la commission nationale française[197], en sont quelques exemples. Pour Garcia Calderon, en 1958, « à l’heure actuelle, seuls le Vatican et l’Unesco ont la mission œcuménique, c’est-à-dire universelle, de faire entendre au monde entier ces paroles du Christ : ‘Paix sur la terre aux hommes de bonne volonté’ ».[198] Dans cet esprit, en 1958, un observateur du Saint Siège est inclus dans le comité consultatif intergouvernemental du projet majeur d’Amérique latine[199].
A l’ouverture de la conférence générale de 1960 est célébrée une messe, par Mgr. Bertoli, observateur du Saint Siège auprès de l’Unesco, à l’Eglise Saint Francois Xavier, qui est la paroisse de l’Unesco. Le CCIC observe avec satisfaction que « de nombreux représentants des États membres et des organisations internationales y participèrent ainsi que le directeur général entouré de ses collaborateurs. » A cette conférence, 13 OIC sont représentées[200]. Le CCIC est renforcé en 1960 du fait que le père Russo, « une des personnalités marquantes de la vie intellectuelle catholique française », en devient conseiller ecclésiastique[201]. La même année, Angelo Pedroni devient observateur permanent du Saint Siège auprès de l’Unesco[202]. Cette année-là, Radio Vatican fait une émission sur l’Unesco[203]. Dans les années suivantes, l’Unesco accueille de plus en plus de congrès d’OIC, comme par exemple le Congrès de la Fédération internationale catholique d’éducation physique en avril 1961[204].
Le père de Le Court participe activement à l’élaboration de la convention sur la discrimination dans l’enseignement, à la conférence générale de 1960, et s’efforce de l’orienter dans un sens pro-religieux ; le CCIC se réjouit qu’avec cette convention, « le droit des parents de faire assurer l’éducation religieuse et morale de leurs enfants est formellement affirmé »[205].
Cette tendance spiritualiste n’est cependant pas unanime. Des fonctionnaires athées, comme Jean Thomas, y sont réticents[206]. Lors de l’élection du directeur général à la conférence générale de 1958, les délégués se divisent entre partisans et opposants à cette tendance. Maria Luisa Paroneto Valier, membre de la commission nationale italienne, évoque la farouche opposition à l’élection de Veronese de la part des partisans de « la laïcité à outrance », qui dénoncent les liens étroits de celui-ci avec le Vatican[207].
Une fois élu, Veronese oriente nettement l’Unesco vers un rapprochement avec le Saint-Siège et avec les mouvements catholiques[208]. Ce rapprochement est facilité par l’attitude très favorable à l’Unesco de Pie XII, qui en 1957, dans un discours devant l’Union mondiale des Organisations Féminines Catholiques, présente l’engagement des catholiques dans les organisations internationales comme relevant du « grand devoir missionnaire des chrétiens » ; en outre, la même année, dans l’encyclique Fidei Donum, consacrée aux missions, il souligne « le rôle efficace que peuvent jouer des militants laïcs » en agissant dans le cadre de mouvements internationaux[209]. Son successeur, Jean XXIII, qui était le premier observateur permanent du Vatican auprès de l’Unesco, est également très favorable à l’Unesco. Le nouvel observateur permanent du Vatican est Mgr Benelli, qui s’affirme comme « un grand apôtre de l’Unesco »[210]. La nonciature apostolique félicite chaleureusement Veronese pour son élection[211]. Le magazine français Images, evoquant la visite de Veronese en Egypte en 1960, la présente comme un « pélerinage »[212].
Sous la double impulsion de Veronese et du Vatican, l’Unesco accueille chaleureusement les ecclésiastiques, ainsi que les laïcs représentants d’organisations internationales catholiques (OIC)[213]. De nombreuses associations, organisations, revues, syndicats, de tendance catholique, développent des relations très cordiales et étroites avec l’Unesco : le CCIC[214], l’Office catholique international du cinéma[215], l’association Caritas Internationalis[216], l’association Pax Romana[217], l’Union internationale de la presse catholique, le Bureau international catholique de l’enfance, l’Agence catholique internationale d’information[218], la revue Esprit[219], le journal La Croix[220], la Confédération internationale des syndicats chrétiens[221], etc. Des liens étroits, fondés sur le partage d’une même spiritualité chrétienne, se tissent entre Veronese et les dirigeants et acteurs de ces groupements ; ceux-ci lui expriment leur « fierté »[222], leur « joie », leur « orgueil », de voir à la tête de l’Unesco Veronese, « apôtre laïc, entièrement consacré à promouvoir la collaboration internationale dans un esprit authentiquement chrétien »[223], à « donner à l’Unesco cette empreinte qui provient de [leur] Foi Chrétienne »[224]. Pour le Vatican comme pour les OIC, en effet, l’élection de Veronese est propre « à faire oublier toutes les difficultés passées et estomper (…) bien des ombres présentes », ainsi que l’exprime Larnaud[225]. L’Unesco s’engage dans plusieurs projets éducatifs en collaboration avec l’Eglise ou avec des mouvements catholiques. C’est le cas du « projet associé de radio Sutatenza », en Colombie, mené conjointement par l’Unesco et l’Accion Cultural Popular, organisation catholique dirigée par le prêtre colombien José Joaquin Salcedo, assisté d’un prêtre français envoyé comme expert de l’Unesco[226].
Les cercles catholiques avec lesquels l’Unesco se lie s’efforcent d’agir de manière efficace et discrète afin d’imposer des orientations chrétiennes à l’organisation. « Notre action doit être infiniment discrète. J’ai toujours considéré, à tort ou à raison, que ce devait être une de nos qualités dominantes à l’Unesco »[227], écrit Jean Larnaud, directeur du CCIC, à Veronese. Celui-ci est conscient de la nécessité d’« agir avec la plus grande prudence » afin de faire triompher les conceptions catholiques ; cette prudence se justifie par la conscience de « la méfiance que ces idées inspirent aux délégués des États de conceptions matérialistes »[228]. L’enquête sur les besoins éducatifs de l’Afrique tropicale menée par l’Unesco en 1959-60 souligne la place importante des missions religieuses dans le développement de l’éducation en Afrique[229]. Jean Larnaud souligne le fort soutien des catholiques au Crefal[230].
En 1954, Pierre Auger, chef du département des sciences, rédige un manuscrit intitulé L’homme microscopique, développant des réflexions philosophiques rationalistes. Il affirme que la science va peu à peu remplacer la religion. Son collègue Yvan de Hemptinne fait des remarques sur ce manuscrit. Pour Hemptinne, au contraire, « la science ne va pas remplacer Dieu mais va l’expliquer, le rendre plus compréhensible, peu à peu remplacer les dogmes de la foi par la preuve scientifique. Ils se complèteront : Dieu-science. » Ainsi Hemptinne défend la religion. Hemptinne, comme Veronese, développe une vision craintive de l’avenir liée à la crainte des changements technologiques ; il évoque « un écroulement de la civilisation à plus ou moins longue échéance »[231]. Ainsi, à l’Unesco à cette époque cohabitent esprits laïques et esprits religieux.
Les hommes du CCIC, Larnaud et Quéguiner, intensifient pendant cette période leurs efforts pour faire évoluer l’Unesco vers la religion. Ainsi, en 1953, dans Etudes, l’organe des jésuites, Quéguiner incite les catholiques à exercer « une vigilance constante » pour que l’Unesco conserve son « attitude de neutralité ouverte et bienveillante » sur les questions religieuses, et à veiller à ce que « personne n’use des moyens et du prestige de l’Organisation pour faire triompher des mouvements hostiles » au catholicisme. Il souligne que, « dans le domaine des réalisations pratiques, la collaboration des missionnaires et des organisations catholiques avec l’Unesco peut être des plus fécondes ». Il appelle les catholiques à prendre une part active à l’Unesco, « organisation qui appartient aux catholiques autant qu’à quiconque […] et qui est financée par les taxes qu’ils payent comme tous les autres » ; il s’agit pour les catholiques non pas de « monopoliser » l’Unesco à leur seul profit, mais de lui apporter « leur contribution propre »[232]. La revue Le Mois à l’Unesco, organe du CCIC, s’inscrit dans cet esprit, contenant dans chaque numéro une rubrique intitulée « Les catholiques et les objectifs de l’Unesco », évoquant les contributions apportées par Pax Romana, par radio Vatican, par des OIC, aux actions de l’Unesco[233]. Le CCIC participe acitvement au projet majeur Orient-Occident[234]. En 1960, Veronese reçoit les représentants de la JOC internationale, et ils décident de renforcer la coopération entre l’Unesco et la JOC internationale[235]. Dans ses revues et publications, l’Unesco accorde au cours de cette période une place de plus en plus importante à la religion[236].
Evans observe qu’en 1958, « il y avait un fort mouvement en faveur de l’élection d’un directeur général catholique ». Il observe que « Huxley avait été considéré par certains comme un anti-chrétien. En réalité, il ne l’était pas, mais il avait cette réptuation. Torres Bodet était mexicain et donc en théorie catholique, mais les catholiques le trouvaient insatisfaisant sur ce plan (…). Et j’étais méthodiste et ils n’aimaient pas ca. », bien que Evans avait le soutien du pape, avec qui il avait eu une longue conversation en 1953[237].
En 1956, Maheu estime : « il y a lieu de se féliciter des déclarations favorables que l’observateur du Saint Siège a faites à la conférence de l’Unesco », et « qui ont été très remarquées ». Mais en revanche, revenant d’un voyage au Pérou, il y a observé que la hiérarchie locale de l’Eglise y est « sensiblement plus réticente » que le pape à l’égard de l’Unesco, et que notamment au Pérou, les Jésuites, « dont l’influence, aux racines plusieurs fois séculaires, demeure considérable », sont hostiles à l’Unesco, qu’ils considèrent comme une concurrente[238].
Le projet Orient-Occident (1957-66) donne lieu à une collaboration importante de l’Unesco avec l’Eglise, au moyen des « entretiens sur les incidences sociales et culturelles des grandes religions d’Orient et d’Occident, organisés par des institutions religieuses. Ainsi, Pax Romana organise, avec le soutien de l’Unesco, un premier entretien dans cet esprit. Jacques Havet, dans une lettre en 1960, souligne que ce projet « ne saurait négliger les diverses religions d’Orient et d’Occident, en tant que facteurs qui agissent sur la vie culturelle de chaque peuple et dans les relations entre peuples »[239].
L’URSS s’inquiète de l’« emprise » croissante de l’Eglise catholique sur l’Unesco, comme l’exprime un article paru en 1960 dans le journal soviétique Temps Nouveaux, qui observe que « parmi le personnel, surtout en ce qui concerne les Italiens, on trouve de nombreuses personnes étroitement liées au cléricalisme ». L’article s’inquiète du récent colloque sur « l’influence des religions dans la vie moderne en Orient et en Occident » tenu en janvier 1960 aux Philippines et organisé par Pax Romana[240].
Durant ces années, l’Unesco connaît ainsi une orientation spiritualiste croissante, d’inspiration principalement chrétienne. Les autres religions comme la religion juive, le bouddhisme, l’hindouïsme et l’islam y sont beaucoup moins actives[241]. Cette quasi-absence des autres religions est liée à la place marginale qu’occupent alors les conceptions des peuples non occidentaux à l’Unesco.

La difficile intégration du Tiers Monde.

Durant les mandats d’Evans et de Veronese, il apparaît de plus en plus clairement à l’Unesco que les fondements conceptuels de son programme reposent sur une vision occidentale du monde, et que celle-ci correspond de moins en moins à la réalité. En effet, les tâches attribuées à l’Unesco lors de sa création (reconstruction des pays dévastés par la guerre, soutien à la coopération intellectuelle…) étaient liées aux besoins des pays occidentaux. Or, au fil des années, les besoins des pays dits « sous-développés » s’imposent de plus en plus clairement. Ceci entraîne alors une « dichotomie » entre deux types d’activités, due comme l’observe le gouvernement britannique aux « intérêts différents, et dans une certaine mesure opposés, des pays développés et sous-développés » : alors qu’en Europe occidentale et en Amérique du Nord, l’Unesco se consacre principalement à des tâches de coopération culturelle internationale, en Asie et en Amérique latine elle se livre à des tâches concrètes d’assistance technique[242].
Pour tenter de réduire cette dichotomie, l’Unesco s’efforce de faire plus de place dans ses conceptions à des idées et des théories extra-européennes. Evans encourage ainsi les intellectuels des pays du Tiers Monde à formuler leurs idées sur les conceptions à donner à l’Unesco[243]. Veronese quant à lui s’efforce d’intégrer davantage le Tiers Monde dans les préoccupations de l’Unesco[244].
Cependant ces efforts restent très modérés. Durant ces années, la décolonisation en cours rend délicate la position de l’Unesco à l’égard des pays du Tiers Monde. L’Unesco crée en 1951 le statut de « membres associés » à l’intention des peuples coloniaux, premier pas vers leur reconnaissance officielle, mais reste loin de s’engager à l’avant-garde du combat pour l’indépendance des colonies. L’engagement de certains de ses fonctionnaires en faveur des indépendances reste une action isolée et personnelle. Ainsi, à la conférence générale de 1954, Prévost rapporte que Chanderli, fonctionnaire du département des communications de masse, chargé des relations avec la presse, « fait sensation en disparaissant pour devenir le porte parole du FLN »[245].
L’intensification des activités de l’Unesco en Afrique intéresse et préoccupe de plus en plus les puissances coloniales. En 1955, l’intérêt du Colonial Office britannique pour l’Unesco devient ainsi de plus en plus « considérable »[246]. Il est réciproque, puisque l’Unesco, dans le cadre du fort développement de ses activités dans le Tiers Monde, s’intéresse de plus en plus aux expériences menées par les puissances coloniales dans leurs colonies, et notamment aux expériences menées par les Britanniques dans le domaine du « développement communautaire »[247].
Malgré l’émergence progressive du Tiers Monde sur la scène internationale, l’Unesco conserve pendant ces années des conceptions essentiellement occidentales. Le nouvel emblème adopté en 1954 l’illustre bien : il représente la façade du Parthénon d’Athènes, les lettrès du sigle UNESCO en guise de colonnes. Symbole de la civilisation gréco-romaine, berceau de la civilisation occidentale, cet emblème est, comme le précédent, et peut-être même plus encore, typiquement occidental. L’occidentalocentrisme est perceptible également dans l’origine géographique du personnel, au siège et sur le terrain. Ainsi, la direction des centres ou instituts à vocation culturelle universaliste créés par l’Unesco est la plupart du temps confiée à un Occidental. Par exemple l’« Institut international de psychologie de l’enfant », créé en 1955 à Bangkok, se voit attribuer pour directeur un Suisse, Ernst Boesch. Et au « Stage d’études sur le développement des bibliothèques publiques en Afrique » organisé au Nigéria en 1953 par l’Unesco, sur les 29 participants, 8 seulement appartiennent à des pays d’Afrique, les autres étant presque tous des Européens[248]. Ainsi, malgré l’augmentation des activités de l’Unesco consacrées au Tiers Monde, les conceptions n’évoluent pas vraiment à cet égard, et restent centrées sur une vision occidentale du monde. Evans souligne le fait que selon lui le virage de l’Unesco vers l’aide au développement aurait été entamé dès son mandat[249]. Veronese, en accédant au poste de directeur général, décide de mettre l’accent sur l’assistance technique[250]. Pendant cette période, les activités de recherche menées par l’Unesco tendent elles-mêmes à s’orienter de plus en plus vers les besoins des pays en voie de développement[251].
Ainsi, durant les années 1953-61, peu de conceptions nouvelles sont développées par l’Unesco. Cela s’explique en partie par le manque de convictions particulières des directeurs-généraux qui s’y sont succédés. Cette période a vu surtout une radicalisation de l’opposition entre les deux tendances apparues dans les premières années (latine et anglo-saxonne), une accentuation de l’orientation spiritualiste, et une persistance de l’occidentalocentrisme malgré l’accroissement des activités destinées au Tiers Monde. Cette réorientation des activités de l’Unesco vers le Tiers Monde est davantage impulsée de l’extérieur, en tant que le résultat de l’évolution des relations internationales et des conceptions de l’ONU, que de l’intérieur de l’Unesco. Conséquence de ce vide conceptuel, l’enthousiasme du personnel et des délégués tend à diminuer.

1.4.3. Un enthousiasme moins vif qu’auparavant.

Ces années sont celles d’une certaine désillusion au sujet des conceptions de l’Unesco[252]. La persistance des tensions internationales contribue à remettre en cause le présupposé selon lequel la guerre serait la conséquence de l’ignorance et de la méconnaissance entre peuples et individus, tandis que leur connaisance mutuelle entraînerait l’harmonie[253], et l’idée selon laquelle les communications favoriseraient la constitution d’une communauté de pensée mondiale[254]. Le caractère flou et hétéroclite des conceptions de l’Unesco apparaît de plus en plus clairement. Cette désillusion se fonde aussi sur la prise de conscience de plus en plus nette que l’Unesco ne pourra pas obtenir de véritables résultats à court terme. Comme l’exprime Jacques Havet, « puisque c’est sur l’esprit des hommes que les entreprises de l’Unesco doivent pour la plupart exercer leurs effets, le progrès ne peut se mesurer qu’à la longue ; les hommes ne peuvent pas changer d’attitudes et d’idées du jour au lendemain »[255].
Les représentants des États membres émettent ainsi de plus en plus de protestations et de critiques. Ainsi, Henri Laugier, membre français du conseil exécutif de 1952 à 1957, se singularise par sa liberté de parole et les critiques qu’il n’hésite pas à formuler contre l’orientation conformiste donnée à l’Unesco par Evans. En 1957, il quitte l’Unesco « déçu, voire découragé », estimant qu’elle est devenue un simple « organisme central de distribution de services » et qu’elle a renoncé à ses ambitions initiales[256]. De même, Carneiro, délégué du Brésil à la conférence générale, déplore « les forces d’inertie qui paralysent l’action », et qui font que l’Unesco « n’a pas atteint le seuil de son efficacité ». Il regrette qu’elle n’ait pas davantage réussi à inspirer confiance à ses États membres par la formulation de conceptions claires et convaincantes, et qu’ainsi elle se « condamne à un jeu permanent d’illusionnisme »[257]. La délégation américaine se livre à des critiques semblables[258].
Le déclin de l’enthousiasme pourrait aussi en partie s’expliquer par l’augmentation numérique du personnel, qui selon Mme Koffler a « mis fin à l’atmosphère de proximité, d’intimité, d’exaltation, des premières années » ; la « perte du contact personnel direct » entre les divers membres du personnel aurait entraîné une diminution de la bouillonnante réflexion théorique qui avait marqué les débuts, et une certaine perte de dynamisme intellectuel[259].
Cependant, ce déclin de l’enthousiasme n’est pas continu. L’inauguration en 1957 du nouveau bâtiment du Siège place de Fontenoy, bâtiment aux proportions grandioses et à l’architecture novatrice, marque une sorte de seconde naissance pour l’Organisation, inspirant de la « fierté » au personnel[260]. Et l’arrivée de Veronese à la tête de l’Unesco en 1958 semble insuffler un nouvel entrain, une nouvelle énergie, aux membres du Secrétariat. Dans ses discours, Veronese, évoque « le sang toujours plus jeune appelé à circuler dans les veines de l’être vivant que nous voulons constituer ensemble ». Usant d’une rhétorique manichéenne et reprenant le thème de la « foi », il souligne le « mérite », la « constance », l’« intelligence », le « cœur », la « foi » de l’Unesco, dans sa lutte contre « la peur, l’égoïsme et la haine »[261]. Il estime que l’Unesco a désormais dépassé le stade des « incertitudes », et atteint enfin « le stade de sa maturité »[262]. La fin des années 1950 voit aussi entrer au Secrétariat plusieurs nouveaux fonctionnaires idéalistes, liées à plusieurs réseaux : celui des communautés d’enfants[263], celui des groupes fédéralistes[264], celui des Suisses et des Belges[265], celui de l’association « Peuple et culture »[266], et celui des intellectuels ayant fui les pays communistes[267].
Ces trois éléments, à savoir l’inauguration du nouveau bâtiment du siège en 1957, l’arrivée de Veronese en 1958, et l’entrée de nouveaux fonctionnaires idéalistes, contribuent ainsi à un regain d’enthousiasme. Celui-ci se révèle pourtant passager. En effet, Veronese ne se montre pas à la hauteur des ambitions qui avaient été placées en lui. Sa dépression puis sa démission mettent fin à ce bref regain d’optimisme.
Au terme de ces années conceptuellement assez vides (1953-1961), l’Unesco s’engage au contraire à partir de sa prise en main par René Maheu en 1961 dans un important renouvellement conceptuel, qui entraîne l’avènement d’une période de rayonnement intense.

1.5. Le « règne » de Maheu (1961-1974) : l’âge d’or ?

De tous les dirigeants de l’Unesco, René Maheu apparaît incontestablement comme la plus forte personnalité. La période durant laquelle il dirige l’Unesco se révèle très féconde en nouveaux développements conceptuels. Il donne à l’organisation un nouveau souffle à la fois sur le plan des idées et sur celui de l’action.

1.5.1. René Maheu, une personnalité charismatique.

La formation d’une personnalité correspondant à l’idéal de l’Unesco, à travers un itinéraire atypique.

René Maheu, né à Saint-Gaudens en 1905, est un exemple d’ascension sociale méritocratique ; ses parents étaient instituteurs, et ses grands-parents étaient illettrés[268]. Il entre à l’Ecole Normale Supérieure où il est le condisciple de Jean-Paul Sartre. Il se caractérise alors par un esprit individualiste affirmé. Ainsi, Delavenay relate qu’au sein du « Groupe d’études socialistes des quatre ENS », Maheu, âgé d’une vingtaine d’années, se fait remarquer par une intervention intitulée « Pourquoi je suis individualiste »[269]. Simone de Beauvoir, dans ses Mémoires d’une jeune fille rangée, évoque Maheu sous le personnage de Herbaud, et écrit : « L’ascétisme chrétien lui répugnait. Il ignorait délibérément l’angoisse métaphysique. Antireligieux, anticlérical, il était aussi antinationaliste, antimilitariste. Il avait horreur de toutes les mystiques »[270]. Dans Les Mots, Sartre décrit Maheu comme un « écorché vif », rebelle à toute autorité et à tout conformisme[271]. Lecteur à l’université de Cologne de 1931 à 1933, Maheu assiste en Allemagne à la montée du fascisme. Il quitte l’Allemagne le jour de l’incendie du Reichstag, le 28 février 1933. De son propre témoignage, il a été très marqué par son observation du développement du nazisme dans la société allemande, et cela a contribué à renforcer son internationalisme et son pacifisme[272]. Son fils confirme cet élément, témoignant qu’en 1948, alors qu’il était âgé de dix-sept. ans, son père lui a dit :
« Jean, je t’envoie en Allemagne. Bien sûr pour améliorer ton allemand, mais surtout pour connaître ce pays et te lier avec des jeunes de ta génération. La nôtre a failli, elle n’a su éviter ni le nazisme, ni la guerre. L’Allemagne est aujourd’hui un monceau de ruines, matérielles et morales. Je t’y envoie en mission. Tu dois tisser des liens, des amitiés avec les jeunes allemands, pour travailler activement, avec ceux de ta génération, à la nécessaire réconciliation franco-allemande »[273].
Il enseigne ensuite au lycée français de Londres ; il fait à cette occasion connaissance avec Julian Huxley. Au moment de la Seconde Guerre Mondiale, il est professeur au Maroc, au lycée français de Rabat, puis à Fez. Dès le débarquement américain de novembre 1944, il est intégré par le journaliste résistant Paul-Louis Bret dans l’agence d’information francophone France-Afrique, puis il entre dans les services du gouvernement d’Alger ; il est attaché au cabinet civil du résident général de la France au Maroc, Gabriel Puaux puis son successeur Erick Labonne ; il y est chargé des questions de réforme de l’enseignement. Sa période passée au Maroc a orienté durablement son intérêt vers le Tiers Monde, et lui a dès cette époque fait prendre conscience de la nécessité pour ces pays d’obtenir l’indépendance, de parvenir au développement économique, et de pouvoir développer leur culture. Il se trouve alors en désaccord avec Erick Labonne sur l’orientation à donner à la politique française au Maroc. Comme il l’affirme dans une interview donnée en 1973,
« A la suite de conversations très franches [avec Labonne], nous avons constaté que nous n’étions pas d’accord. […] Labonne donnait un primat aux questions économiques. Son raisonnement était que, dans ce Maroc pays pauvre, il fallait s’attacher à découvrir des ressources et que le mieux-être qui pouvait en résulter ferait disparaître les problèmes politiques. Ainsi niait-il complètement les revendications nationalistes des Marocains. […] En 1946, je disais à Labonne : ‘Si j’étais à votre place, je demanderais au gouvernement d’annoncer l’indépendance du Maroc pour dans dix ans et, d’ici là, on préparerait les élites qui seraient appelées à prendre en main le pays.’ Le résident général n’a évidemment rien voulu entendre et nous nous sommes séparés à l’amiable »[274].
Il entre alors à l’Unesco grâce à son ancien camarade de l’ENS Jean Thomas[275].
Ainsi, le parcours de René Maheu avant son entrée à l’Unesco a été original et atypique, les diverses expériences qu’il a faites ont contribué à cimenter ses convictions, qu’il a ensuite mises au service de l’Unesco : son séjour dans l’Allemagne pré-nazie a consolidé sa certitude de l’importance de l’éducation à la paix et à la compréhension internationale ; son séjour au Maroc l’a sensibilisé à l’aspiration à l’indépendance des pays du Tiers Monde, à leur besoin de développement économique, et à leur volonté de reconnaissance culturelle.
Ses conceptions ont évolué au fil des années, entre l’époque de sa jeunesse et celle à laquelle il devient directeur général de l’Unesco. Son opposition au nationalisme et au militarisme demeure et se renforce, trouvant à s’incarner dans son culte de la paix, mais son individualisme, son anticléricalisme, sa haine de la mystique, s’atténuent, au profit de conceptions universalistes et spiritualistes[276]. Sa pensée évolue de plus en plus vers une propension à la synthèse[277].
Employé par l’Unesco dès le début de son fonctionnement en 1946, il y accomplit toute sa carrière, gravissant rapidement les échelons. C’est en 1961 qu’il accède au plus haut niveau, celui de directeur général, assurant l’interim de Veronese. L’année suivante, le conseil exécutif le désigne à l’unanimité comme candidat au poste de directeur général. Ce fait apparaît comme une « surprise » et est jugé « remarquable » et « exceptionnel » par la presse française, étant donné que plusieurs tours avaient été nécessaires pour la désignation de ses prédécesseurs[278]. Elu de manière triomphale, Maheu apparaît dès le départ comme un leader fédérateur. Cela s’explique par l’idéalisme qu’il nourrit pour l’Unesco.

Un idéalisme immense.

Lors de son entrée en fonction, Maheu exprime son « intime et indélébile fierté » d’être à la tête de l’Unesco, tâche qui, pour lui, fait « la justification d’une vie »[279]. Aucun directeur général avant lui n’avait exprimé en termes si forts la fierté de se retrouver à la tête de cette organisation. Il se donne pour but de faire reconnaître l’Unesco comme « le cœur du système des Nations Unies », estimant que « sans l’Unesco, les Nations Unies n’ont point d’âme »[280]. Il veut faire de l’Unesco une organisation plus cohérente, plus efficace, plus puissante[281]. Jean Maheu, son fils, témoigne de l’immense ambition de Maheu pour l’Unesco, une ambition qui, dit-il, allait presque « jusqu’à l’excès »[282].
Cet idéalisme de Maheu peut s’expliquer par sa vision profondément optimiste, positiviste, de l’histoire. Maheu, qui se déclare « profondément imbu d’historicisme »[283], conçoit l’histoire comme un cheminement vers le progrès. « Homme de l’espérance »[284], il voit dans l’Unesco l’« Organisation de l’espoir », et affirme que « la raison d’être de l’Unesco, c’est l’espérance »[285]. Jusqu’à la fin de sa carrière, il affirme inlassablement, dans ses discours et dans ses articles, les « convictions profondes » qu’il nourrit pour cette organisation[286], et proclame « la dimension éthique » de l’entreprise de l’Unesco, et « les multiples et vastes possibilités, encore à peine explorées, qu’elle offre à la pensée et à l’action morales »[287]. Il affirme que l’Unesco, « qui a pour mission de lutter contre les aliénations de l’homme par l’homme, doit croire à la réalité de la liberté »[288]. En 1973, il déclare que « les organisations internationales sont devenues une des caractéristiques de notre temps », et que leur importance ne cessera de croître dans l’avenir[289].
Les fonctionnaires de l’époque, et Maheu lui-même, observent l’intrication étroite entre sa propre personnalité et l’Unesco[290]. Maheu a affirmé lui-même à plusieurs reprises avoir « fusionné [s]a vie avec celle de l’organisation »[291] ; « peu à peu j’ai confondu ma vie avec la sienne, au point qu’aujourd’hui il m’est difficile de dissocier celle-là de celle-ci »[292]. Dès lors, dans les interviews, il refuse d’évoquer sa vie antérieure à son entrée à l’Unesco : « J’ai passé vingt-six ans de ma vie à l’Unesco et c’est tout ce qui compte pour moi aujourd’hui. (…) c’est de cela seulement que j’aimerais parler »[293]. Son fils, Jean Maheu, témoigne : « L’Unesco était sa vie. Ce n’était pour lui ni un poste, ni une position, ni un travail, mais un sacerdoce. Il se sentait, il se voulait consacré au monde, à travers une politique planétaire de promotion de l’humain par l’éducation, la science et la culture »[294]. Gérard Bolla affirme : « René Maheu avait un credo : il croyait intensément, je dirais même passionnément, en l’Unesco à laquelle il consacrait toutes ses pensées et des efforts de tous les moments. »[295]. Tilly Bravery évoque la « foi (…) sans limites » de Maheu en l’Unesco, et souligne « la ferveur et la ténacité que personne ni rien n’auraient pu parvenir à éteindre ou abréger »[296]. Sorin Dumitrescu souligne « sa passion pour l’Unesco »[297]. Michel Doo-Kingué affirme que « René Maheu ne vivait réellement que pour l’Unesco »[298]. Tous les témoignages concordent pour souligner son immense idéalisme envers l’Unesco[299]. Torres Bodet, dans ses Mémoires, rend hommage à l’« aspiration de justice internationale » et au « noble désir de placer les idéaux de l’Unesco au-dessus des ambitions nationalistes » qui ont caractérisé l’attitude de Maheu à l’Unesco[300].
Ses anciens collaborateurs témoignent aussi de sa grande intelligence administrative et de son dévouement total à son travail. Il est décrit par Jean Larnaud comme un « homme extrêmement intelligent », « le plus grand homme de l’Unesco », une « forte personnalité » [301], par Asher Deleon comme une « personnalité hors du commun »[302]. Huxley, dans ses Mémoires, fait également l’éloge de Maheu, « Français brillant et infatigable, profondément intéressé à chaque aspect du programme polymorphe de l’Unesco »[303]. Les diplomates britanniques observent les « dons intellectuels considérables », les « dons intellectuels typiquement français » de Maheu, et admirent son attitude d’« authentique fonctionnaire international »[304]. Jean Thomas observe qu’il a donné « le meilleur de lui-même à une institution pour y accomplir le meilleur de sa vie » ; il souligne son « ardeur », sa « patience inlassable », sa « foi » en l’Unesco, et observe : « on a rarement vu un homme s’identifier à ce point avec sa fonction »[305]. Pour Jean d’Ormesson, Maheu a, à la tête de l’Unesco, mené « une sorte de dictature morale », une « lutte épuisante », il serait « une espèce d’aventurier des temps modernes »[306]. Il convient bien sûr d’être prudent dans l’appréciation de ces éloges a posteriori de la part de ses collaborateurs.
Cependant, ces éloges ne sont pas seulement prononcés a posteriori, mais aussi sur le moment. Ainsi, en octobre 1967, les membres du conseil exécutif, réunis en séance privée pour l’élection du nouveau directeur général, observent que Maheu ne s’est jamais « abandonné à la routine » depuis cinq ans qu’il dirige l’Unesco, mais a au contraire manifesté toujours sa « liberté d’esprit »[307]. Ils ne tarissent pas d’éloges à son égard, vantant la « véritable mutation » qu’il a imprimée à l’Unesco[308], le fait que « l’extrême complexité du système des Nations Unies n’a pas de secret pour M. Maheu »[309], affirmant qu’il a été « un des plus féconds et des plus créateurs » des directeurs généraux et s’est distingué par « son humanisme et sa sollicitude pour les peuples en détresse »[310], et enfin qu’il est « une grande figure intellectuelle, culturelle et humaine »[311]. Tous s’accordent pour le réélire, ce qui est le signe de sa grande popularité[312]. C’est alors la première fois qu’un directeur général de l’Unesco est réélu. C’est même la première fois qu’un directeur général ne démissionne pas avant la fin théorique de son mandat.
Si Maheu quitte l’Unesco en 1974, renonçant à briguer un troisième mandat, ce n’est qu’à regret, se sachant condamné à court terme par la maladie. À son départ, le conseil exécutif lui rend hommage, soulignant dans une résolution « sa conception clairvoyante de la mission de [l’Unesco], sa perception aiguë des problèmes du monde contemporain, son humanisme dynamique », « son inlassable dévouement aux grandes causes de l’humanité », les « progrès considérables » qu’il a fait faire à l’Unesco, et le « rayonnement sans précédent » qu’il lui a donné[313]. De même, l’association du personnel crée alors le « prix René Maheu de la fonction publique internationale »[314]. Durant les quelques mois qui lui restent à vivre après son départ de l’Unesco, Maheu se consacre à écrire des articles pour la presse, dans lesquels il affirme, à propos des problèmes politiques et sociaux du monde d’alors, son indéfectible foi en les Nations Unies pour faire face aux conflits qui déchirent les hommes et pour faire évoluer la société dans un sens meilleur[315]. Il s’éteint en 1975. René Maheu, « homme de foi, dont la religion était l’humain »[316], comme l’affirme son fils Jean Maheu, a véritablement confondu sa vie avec celle de l’Unesco. Son enthousiasme idéaliste pour cette organisation s’est durant ses deux mandats transmis aux membres du personnel et des délégations.

Un enthousiasme qui se transmet au personnel et aux délégués.

Maheu transmet son idéalisme, son énergie, son dévouement, son enthousiasme pour l’Unesco au personnel et aux délégués. La période de Maheu apparaît dans la mémoire collective des contemporains comme l’âge d’or de l’Unesco. C’est une période qui, par l’enthousiasme et l’espoir qu’elle a véhiculés, rappelle la période de sa création, mais qui, par le pouvoir et l’envergure que l’Unesco a alors acquis, par la capacité de réalisations concrètes qu’elle a atteint, fait d’elle une institution beaucoup plus crédible que ce qu’elle était à ses débuts. Son nouvel objectif de porter assistance au Tiers Monde lui confère une mission urgente, concrète, et d’importance[317].
Cette idée d’ « âge d’or » est très nette dans les esprits des fonctionnaires de l’époque, qui témoignent de leur idéalisme et de leur attachement affectif pour l’Unesco pendant les années 1968-74[318]. Ils évoquent la « réussite surprenante »[319], la « période riche » [320], « l’âge d’or »[321], le « summum de l’Unesco »[322], l’époque « où le prestige de l'Unesco culminait »[323] , l’époque où « l’organisation était à son zénith » et avait gagné « une réputation excellente »[324] ; une époque « passionnante »[325], pendant laquelle le personnel était plein d’idéalisme[326] ; l’Unesco de cette période est comparée à une « ruche bourdonnante de projets et d’espoirs », et Maheu est considéré comme « le directeur général de tous les espoirs, qui incarne l’Unesco de la réusssite »[327]. Henry Cassirer est représentatif de cet idéalisme ; dans son ouvrage intitulé Un siècle de combat pour un monde humaniste, il souligne qu’il ne s’est « jamais senti un homme d’appareil », mais que son engagement à l’Unesco a « été toujours été orienté envers les gens que nous étions censés servir »[328]. Evans, en 1966, exprime sa confiance : « je vois un très grand avenir pour l’Unesco », dit-il, convaincu que l’Unesco va apporter « une contribution de plus en plus grande » dans le monde[329].
Maheu apparaît incontestablement comme un modèle pour ses fonctionnaires, sa présence à la tête de l’organisation entraîne une véritable émulation. John Fobes souligne le « grand respect » que Maheu, « véritable Unesquien », inspirait à son personnel et aux délégués[330]. Zacharie Zachariev témoigne que dans ces années, l’Unesco avait pour ses fonctionnaires la dimension d’une « religion », d’une « foi », y travailler donnait l’impression d’appartenir à « une grande confrérie internationale »[331]. Nino Chiappano observe que dans les années 1960, de nombreux fonctionnaires se dévouaient à l’Unesco comme s’ils étaient « entrés en religion »[332]. Acher Deleon témoigne que durant ces années, « un poste à la place de Fontenoy s’apparentait à une mission honorable, à vocation morale. Un apparatchik unescain se sentait imprégné d’un esprit de mission. Semblable de nos jours à Médecins du monde. Plus qu’une organisation, l’Unesco était pour ses nombreux et fervents adeptes, ainsi que pour ses employés […] une idéologie »[333]. Jacques Tocatlian confirme la « très forte impression » que Maheu exerçait sur lui et sur l’ensemble du personnel. Il témoigne qu’il apparaissait comme « le De gaulle de l’Unesco », et qu’il a incontestablement transmis à ses fonctionnaires l’idée de la grandeur de l’Unesco[334]. Jacques Boisson, évoquant son état d’esprit lorsqu’il est entré dans l’organisation en 1968, se décrit comme « profondément et terriblement convaincu […] qu’il pourrait servir l’idéal des Nations Unies dans cette enceinte mondiale ». Outre Maheu, il évoque un autre personnage qui a nourri et entretenu sa foi en l’Unesco : Alvin Laidley, chef du Bureau du personnel, chargé du recrutement et de la formation des stagiaires. Laidley a joué un rôle important de transmission de l’idéal de l’Unesco aux jeunes recrues, leur transmettant une « conviction » et une « impression d’appartenance » dont Jacques Boisson souligne la « force » et la « portée »[335]. Anne Grinda, également passionnée par l’idéal de l’Unesco[336], évoque elle aussi le rôle important de Laidley, qui a été un de ses « pères spirituels » à l’Unesco : « il vouait un véritable culte au Manuel dont il nous détaillait les plus beaux passages, la voix vibrant d'une émotion mal contenue »[337].
Ainsi, cette émulation du personnel est suscitée par Maheu et est relayée par des hauts fonctionnaires, tel Laidley. On peut citer aussi Yvan de Hemptinne, directeur de division au secteur des sciences, très pénétré de la grandeur de la mission de l’Unesco, qui accomplit son travail avec un réel idéalisme, un grand dévouement[338]. De même, Sandy Koffler, rédacteur en chef du Courrier de l’Unesco, est alors animé d’une grande conscience professionnelle, d’un immense idéalisme. Il soude son équipe autour d’un esprit de dévouement à la cause de l’Unesco ; il règne dans cette équipe une « véritable fièvre de travail, frénétique »[339]. Akihiro Chiba, entré à l’Unesco en 1961, rédige des poèmes sur l’Unesco[340]. En outre, la présence au Secrétariat durant ces années d’hommes et de femmes réputés pour leurs convictions humanistes, comme Martin Ennals, futur fondateur d’Amnesty International, contribue aussi à cette atmosphère d’idéalisme[341].
Il faut nuancer ces témoignages, car les déclarations idéalistes faites par les anciens fonctionaires a posteriori participent d’une auto-valorisation. Cependant, les correspondances confidentielles de l’époque expriment elles aussi ce jugement[342]. Un autre élément révélateur est que beaucoup de fonctionnaires de l’époque de Maheu, après avoir pris, comme ils y sont obligés, leur retraite à soixante ans, reviennent à l’Unesco, pour y effectuer des missions ponctuelles[343], ou pour y travailler bénévolement[344], ou simplement viennent « hanter les couloirs » comme le dit Pauline Koffler[345].
Cet idéalisme caractérise non seulement le personnel, mais aussi de nombreux délégués à la conférence générale et au conseil exécutif et représentants d’organismes liés à l’Unesco. Ainsi, à la conférence générale de 1972, Pablo Neruda déclare avoir « foncièrement foi » en « notre Unesco », « qui persiste dans ses nobles desseins », exalte son « combat pour que survive ce qu’il y a de meilleur dans le monde » et affirme que « ses efforts et ses réalisations témoignent de la portée géographique et morale de son action »[346]. La même année, la délégation américaine, dans son rapport au département d’état, fait l’éloge de l’« idéal » de l’Unesco, qui consiste à « créer, par la coopération dans le domaine de l’intellect, une communauté internationale d’hommes libres »[347]. Jean Larnaud, directeur du CCIC, observe que pendant la période de Maheu « l’Unesco a mobilisé des valeurs extraordinaires au point de vue humain. Elle a su créer un réservoir extraordinaire de compétences, faire converger des espoirs et des énergies intellectuelles d’une grande richesse »[348].
Cette impression d’ « âge d’or », cette atmosphère d’idéalisme et de renouveau, ne sont pas dues seulement au charisme de Maheu, mais ont un fondement objectif : elles correspondent à une véritable mutation conceptuelle de l’Unesco vers les besoins du Tiers Monde, qui confère à l’organisation une importance nettement accrue sur la scène internationale.

1.5.2. Une nouvelle priorité : le Tiers Monde.

Entre 1958 et 1962, les conceptions de l’Unesco évoluent nettement vers une priorité qui s’impose de plus en plus : l’aide au Tiers Monde. Cet important tournant correspond à une évolution de la situation géopolitique mondiale, liée à la décolonisation[349]. Cela constitue selon Philip Jones le plus grand changement conceptuel qu’ait connu l’Unesco[350]. Le Monde rend hommage en 1974 à la « vision volontariste de l’hisoire » de Maheu et affirme que c’est « l’un des hommes qui auront le mieux su prendre la mesure de l’émergence du Tiers Monde»[351].

Une mutation impulsée par des influences extérieures : l’ONU, les États-Unis, les pays nouvellement indépendants.

L’afro-asiatisme, mouvement de solidarité visant à réunir les anciens pays colonisés d’Afrique et d’Asie autour de la condamnation du colonialisme et de la revendication d’une assistance technique et économique, né à la conférence de Delhi en 1949, développé à la conférence asiatique de Colombo en 1954, puis consacré à celle de Bandoung en avril 1955, se développe avec de plus en plus vigueur à partir de la seconde moitié des années 1950[352]. Après la conférence de Bandoung, l’ONU s’engage en faveur du développement[353], créant en 1958 à cet effet le « Fonds spécial », qui sert à financer des projets consacrés au développement[354]. Dès décembre 1960, l’assemblée générale de l’ONU vote une déclaration exigeant l’octroi de l’indépendance aux peuples colonisés, et cela lui procure une grande popularité auprès des pays du Tiers Monde, qui fondent sur elle de grands espoirs[355]. À partir de 1960 l’assemblée générale est gouvernée systématiquement par une majorité tiers-mondiste[356]. L’engagement de l’ONU en faveur des pays nouvellement décolonisés constitue un très grand succès politique pour elle[357].
L’Unesco connaît une évolution analogue. Entre 1960 et 1962, une vingtaine de pays africains y adhèrent. Cela entraîne un net changement dans la composition de la conférence générale et du conseil exécutif ; ces institutions deviennent une tribune d’expression des revendications économiques et culturelles des États du Tiers Monde. Sous la pression des États nouvellement indépendants, mais aussi des États-Unis et de l’ONU, l’orientation des programmes de l’Unesco se modifie. Sur le plan géographique, son action se porte de plus en plus vers le Tiers Monde, et sur le plan thématique vers des activités d’assistance technique et de formation des cadres de l’éducation[358]. Cette orientation vers l’assistance technique avait été prônée dès les années 1950 par les principaux États du Tiers-Monde alors présents à l’Unesco, principalement l’Inde et l’Egypte[359]. Mais c’est à partir de 1960 que l’Unesco s’engage réellement dans une action pour le développement[360]. En réponse au discours du président Kennedy du 25 septembre 1961, prônant le développement comme « entreprise de coopération et non de compétition »[361], l’ONU lance la Décennie du Développement (1961-70), dont l’objectif est d’aider les pays du Tiers Monde à atteindre, en dix ans, un taux minimum de croissance de 5% de leur PNB[362]. En tant qu’agence spécialisée de l’ONU, l’Unesco participe à cette Décennie du Développement, et cela l’amène à réorienter entièrement ses conceptions directrices autour de cet objectif. John Fobes, alors directeur général adjoint, souligne l’importance de l’évolution conceptuelle opérée par l’Unesco au sujet de l’action opérationnelle au début des années 1960[363]. Certains leaders du Tiers Monde ont joué un rôle important dans cette évolution, par leurs discours à la conférence générale et au conseil exécutif, en particulier Amadou Hampaté Ba[364] et Bernard Dadie[365]. Philip Jones souligne que cette évolution était en fait davantage dictée par l’ONU que ce que Maheu ne voulait bien le reconnaitre[366]. Cependant, s’il est impulsé de l’extérieur, ce virage de l’Unesco n’est pas pour autant une évolution imposée et plaquée artificiellement. Il donne lieu à une importante évolution conceptuelle opérée de l’intérieur, la plus importante de toute l’histoire de l’Unesco.

Une évolution conceptuelle radicale.

Alors que cette évolution aurait pu être laborieuse et entraîner une crise d’identité pour l’organisation, elle s’effectue avec brio et succès, grâce à l’action de René Maheu et de Malcom Adiseshiah[367]. Ce dernier, économiste indien, supervise à partir de la fin des années 1950 la mise en place des programmes d’action opérationnelle[368]. Maheu, lui, saisit, dès le début de son mandat, que l’Unesco se trouve à un « tournant » majeur de son histoire et qu’il est très important de lui faire réussir la « mutation » qui s’amorce[369].
Cette mutation est d’autant plus frappante qu’elle est accomplie en un temps très court[370]. La conférence générale de 1960, qui, pour la première fois, est dominée numériquement par les pays du Tiers Monde[371], demeure dans les mémoires des anciens fonctionnaires, comme la « conférence de l’Afrique »[372]. Il y est voté la création d’un fonds spécial d’aide à l’Afrique, pour la mise en oeuvre d’un programme d’urgence axé sur la scolarisation[373]. Le CCIC souligne, dans son rapport confidentiel sur la conférence générale de 1960, « la place qu’a tenue l’Afrique dans cette conférence » :
« Les activités visant l’Afrique sont celles qui ont fait l’objet du plus grand nombre de changements par rapport au programme initial préparé par le Secrétariat. On se réjouira certes d’une telle orientation. Mais dans cet intérêt porté à l’Afrique, notamment par les nations les plus puissantes, on discerne des intentions qui ne sont pas toujours parfaitement désintéressées : on a senti dans les débats sur l’Afrique une certaine surenchère de générosité qui laissait une impression mélangée. » [374]
En 1962, l’Unesco décide de consacrer désormais à l’action opérationnelle 50% de ses ressources[375]. En 1966, l’action opérationnelle représente les deux-tiers des ressources de l’Unesco[376]. Cette évolution se poursuit tout au long des deux mandats de Maheu. Pour Maheu en effet, le développement constitue « la question dominante de notre époque, car il pose en termes de plus en plus dramatiques le problème de l’organisation de la collectivité humaine sur la terre »[377]. Cela justifie donc selon lui que l’Unesco se consacre de manière prioritaire à cette question.
Les États du Tiers Monde se montrent ravis de ce tournant opérationnel. Ainsi, à la conférence générale de 1962, Berredo Carneiro insiste sur l’importance primordiale de l’action opérationnelle, et se réjouit que l’Unesco devienne « un instrument de plus en plus efficace d’intervention et de réalisation sur le terrain »[378].
Ce tournant opérationnel est également vivement soutenu par les États-Unis : le président Johnson lui-même affirme : « L’Unesco a un rôle majeur à jouer en apportant les techniques éducatives du monde développé aux nations nouvellement émergentes de la famille de l’homme »[379]. Benton, porte-parole de la position du gouvernement américain, affirme que ce « virage à 180° » constitue un élément très positif, et conteste l’idée avancée par certains Français selon laquelle cette expansion quantitative du programme de l’Unesco aurait pour corollaire un déclin qualitatif[380]. Les membres du Congrès américain approuvent chaleureusement eux aussi cette évolution, car ils l’attribuent à l’influence du discours du président Kennedy[381].
Le Royaume-Uni se montre lui aussi favorable à ce que l’Unesco « donne un haut degré de priorité au développement ». Il estime néanmoins que celle-ci ne doit pas négliger pour autant son rôle de « catalyseur et de centre d’information et d’échanges pour le monde intellectuel »[382].
Les autres États européens, et en particulier la France, sans remettre en question le bien fondé de ce tournant opérationnel, s’attachent surtout à défendre le maintien de l’orientation intellectuelle et éthique de l’Unesco[383]. Ils redoutent le risque d’une fracture entre « pays développés donateurs d’une part, et pays en voie de développement bénéficiaires d’autre part »[384]. Le Conseil de l’Europe s’inquiète du fait que les États européens contribuent pour une forte part au budget de l’Unesco mais en bénéficient de moins en moins[385]. La France craint que l’Unesco ne néglige sa mission de « coopération scientifique et culturelle internationale »[386], et que le grand essor pris par les activités opérationnelles ne « romp[e] l’harmonie entre les divers objectifs fixés par la Charte de l’Unesco »[387]. Henri Laugier et Louis François se font les porte-parole de cette conception[388]. De même, l’Italie affirme la nécessité de définir « la culture comme source première et but final de toute l’activité de l’Unesco, et partant, comme aliment et animation de chaque partie de son programme »[389].
Ainsi, ce changement d’orientation ne s’est pas opéré sans résistances. Comme l’observe Louis Dollot, il a entraîné « une grave crise de conscience » au sein de l’Unesco[390]. La nouvelle orientation entraîne des résistances importantes du clan « latin », au sein du Secrétariat, de la conférence générale, et du conseil exécutif, au nom de l’idée que l’Unesco serait ainsi en train de « trahir sa mission originelle de poursuite des grands objectifs de paix et de compréhension internationale, pour devenir progressivement une agence internationale de secours pour les démunis culturels »[391]. Des inquiétudes se font jour, fondées sur l’idée que ce tournant vers l’action opérationnelle au service du développement signifierait un appauvrissement du contenu conceptuel de l’Unesco, celle-ci risquant de devenir simplement une agence d’aide au développement parmi d’autres[392]. Si la plupart des États adhèrent à l’orientation de l’Unesco vers l’aide au Tiers Monde, un désaccord subsiste entre les États qui souhaitent voir l’Unesco devenir une véritable agence opérationnelle, organisant et réalisant elle-même des actions concrètes pour le développement (c’est bien sûr le cas des États du Tiers Monde), et ceux, comme les États-Unis, qui estiment qu’elle doit se limiter dans ce domaine à un rôle d’encouragement, d’incitation, se cantonner à une fonction de « catalyseur, de stimulateur et d’initiateur »[393]. Maheu défend cette idée, affirmant en 1973 qu’elle est « une organisation non pas d’aide mais de coopération », « une organisation non pas d’intervention mais de stimulation »[394].
Malgré les résistances, ce tournant s’accomplit dans la première moitié des années 1960, grâce à l’habileté diplomatique de Maheu. Il se poursuit et s’accentue dans les années suivantes. La fin des années 1960 et le début des années 1970 correspondent à une régionalisation croissante du programme. Elle se traduit notamment par la création d’un grand nombre de centres et d’instituts régionaux. L’Unesco tend de plus en plus à fractionner son programme pour l’adapter aux différentes régions du monde. Dans les pays du Tiers Monde, l’action opérationnelle s’intensifie beaucoup, dans le cadre de la coopération Unesco-PNUD[395]. Cette évolution vers la régionalisation et vers l’action opérationnelle est fortement soutenue par les États-Unis[396] ; elle n’obtient pas une approbation aussi nette de la part des pays européens, notamment de la France. En 1969, Jean Fernand Laurent, dans un rapport confidentiel au ministre des affaires étrangères, déplore :
« De plus en plus, la conférence générale, au lieu de voter pour des hommes, vote pour des pays. [...] les représentants du Tiers Monde, qui composent la majorité du Conseil, s’avèrent beaucoup plus soucieux des intérêts régionaux et locaux que de la vocation universelle de l’Unesco : le vent de régionalisation que nous avons dénoncé à la tribune de la conférence générale souffle de plus en plus fort ». « Les vieux membres latino-américains du conseil […] sans doute dans l’espoir de drainer davantage encore vers leur continent l’assistance technique de l’Unesco, se font chaque fois les chefs de la brigade de la flagornerie. »[397]
Les Français craignent en effet dans ce virage vers l’action opérationnelle et vers la régionalisation du programme le risque d’une perte de substance des conceptions de l’Unesco.
Cependant, cette concentration sur l’impératif de développement n’implique pas pour autant l’abandon de l’aspect culturel de sa mission. Au contraire, avec l’idée de « développement culturel », l’Unesco développe une conception du développement dans laquelle la culture est considérée comme l’un des facteurs du développement économique.
Pour être élu directeur général en 1962, Maheu fait la paix avec son rival Malcom Adishesiah, car celui-ci était très bien vu des pays du Tiers Monde, pour lesquels il était, comme le dit Evans, « Monsieur Aide aux États Membres et Monsieur Assistance Technique », et qui avait fait du « travail brillant » dans ce domaine[398].
Evans se montre sceptique sur l’opportunité de la démarche de Maheu, qui prend le parti des pays receveurs, contre les pays riches[399]. En 1965, Benton préconise une révision de la constitution de l’Unesco, étant donné que l’action de l’Unesco correspond de moins en moins au contenu de l’acte constitutif[400]. Les États-Unis sont réticents sur l’orientation vers le développement que Maheu veut donner à l’Unesco, mais Maheu, avec habileté, réussit à manoeuvrer[401].
En 1967, dans une conférence à l’université de Bordeaux, Maheu parle avec passion du problème du sous-développement, et recommande aux jeunes « de réserver au début de leur carrière […] deux ou trois années de leur vie à un séjour dans les pays en voie de développement »[402].
Pour Maheu, l’idée de la coopération intellectuelle internationale, qui a été l’idée centrale dans les débuts de l’Unesco, « procède de l’âge d’or de la civilisation européenne classique » ; il estime qu’il faut désormais élargir les perspectives à l’ensemble du monde[403].

Le « développement culturel » : la culture, facteur du développement économique.

Dans les années 1960, l’Unesco promeut l’idée que la culture constitue un facteur important du développement économique s’impose à l’Unesco, sous l’impulsion à la fois de Maheu, de l’ONU, et des pays africains.
Pour l’Unesco, il apparaît avantageux de développer une telle conception. En effet, dans les années 1960, le thème du développement devient l’un des thèmes les plus porteurs. Dans ce contexte, chaque agence spécialisée s’efforce de se présenter, chacune dans son domaine, comme oeuvrant au développement, en mettant l’accent chacune sur le fait que son propre domaine de compétence constitue un facteur du développement : le travail dans le cas du BIT, la santé dans le cas de l’OMS, l’agriculture dans le cas de la FAO, l’éducation et la culture dans le cas de l’Unesco[404]. Maheu saisit rapidement l’avantage que l’Unesco peut retirer à promouvoir l’idée que la culture constitue un facteur important du développement : cela implique en effet pour l’Unesco l’attribution d’un rôle majeur dans le processus de développement du Tiers Monde. Maheu contribue ainsi à promouvoir l’idée du « développement culturel », conçu comme le complément nécessaire au développement économique : afin d’équilibrer les transferts technologiques qui se font des pays occidentaux vers les pays du Tiers Monde sans que ceux-ci puissent vraiment s’approprier les apports scientifiques, il prône « un humanisme scientifique qui permette l’acculturation de la technologie » dans ces pays[405].
La conception de « développement culturel » promue par Maheu se fonde sur une évolution conceptuelle opérée autour de 1960 par de nombreux économistes. Vers cette date, les économistes reconnaissent de plus en plus que l’éducation, la science, la culture, sont d’authentiques facteurs du développement économique. Cette évolution conceptuelle est également redevable aux orientations adoptées par l’ONU à partir de la fin des années 1950, sous l’influence de Julia Henderson, et avec l’aide du conseil économique et social[406]. Un signe révélateur en est la création par la Banque mondiale d’un département de l’éducation[407]. Les progammes de l’Unesco étant définis dans la mesure où ils peuvent être financés par la Banque mondiale et le FMI, les conceptions directrices de l’Unesco se sont trouvées naturellement influencées par cette nouvelle orientation. Maheu et des fonctionnaires de l’Unesco ont eu le mérite de saisir rapidement l’intérêt stratégique que ces nouvelles orientations représentaient pour l’Unesco, lui donnant la possibilité de recevoir des financements largement accrus et de développer une action d’une envergure beaucoup plus vaste[408]. La Banque mondiale, l’Association internationale du développement, la Banque interaméricaine de développement, le PNUD, fournissent à l’Unesco des financements nouveaux et très supérieurs à ce dont l’Unesco disposait jusqu’alors[409]. En 1963, Maheu se réjouit de ce « remarquable succès » remporté par l’Unesco auprès de ces organismes internationaux d’investissement, désormais convaincus de « la valeur économique de l’éducation comme investissement »[410].
Le développement croissant de cette conception correspond aussi aux revendications des pays africains. Alors que, dans un premier temps, celles-ci avaient porté essentiellement sur l’aide matérielle, à partir du milieu des années 1960 elles s’étendent progressivement à l’aspect culturel. Si l’éducation, l’aide au développement, les transferts de technologie, et les communications de masse restent leurs domaines de revendication prioritaires[411], à partir de 1968 ces pays s’engagent de plus en plus nettement dans le combat pour la reconnaissance de leurs identités culturelles. Ils expriment le « sentiment de danger immédiat » qu’ils ressentent pour leur culture, perçue comme fragile, à cause de l’absence d’écriture et du morcellement linguistique[412]. « En Afrique, un vieillard qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle », affirme Amadou Hampaté Bâ, représentant du Mali à la conférence générale et au conseil exécutif, intellectuel et écrivain autodidacte, fervent défenseur de la culture africaine[413]. Dans ses multiples interventions à cette tribune que constituent la conférence générale et le conseil exécutif, Hampaté Bâ milite inlassablement en faveur du développement culturel[414]. En 1974, l’élection du Sénégalais M’Bow au poste de directeur général représente une victoire symbolique pour les revendications culturelles de l’Afrique : pour la première fois, ce n’est pas un représentant du monde culturel occidental qui est à la tête de l’Unesco, mais un homme issu du continent africain et très attaché à son identité culturelle africaine.
L’Unesco ne se contente pas de tirer profit de cette nouvelle orientation conceptuelle qui favorise son importance sur la scène internationale. Elle développe aussi des réflexions approfondies sur ces thèmes. Ainsi, Jacques Berque rédige en 1969 pour l’Unesco un rapport sur l’idée que le développement est « endogène », c’est-à-dire qu’il s’effectue en grande partie à partir des aspects culturels[415]. En outre, Maheu développe des réflexions communes avec les futurs fondateurs du Club de Rome ; ils se font les précurseurs de l’idée de « développement durable »[416]. À la fin des années 1960 et au début des années 1970, l’Unesco développe des réflexions sur les thèmes du « droit à la culture », du « développement culturel », des « politiques culturelles », et sur la défense des identités culturelles, réflexions qui se traduisent par des publications[417], et par une « Déclaration sur les droits culturels en tant que droits de l’homme », en 1970[418].
La promotion de cette notion de « développement culturel », qui associe autour de l’impératif de développement l’aspect opérationnel et l’aspect intellectuel, illustre bien l’effort constant de Maheu de concilier des tendances à première vue opposées. L’effort et la capacité de synthèse de Maheu constituent un des ses apports les plus importants.

1.5.3. Des centres d’intérêt diversifiés.

A sa mort, la presse française célèbre Maheu pour le fait qu’il ait eu « la prescience des grandes pulsations qui s’apprêtent à soulever la planète. Avant d’autres, il avait fait sienne la hantise d’une mise à sac de la terre par les pollutions et le gaspillage des ressources naturelles. Il avait prévu la nouvelle montée des violences et entendu gronder la révolte des jeunes »[419]. En effet, Maheu développe des centres d’intérêt diversifiés, originaux, et précurseurs.
Maheu préconise que l’Unesco se préoccupe davantage de l’environnement. Sous son mandat, l’action de l’Unesco dans le domaine de l’environnement augmente beaucoup. En 1972, à la conférence des Nations Unies sur l’environnement à Stockholm, il prône « la réconciliation et l’intégration de la nature et de la culture »[420]. Cette orientation recueille l’approbation du gouvernement américain[421].
A l’époque où Auger dirige le département des sciences, Maheu et lui ne s’entendent pas. Maheu et Auger sont des personnages opposés, comme l’observe Michel Batisse : « Ils étaient pourtant tous les deux français, tous les deux normaliens, l’un comme l’autre de vaste culture et de grande curiosité, […] mais l’un était scientifique et l’autre littéraire. Il y avait de ce fait entre eux comme un fossé intellectuel. Auger disait de Maheu : ‘il ne connaît rien à la science, et il en a peur’ »[422]. Pourtant, la science a constitué un important centre d’intérêt de Maheu.
La Conférence des Nations Unies sur la science et la technique appliquées au développement à Genève en 1962 révèle que les États accordent une grande importance à la science. Cela incite Maheu à donner une forte impulsion à la science dans le cadre de l’Unesco ; il realise une mutation du secteur des sciences, avec l’aide de Victor Kovda, directeur de ce secteur, et d’Alexis Matveyev, sous-directeur de ce secteur. Il élargit, diversifie, approfondit l’action scientifique de l’Unesco : recherches sur les ressources naturelles, océanographie, formation et recherche universitaire dans les sciences fondamentales et les sciences de l’ingénieur, politique scientifique, éducation technique, éducation scientifique, étude et mise en valeur des milieux naturels, enseignement des sciences, formation et recherche technologiques appliquées au développement [423].
Prévost souligne la méfiance de Maheu devant les programmes scientifiques de l’Unesco : dans les réunions où les fonctionnaires du secteur des sciences expliquent à Maheu les programmes, « il demandait nombre d’explications, hésitait à trancher, demandait un supplément d’information, comme s’il avait soupçonné les scientifiques de vouloir tirer parti du fait qu’il avait, lui, une formation littéraire, pour l’amener à accepter les yeux fermés des activités médiocres ou sans intérêt ». Maheu était notamment très soucieux de ne pas se laisser influencer, dans la mise en place du programme scientifique de l’Unesco, par le CIUS[424]. De même, Dumitrescu souligne que « René Maheu était conscient du rôle de la science dans le monde contemporain » et qu’il « n’etait pas homme à se laisser forcer la main » dans l’élaboration des programmes scientifiques ; « il a démontré par son action qu’il avait bien compris les défis actuels de la société dans le domaine des sciences »[425]. Batisse souligne la grande implication de Maheu dans le programme MAB[426].
Le secteur des sciences, remodelé, est de plus en plus efficace pendant les années 1960, comme l’observe le gouvernement américain, qui souligne en particulier l’efficacité de Victor Kovda[427].

1.5.4. Un constant effort de synthèse.

Durant ses deux mandats, Maheu s’efforce inlassablement de concilier les tendances opposées qui ont divisé l’Unesco depuis sa création sans jamais pouvoir être résolues ; il s’attache à opérer une synthèse entre l’idée de mission opérationnelle, pratique, et celle de mission intellectuelle ; entre la conception universaliste et la conception multiculturaliste ; entre le caractère non-confessionnel de l’Unesco et son spiritualisme croissant. Par là, il vise à réconcilier les Anglo-saxons avec les « Latins », les ressortissants du sud et ceux du nord, et les athées avec les chrétiens.
Maheu a contribué à une clarification de la conception et de la formulation du programme. C’est ce qu’observe la délégation américaine en 1965, estimant que le programme est désormais « mieux conçu, plus resserré, que dans les années précédentes »[428] ; cette opinion se renforce chez la délégation américaine dans les années suivantes[429].

Faire de l’Unesco à la fois une « agence opérationnelle » et un « forum de réflexion ».

Le dilemme entre action opérationnelle et action intellectuelle avait déchiré l’Unesco depuis sa création. Maheu s’efforce de le résoudre par la synthèse.

L’idée d’une interpénétration entre action théorique et action pratique.
Maheu veut donner deux facettes à la mission de l’Unesco : théorique et pratique. D’une part, il veut en accroître de manière importante le budget, pour en faire une agence opérationnelle, capable de mener des actions concrètes et de grande ampleur dans le Tiers Monde[430] ; d’autre part, il veut en faire un grand « forum » international de réflexion sur tous les grands problèmes éducatifs, scientifiques et culturels du monde contemporain[431] ; il s’agit pour lui en cela d’opérer un « retour aux sources » de la mission intellectuelle de l’Unesco. Il s’efforce de lui donner une double mission, à la fois théorique et pratique. Ainsi, « ancrée sur les bases concrètes de la coopération intellectuelle, d’une part, et de l’aide au développement d’autre part », l’Unesco pourra selon lui acquérir enfin le poids qu’elle mérite, ne plus être « dans les nuages », mais bien inscrite « dans le monde, dans l’histoire », et par là enfin accomplir « sa vocation », c’est-à-dire devenir « la grande force spirituelle que ses fondateurs avaient rêvé qu’elle soit », tout en gardant « les pieds sur terre »[432].
Par rapport avec Adiseshiah qui prône une orientation complète de l’Unesco vers l’aide au développement, Maheu adopte une position plus nuancée, soulignant l’importance de l’interaction entre la théorie et la pratique[433]. Alors que l’Unesco s’oriente de plus en plus nettement vers l’action opérationnelle, il maintient avec fermeté qu’elle ne doit surtout pas renoncer à sa mission de « promouvoir le progrès de l’esprit », en « stimul[ant] et organis[ant] à travers le monde, dans le cadre des différentes disciplines, le rassemblement et l’analyse des connaissances, la confrontation des expériences et des idées, la recherche en commun des interprétations explicatives »[434]. Maheu s’efforce ainsi de faire jouer à l’Unesco un « rôle d’équilibrage », c’est-à-dire qu’il oppose une certaine résistance aux revendications des pays en voie de développement, afin d’éviter que les ressources de l’organisation ne soient entièrement mobilisées par l’aide au Tiers Monde au détriment de la réflexion intellectuelle[435]. « Pour l’Unesco, l’action technique et l’action éthique s’interpénètrent indissolublement, et l’Unesco n’existe que par cette interpénétration », déclare-t-il[436].
Maheu s’efforce de mettre l’éducation à contribution pour faire cette synthèse. L’éducation constitue pour Maheu l’un des piliers de la mission de l’Unesco[437]. Lui-même se revendique comme un authentique « éducateur » : « Je ne suis qu’éducateur ! Professeur, issu d’une famille tout entière d’instituteurs, je n’ai connu, pendant la plus grande partie de ma vie, pas autre chose que l’éducation, et son austère et noble sacerdoce », déclare-t-il en 1962[438]. C’est ce qu’il affirme à beaucoup de gens, en particulier à William Carr : « je suis un enseignant de vocation. J’étais enseignant avant de devenir directeur général de l’Unesco et quand je travaille avec des enseignants je travaille avec mes collègues »[439].
Les fonctionnaires de l’Unesco, comme Maheu, s’efforcent de développer l’idée d’une synthèse entre action théorique et action pratique. Ainsi, Hemptinne écrit qu’ « il n’y a aucune oposition enre les activités de coopération intellectuelle et méthodologique d’une part (c’est la conception originelle de l’Unesco, dérivée de l’IICI) et d’autre part les activités dites opérationnelles effectuées sur le terrain au service d’États membres individuels et à leur demande. Bien au contraire ! Ces deux formes de l’action de l’Unesco se sont renforcées et enrichies mutuellement »[440].
A la fin de la période, Maheu réplique aux critiques qui affirment que la nouvelle orientation de l’Unesco constituerait une déviation par rapport à sa mission naturelle ; en 1973, il affirme que bien que les deux tiers des ressources de l’organisation aillent désormais à l’aide au développement, « nous sommes une organisation non pas d’aide mais de coopération et nous devons le rester » ; « nous sommes une organisation non pas d’intervention mais de stimulation » ; « si nous donnons la priorité à l’aide au développement, ce n’est pas vraiment par vocation mais parce que, du point de vue à la fois de la morale et du réalisme, corriger la situation historique présente est l’indispensable condition à une coopération efficace et juste »[441]. En 1976, dans l’article sur René Maheu dans l’Encyclopedia Universalis, Jean Thomas évoque le fait qu’« on lui a parfois reproché de négliger, en faveur des actions opérationnelles, les devoirs de l’Unesco envers la coopération intellectuelle »[442].

Une insistance sur la mission intellectuelle et philosophique de l’Unesco.
Maheu défend l’idée, abandonnée depuis 1947, de développer une philosophie spécifique de l’Unesco[443]. Proclamant que « la vocation de l’Unesco n’est pas utilitaire, mais éthique », que « les objectifs de l’Unesco sont essentiellement moraux », il estime que l’Unesco doit obéir à une philosophie de la paix, fondée sur la croyance au libre-arbitre : « l’Unesco est fondée sur la croyance qu’en définitive c’est la liberté de l’homme qui décide de l’histoire, qui choisit notamment entre la paix et la guerre »[444].
Étant donné que les années 1960 voient un net accroissement de l’action pratique, Maheu se consacre principalement, dans sa tentative de « rééquilibrage », à promouvoir l’action intellectuelle et philosophique. En 1962, à un colloque de l’Unesco sur Rousseau, il affirme :
« L’Unesco est d’abord et avant tout une organisation vouée aux échanges d’idées et aux confrontations intellectuelles, mais, quelquefois, ses activités en matière d’assistance aux États membres tendent à devenir de plus en plus pratiques et semblent prendre le pas […] sur la coopération intellectuelle. En réalité, si son action au plan des échanges culturels est moins spectaculaire, elle reste sa vocation essentielle et même, je voudrais dire que l'œuvre qu’elle accomplit dans le domaine du développement n’a de sens que dans la mesure où celui-ci répond à cette vocation. […] Si l’Unesco se bornait à fournir des services d’experts […] dans les domaines de sa compétence, elle ne serait pas à la hauteur des ambitions de ses créateurs »[445].
Cela correspond aux vœux des pays « latins », et notamment du gouvernement français, qui, en 1965, souhaite une extension des activités de l’Unesco dans le domaine de la culture, domaine auquel « la France accorde un grand prix », et qui craint une diminution des activités dans ce domaine, à cause de la « nouvelle orientation » de l’Unesco. Le gouvernement français déplore que « le rôle de l’Unesco comme agent d’exécution des divers organismes des Nations Unis dispensateurs de fonds tend à orienter de plus en plus l’organisation vers les activités d’ordre ‘opérationnel’ et de ce fait à modifier la substance même de son propre programme » ; il craint « qu’absorbé par les tâches adminsitratives très lourdes qu’entraînent pour lui les activités dites « opérationnelles », le Secrétariat n’y consacre le meilleur de lui-même et ne renonce […] aux initiatives qu’on attendait de lui dans les domaines où l’action qualitative et la réflexion doivent prévaloir »[446]. Comme l’exprime le diplomate français Jean Fernand Laurent en 1970, les représentants de la France à la conférence générale et au conseil exécutif, « n’ont cessé de soutenir que l’Unesco […] ne devait pas négliger pour autant sa vocation première, héritée de l’Institut international de coopération intellectuelle », à savoir « être un centre international de reflexion et de coopération intellectuelle »[447]. Il en va de même pour l’Italie : ainsi, en 1965, la commission nationale italienne affirme que la culture doit être et rester « source première et but final de toute l’activité de l’Unesco », et s’affirme opposée à la tendance à « diminuer le poids concret et la place précise que les activités culturelles ont au sein de l’Unesco ». Elle estime cependant que l’Unesco doit « éviter la définition d’un complexe doctrinaire qui sort des buts de l’Unesco et est exposé […] au péril de déviations ou préférences idéologiques »[448].
Dans cet esprit, Maheu crée en 1966 une division de la philosophie, à la tête de laquelle il nomme la philosophe suisse Jeanne Herrsch[449]. Maheu s’efforce de donner à l’Unesco un net caractère intellectuel par la composition du personnel du Secrétariat. Sous son influence, l’Unesco accueille dans les années 1960 un nombre accru d’intellectuels[450], de scientifiques et d’artistes, comme, outre Jeanne Herrsch, le philosophe libanais René Habachi, de tendance spiritualiste et personnaliste[451], le poète et peintre argentin Eduardo Jonquières[452], Frank Malina, scientifique américain inventeur des premières fusées spatiales, et peintre novateur, pionnier dans le domaine de l’art cinétique, auteur de réflexions sur les interactions entre art, science et technologie[453], Bergeaud[454] ; le conseil exécutif accueille des grandes figures comme Indira Gandhi[455], Amadou Hampâté Bâ[456], le poète chilien Pablo Neruda[457] ; le sociologue britannique Richard Hoggart, directeur du secteur des sciences sociales, des sciencs humaines et de la culture[458] ; Roger Caillois est directeur de la division de la diffusion internationale de la culture[459]. En outre, des scientifiques comme Paul Lazarsfeld[460] et des intellectuels comme Robert Escarpit[461] sont régulièrement associés à l’action de l’Unesco ; le violoniste Yehudi Menhuin est dans ces années président du Conseil international de la Musique. L’Américaine D’Arcy Hayman, qui travaillait dans ces années dans le département des arts, dit avoir été amenée, par son travail à l’Unesco, à travailler avec des célébrités comme Picasso, Miro, Vasarely, Chagall, Giacometti, Jean Arp, Jean Lurçat, Max Ernst, Jean-Louis Barrault, Yehudi Menhuin, Samuel Beckett, André Maurois, Jean Cocteau, Jorge Luis Borges, etc.[462]
Malgré cette insistance mise par Maheu sur la mission intellectuelle et philosophique de l’Unesco, cependant en pratique, au fil de ses deux mandats, l’activité culturelle et intellectuelle de l’Unesco diminue en fait au profit de l’action opérationnelle[463].
La conception de Maheu de la mission intellectuelle de l’Unesco n’est pas limitée aux humanités et à l’éducation. Elle s’élargit jusqu’à comporter une dimension idéologique ; l’ambition de Maheu est de faire de l’Unesco un important forum de réflexion sur les problèmes politiques, sociaux, économiques, du temps présent.


La volonté de faire de l’Unesco un important forum de réflexion sur les problèmes politiques, sociaux, économiques, du temps présent.
Maheu annonce ses ambitions en la matière de façon très médiatique, en août 1963 dans Le Monde et le Sunday Times. Il y affirme sa volonté d’opérer « une réorientation radicale » de l’action de l’Unesco et « un retour aux idéaux de base qui ont présidé à sa création »[464], en faisant prendre à l’Unesco « une part plus active aux grands débats qui préoccupent actuellement les hommes », notamment à trois questions brûlantes : le racisme, la « post-décolonisation », et le désarmement[465].
En choisissant ces trois orientations, Maheu s’éloigne à dessein des problématiques philosophiques qui avaient caractérisé les premières réflexions de l’Unesco, et engage résolument l’organisation dans les problèmes politiques et sociaux de l’époque. Il s’agit pour lui de « faire de l’Unesco la grande force de persuasion qui rendra les forces de dissuasion totalement inutiles»[466]. Maheu souhaite que l’Unesco mène dans ces trois domaines des « études objectives », afin de « dépassionner » ces questions controversées. Dans le domaine du désarmement, il propose que l’Unesco réfléchisse au « passage d’une économie d’armement à une économie de désarmement », à « la conversion d’une civilisation armée à une civilisation sans armement ». Il attribue à l’Unesco la mission de « proposer une affectation et une répartition à travers les nations des crédits libérés par l’arrêt des expériences nucléaires et de l’armement » : il estime que ces crédits devraient être consacrés en premier lieu à la lutte contre l’analphabétisme, puis à l’éducation, à la culture, à la science et à l’aide aux pays en voie de développement[467].
Si l’intérêt pour ces trois questions n’est en fait pas quelque chose d’absolument nouveau de la part de l’Unesco, puisque le racisme avait fait l’objet d’un programme en sciences sociales depuis 1947 et que l’Unesco avait commencé à prendre en compte le phénomène de la décolonisation dans les années 1950, cependant ces domaines n’avaient jamais été considérés comme prioritaires[468]. Ces thèmes de réflexion sont hautement polémiques. Leur traitement par l’Unesco est soutenu par l’URSS, au nom du fait que ces questions sont « essentielles à la paix »[469], et est combattu par les États-Unis, qui estiment qu’elles sont d’ordre politique et donc outrepassent la compétence de l’Unesco[470].
Maheu affirme que l’Unesco doit constituer une véritable ‘force de persuasion’ » par son action éthique[471]. En revanche, l’Unesco n’est alors pas exempte de contradictions avec la volonté d’être progressiste, puisqu’en 1965 elle accueille, dans le cadre du congrès international de la police, Maurice Papon[472].
Si par ses ambitions éthiques, Maheu ravive le conflit idéologique entre bloc est et bloc ouest, en revanche par ses efforts de synthèse entre action opérationnelle et action philosophique il contribue à apaiser le conflit idéologique entre clan latin et clan anglo-saxon.

Un relatif apaisement idéologique entre clan latin et clan anglo-saxon.
L’entreprise de synthèse qu’entreprend Maheu entre l’aspect théorique et l’aspect pratique de la mission de l’Unesco ne correspond pas seulement à ses convictions personnelles, mais aussi à la nécessité de concilier les positions des États membres, afin de mettre fin à la longue opposition entre États anglo-saxons et États latins.
Il s’emploie d’une part à désamorcer les craintes et les résistances des représentants des États « latins » à l’égard du développement de l’action opérationnelle. Ce n’est pas sans difficultés qu’il réussit à imposer cette transformation de l’Unesco en une « agence opérationnelle à grande échelle »[473], en « un instrument de décolonisation culturelle »[474]. Le gouvernement français en effet redoute une orientation croissante et quasi-exclusive de l’Unesco vers l’action opérationnelle, qui ne correspondrait pas selon elle à sa mission initiale, intellectuelle. Maheu, conscient de ces « perplexités » et de ces « inquiétudes », s’efforce de les apaiser[475]. Il affirme qu’ « il y a encore certains malentendus, voire certains désaccords, sur l’interprétation à donner du sens de cette action opérationnelle ». Il compare l’Unesco à un être vivant dans son « adolescence » et il s’adresse aux fondateurs de l’Unesco, ses « parents », inquiets de cette adolescence. Il déclare que « la mutation dont il s’agit est une mutation par addition, par adjonction, par épanouissement », et qu’elle n’implique en aucun cas « un renoncement ou une diminution »[476].
D’autre part, il s’efforce de persuader les représentants des États anglo-saxons de la nécessité de donner à l’action intellectuelle et philosophique une place importante à l’Unesco[477]. Il se heurte en effet en la matière à la désapprobation de ces États, qui, au conseil exécutif, s’emploient à modérer les ambitions de Maheu, étant réticents à voir l’Unesco accroître sensiblement son budget et traiter des thèmes politiquement sensibles comme le racisme, le désarmement et la décolonisation[478]. Les correspondances confidentielles du département d’État et du Foreign Office témoignent de la vive inquiétude qu’y provoquent les ambitions de Maheu, jugées démesurées[479]. Il y parvient néanmoins, réussissant à la conférence générale de 1968 à obtenir l’accord des États anglo-saxons sur l’idée de la mission culturelle de l’Unesco[480].
Les efforts de synthèse et d’apaisement de Maheu se révèlent donc fructueux, et conduisent en quelques années à un relatif apaisement entre le clan latin et le clan anglo-saxon. En 1963, l’Américain Benton lui-même insiste, dans une lettre confidentielle à son gouvernement, sur l’importance de la « culture » à côté des deux autres « piliers » que sont l’éducation et la science, et sur le statut de l’Unesco d’« héritier de l’IICI »[481]. Ainsi, une position qui était traditionnellement celle du clan latin est désormais défendue par des Américains. Quant au Français Jean Thomas, il s’affirme, dans son ouvrage UNESCO, opposé à l’idée d’une d’une mission exclusivement théorique pour l’Unesco[482]. Français et Américains font ainsi chacun un pas vers un rapprochement.
Cet apaisement n’est pas uniquement redevable à Maheu, mais aussi aux présidents Kennedy et Johnson, dont l’attitude, favorable à l’Unesco, tranche avec celle des présidents précédents. Peu avant son assassinat, Kennedy aurait dit à Maheu, en visite à la Maison Blanche : « Dites moi ce que vous voulez que les États-Unis fassent pour l’Unesco. Je veux une Unesco forte. Comment pouvons-nous y contribuer ? » Et Maheu aurait quitté Kennedy « reconnaissant » et confiant[483]. Johnson se montre lui aussi favorable aux idéaux de l’Unesco, exprimant des idées très proches de ceux-ci dans son discours devant la Smithsonian Institution en 1963[484]. Cependant cet apaisement n’est pas total. Durant le second mandat de Maheu, les États-Unis s’inquiètent de l’influence française « considérable » sur les conceptions de l’Unesco[485]. En effet, au fil des années, l’influence de Maheu et de la langue française contribuent à entraîner une forte augmentation numérique des Français au sein du Secrétariat, au détriment des anglophones. En 1968, le personnel français de l’Unesco dépasse de près du double le quota de Français théoriquement autorisé[486]. S’il ne disparaît pas complètement, néanmoins, entre 1961 et 1974, le clivage entre clan latin et clan anglo-saxon devient beaucoup moins marqué.
Maheu réussit le difficile défi d’opérer cette véritable mutation de l’Unesco caractérisée par un développement massif de l’action opérationnelle, tout en évitant que l’organisation ne bascule complètement dans cette tâche et n’abandonne sa vocation intellectuelle, philosophique, et idéologique initiale. Il parvient donc à opérer une évolution radicale dans la définition des attributions de l’Unesco, sans lui faire perdre pour autant son identité. D’autre part, il s’emploie à concilier universalisme et multiculturalisme.


Concilier universalisme et multiculturalisme.

Maheu développe une synthèse entre universalisme et communautarisme principalement à travers ses discours, sa correspondance, et l’ouvrage La civilisation de l’universel, publié en 1966. Sa pensée se fonde d’une part sur la nécessité de mettre en place une civilisation mondiale unique, et d’autre part sur l’impératif de préserver et de promouvoir les identités culturelles.

L’idéal universaliste d’une civilisation mondiale unique.
Maheu estime que « l’humanité est en marche vers une civilisation planétaire », et que « les organisations internationales sont seules capables d’offrir aux échanges culturels le cadre universel qui leur donne leur signification la plus authentique » : par leur façon d’aborder les problèmes sous l’angle de l’universel, les organisations internationales seraient en « concordance avec le sens de l’évolution générale de notre civilisation ». Ce serait, de toutes les organisations internationales, à l’Unesco en particulier qu’il reviendrait d’élaborer ce cadre universel : l’Unesco doit « contribuer, avec honnêteté et lucidité, à dégager entre tous les hommes un ensemble de références mentales, cadre de leur compréhension mutuelle, et la communauté d’un ensemble d’aspirations et de motivations, cadre de leur solidarité active ». Maheu prône ainsi la mise en place par l’Unesco de « la civilisation de l’universel »[487]. Selon cette conception, malgré la diversité de ses manifestations, la culture possèderait des fondements et des références communes. Cette unité fondamentale serait même devenue de plus en plus apparente du fait des progrès technologiques qui ont accéléré et intensifié les communications et les échanges culturels à travers le monde[488]. En janvier 1974, dans une émission de radio sur France Culture, Maheu affirme : « s’agissant de culture, ce que je ressens comme ‘ma famille’, c’est l’humanité entière »[489].
Cette pensée universaliste reçoit en particulier le soutien de la France. À la conférence générale de 1966, De Gaulle souligne dans son discours l’universalisme de l’Unesco : il affirme que l’Unesco a « pour raison d’être de servir l’unité humaine », de faire ressortir le « caractère universel de la pensée », « l’unité […] mondiale […] à l’échelle de l’humanité »[490]. Il se prononce clairement pour une conception universaliste de la mission de l’Unesco. Cette pensée recoit aussi le soutien d’intellectuels indiens, tel Prem Kirpal, qui estime que « la vision d’une société planétaire est signe d’un progrès considérable de la conscience humaine et l’avènement d’un ordre mondial, porteur de promesses et d’espoirs sans précédent »[491].
Au fil des années, Maheu insiste de plus en plus sur la nécessité selon lui d’élaborer une « idéologie commune » sur les grands problèmes du monde[492], de « réorganiser la planète » sur la base du « mondialisme » culturel, tâche qu’il conçoit comme une « entreprise de justice »[493].
Selon Jones, le raisonnement de Maheu était en fait « souvent obscur ». Jones observe que Maheu utilise sans arrêt, sans le définir clairement, le terme « universalité », car c’était « un terme à la charge émotionnelle très forte », et que c’était surtout « une abstraction commode » destinée à galvaniser l’enthousiasme des États membres. Selon Jones, le concept de « l’universalité » de Maheu est inspiré de l’existentialisme de son ami Sartre, et est différent du concept de la « culture mondiale unique » de Huxley. Pour Huxley, la réalisation de la culture mondiale unique serait le couronnement d’un effort de longue haleine, le résultat d’un lent processus d’évolution. Pour Maheu au contraire, le monde serait déjà uni, il ne s’agirait pour les hommes, et pour l’Unesco, que d’y découvrir ce qui est universel. Maheu tenait beaucoup à préciser que son universalisme ne pourrait en rien être assimilé à une uniformisation[494].
Cependant, cette insistance sur l’unité de la culture va de pair avec une grande attention prêtée à la diversité des identités culturelles.

L’impératif de préserver et de promouvoir les identités culturelles.
Cette « civilisation de l’universel » n’implique en aucun cas pour Maheu l’imposition d’une pensée unique ; au contraire, la diversité doit y régner, puisque ce serait « une civilisation où chacun peut développer sa qualité d’homme sans que l’affirmation de soi-même s’obtienne aux dépens de la reconnaissance et de la compréhension des autres » ; « un état de relations humaines, tant sociales que personnelles, où, sans que disparaisse la distinction des uns et des autres et leur diversité concrète, ces relations sont pensées, organisées, et vues du point de vue de l’appartenance commune à l’unité essentielle » ; pour Maheu, « avec la multiplication des centres de civilisation et l’intensification de leur solidarité et de leurs intercommunications, le monde évolue en ce sens et par sa nature il a accru les possibilités d’action de l’Unesco »[495]. Maheu s’efforce ainsi de réaliser une conciliation entre universalisme et multiculturalisme[496]. La Déclaration des principes de la coopération culturelle de 1966 est emblématique de cette volonté : « dans leur variété féconde, leur diversité et l’influence réciproque qu’elles exercent les unes sur les autres, toutes les cultures font partie du patrimoine commun de l’humanité »[497].
Le développement de cette conception de la part de l’Unesco s’explique par le succès accru que rencontre dans les années 1960 la notion d’« identité culturelle », conçue comme un principe de cohésion réunissant un ensemble de valeurs, de croyances, de traditions et d’aspirations, (fondées sur la religion, l’histoire, la langue, les institutions politiques et sociales, le système juridique, la mythologie) intériorisé par un groupe et lui permettant de se distinguer des autres, de se reconnaître et d’être reconnu[498]. Le succès de cette notion est dû principalement à l’influence de trois courants : le courant multiculturaliste, qui, s’inscrivant en opposition à l’évolutionnisme culturel, considère que toutes les cultures se valent et que chaque élément culturel ne doit être considéré qu’en rapport avec la culture dont il fait partie [499] ; le courant de critique de la société de consommation[500], qui observe l’uniformisation culturelle qu’entraîne la société de consommation de masse, étant donnée l’imposition au monde entier des modes de pensée et de vie occidentaux, notamment américains[501] ; et le courant tiers-mondiste, qui dénonce l’écrasement des cultures des peuples du Tiers Monde par les cultures des peuples dominants[502].
Le tiers-mondisme[503], qui séduit nombre d’intellectuels occidentaux à partir des années 1960[504], dénonce la « misère spirituelle, culturelle et matérielle » à laquelle la colonisation a réduit les peuples du Tiers Monde[505]. Ainsi, pour Jean Ziegler[506], la façon dont les Occidentaux se comportent à l’égard de ces peuples correspond à un « système de violence symbolique »[507]. Philippe Decraene déplore le fait que « pour les Occidentaux en général et plus largement pour l’ensemble des non-Africains, le continent noir ne suscite guère d’intérêt réel »[508]. René Dumont et Marie-France Mottin dénoncent la domination culturelle de l’Occident sur les pays d’Afrique. « Nous [les Occidentaux] l’avons trop facilement persuadé [l’Africain] qu’il était incapable d’élaborer son modèle de développement adapté à son milieu, sa situation économique, ses traditions, ses valeurs »[509]. P.-A.Taguieff expose les risques de l’universalisme, qui, poussé à l’extrême, prône le « métissage planétaire ». « Ne s’expose-t-on pas à déshumaniser l’humanité en voulant à tout prix l’unifier [par] l’imposition à tous les peuples d’un modèle de civilisation unique, dérivé de certains traits de la civilisation occidentale ? »[510].
Dans ce cadre de (et souvent en avance sur) ces courants de pensée, l’Unesco se livre à partir des années 1960 à la promotion de l’identité culturelle. La Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale[511], adoptée en juillet 1966, témoigne de ce souci. Elle insiste sur le fait que la coopération internationale doit respecter l’originalité de chaque culture : « Toute culture a une dignité et une valeur qui doivent être respectées et sauvegardées. Tout peuple a le droit et le devoir de développer sa culture »[512]. « La coopération culturelle est un droit et un devoir pour tous les peuples et toutes les nations, qui doivent partager leur savoir et leurs connaissances ». La coopération culturelle internationale doit s’exercer « dans un large esprit de réciprocité » et « au bénéfice mutuel de toutes les nations qui la pratiquent », doit « mettre en relief les idées et les valeurs qui sont de nature à créer un climat d’amitié et de paix, (...) exclure toute marque d’hostilité dans les attitudes et dans l’expression des opinions », et contribuer à éviter les « tensions qui viendraient à se produire dans les relations internationales » [513].
Au fil des années, sous l’impulsion de Maheu, l’Unesco se dirige de plus en plus dans le sens de la protection des identités culturelles. Ainsi, dans une lettre à Jacques Berque en 1969, Maheu écrit :
« Mon humanisme théorique et pratique répudie complètement le développement unilinéaire et repose sur la pluralité des cultures tout autant que sur la pluridimensionalité de l’homme authentique. […] Je crois qu’une civilisation mondiale unique n’est ni possible, ni même désirable. […] Cessons d’opposer […] le non-occidental à l’occidental et cessons d’identifier l’homme occidental à l’unidimensionnel. […] Il faut partout sauver la pluridimensionalité de l’homme en réconciliant la pluralité (horizontale) des cultures et la diversité (verticale) de toute culture avec l’universalité de la science. »[514]
En 1973, dans La culture dans le monde contemporain. Problèmes et perspectives, Maheu observe avec satisfaction le « pluralisme culturel et spirituel » qui s’affirme dans le monde, et qui constitue selon lui « un facteur positif d’équilibre autant que de fécondité créatrice ». Il se félicite de « la tendance à la multiplication des centres et des modèles culturels à l’intérieur d’un système planétaire de communications et d’échanges de plus en plus dense ». Il prône la défense des cultures minoritaires : « Toute culture vivante a le droit d’être préservée pour qu’elle puisse réaliser toutes ses potentialités humaines [...] toute culture qui dépérit entraîne [...] un appauvrissement de la réalité humaine »[515]. Il voit comme « un facteur favorable [...] le retour aux sources dans les pays ayant récemment accédé à l’indépendance », puisque cela signifie une reviviscence des valeurs culturelles[516]. Cette orientation vers la promotion des identités culturelles recueille l’approbation des États-Unis[517].
Face aux difficultés de certains États membres à comprendre la conception synthétique de Maheu, celui-ci s’efforce de la clarifier. Dans une interview en 1973, il explique :
« On fait souvent un contresens sur le titre de mon livre et je dois admettre qu’il est assez ambigu. La civilisation de l’universel n’est aucunement, pour moi, une civilisation universelle. L’universel est une dimension de l’existence, une catégorie de la pensée : cela signifie que ce que l’on pense et ce que l’on fait, on le pense et on le fait du point de vue de la valeur universelle que cela peut avoir. Mais cela reste inscrit dans une réalité concrète qui, elle, est toujours spécifique, singulière. Une civilisation universelle serait une civilisation uniforme qui vivrait d’approximations. Qu’il y ait aujourd’hui une telle tendance, c’est un fait : le cosmopolitisme des mœurs, des slogans entraîne l’uniformisation des pensées et des comportements. L’Unesco est contre cela : nous pensons que les cultures doivent être connues et respectées dans leur spécificité. Outre le fait que nous sommes une organisation internationale et non pas supranationale - nous n’imposons pas nos vues aux États et d’ailleurs nous n’avons ni vocation ni autorité pour le faire -, dans notre programme et notre philosophie nous parlons toujours du point de vue de la diversité des cultures » « Nous sommes une organisation qui s’efforce d’établir l’harmonie et la compréhension entre les peuples en se basant sur le respect de leur diversité et non pas en promouvant une manière de vivre identique. » [518]
Maheu développe donc une conception à mi-chemin entre universalisme et multiculturalisme. Il engage l’Unesco dans la promotion des identités culturelles, tout en prenant soin de ne pas tomber dans le communautarisme. Cela lui permet de fédérer les différentes opinions sur la question. Le rapprochement croissant qu’il opère avec l’Eglise s’inscrit également dans cette volonté fédératrice.
A partir de 1960, l’Unesco tend de plus en plus à préserver les cultures des pays du Tiers Monde et à « faire ressortir l’originalité de leur personnalité culturelle »[519]. Le mouvement de défense des identités culturelles se développe beaucoup à partir des années 1960, s’inscrivant contre l’ethnocentrisme[520]. Cette affirmation croissante des identités culturelles s’explique par le constat (ou l’impression) d’une grave érosion des cultures, sous l’effet de la mondialisation, de l’uniformisation, de l’imposition au monde entier des modes de vie et de pensée occidentaux. Beaucoup de minorités et de pays en développement ont donc recours à une revendication de leur identité culturelle par réflexe de protection[521]. Certains en revanche estiment que l’érosion des cultures serait un phénomène dont la gravité a été abusivement exagérée. Ainsi Albert Salon écrit : « Il semble que la référence, quasi exclusive et envahissante, à la colonisation ait troublé bien des esprits qui ont insuffisamment réfléchi d’une part sur les nombreux exemples d’acculturation dans l’histoire, et d’autre part sur la multiplication actuelle et future des occasions d’acculturation »[522]. De même, Jean-Pierre Warnier souligne « l’extraordinaire capacité des cultures à résister à l’érosion ». « Faut-il regretter l’érosion des cultures de la tradition et déplorer la situation présente ? Gardons-nous d’idéaliser le passé. L’immense majorité de nos contemporains, tous pays confondus, aurait sans doute les plus grandes difficultés à supporter l’emprise que les sociétés de la tradition exercent sur chaque sujet, ainsi que les conditions de vie qui étaient les leurs »[523]. L’érosion des cultures singulières est donc un phénomène dont l’ampleur est difficile à mesurer et qui, de ce fait, divise l’opinion.
Pour plusieurs observateurs, tel Alain Finkielkraut[524], la mission de protection des identités culturelles que s’est donnée l’Unesco constituerait un renversement de ses conceptions, une perversion de ses idéaux . Il analyse les contradictions auxquelles aurait selon lui abouti l’Unesco, en voulant protéger les « identités culturelles » : « le vocable de culture sert d’étendard humaniste à la division de l’humanité en entités collectives, insurmontables et irréductibles »[525]. « On ne peut célébrer simultanément la communication universelle et la différence dans ce qu’elle a d’intransmissible ». « Ne parler de culture qu’au pluriel, c’est refuser aux hommes d’époques diverses ou de civilisations éloignées la possibilité de communiquer autour de significations pensables et de valeurs qui s’exhaussent du périmètre où elles ont surgi »[526]. De même, Sélim Abou observe que la revendication multiculturelle, poussée à l’extrême, « débouche sur la fermeture aux autres au nom d’une authenticité vue comme un retour aux sources »[527]. Poussé à l’extrême, le relativisme culturel aboutit à une remise en cause la légitimité de la Déclaration universelle des droits de l’homme, considérée comme le produit de la culture occidentale[528]. Sélim Abou évoque « les confusions intellectuelles et affectives » que ces questions entraînent : les Occidentaux, anciens colonisateurs, tombent dans l’extrême inverse de l’ethnocentrisme, par mauvaise conscience. Cette mauvaise conscience s’exprime clairement dans les ouvrages des tiers-mondistes français : ainsi, dans L’Afrique étranglée, René Dumont écrit : « De cette effroyable misère, nous sommes les premiers responsables, nous les pays développés. [...] Des hypocrites, voilà ce que nous sommes »[529]. Les Occidentaux comme les peuples du Tiers Monde éprouvent selon Sélim Abou un malaise à propos de leur identité. Pour Sélim Abou, « en absolutisant les différences culturelles, les intellectuels occidentaux d’aujourd’hui visent inconsciemment à venger leur civilisation bafouée. [...] Le respect déclaré des différences culturelles se traduit par l’indifférence à l’égard des autres cultures, il trahit une nouvelle forme d’ethnocentrisme, marquée par le mépris. [...] Cette attitude ethnocentriste au second degré est plus pernicieuse que celle d’autrefois »[530]. A partir des années 1970, la question multiculturelle suscite des débats passionnés, des polémiques[531].
Alain Finkielkraut analyse le processus qui a conduit plusieurs peuples nouvellement indépendants du Tiers Monde de l’affirmation de leur identité culturelle à une négation de la liberté de l’individu. Pour cet auteur, l’installation de régimes non démocratiques dans plusieurs de ces pays serait liée à la revendication de l’identité culturelle. Il observe aussi que paradoxalement, la revendication de l’identité culturelle finit par légitimer une certaine forme de racisme[532]. De même, René Gallissot observe que la notion d’« identité culturelle » « sert aussi à perpétuer un différentialisme qui n’est pas loin de l’idée de race, et peut supporter tous les nationalismes, xénophobies et ethnocentrismes »[533]. C’est aussi derrière le concept d’ « ethnicité », dont Marco Martiniello souligne « le caractère ambigu, insaisissable et équivoque »[534], que se camoufle le racisme. Pierre-André Taguieff observe que le racisme est « imbriqué dans [...] l’ethnisme ». « il est une formation de compromis entre des pulsions d’hostilité et le respect de la norme antiraciste, intériorisée par l’effet de l’éducation »[535].
Malgré ces controverses, l’Unesco opère un virage réussi vers la préservation et la promotion des identités culturelles.

Rapprocher l’Unesco de l’Eglise tout en maintenant son caractère non confessionnel.

Dans les années 1960, un rapprochement croissant s’opère entre l’Unesco et l’Eglise, dû à la fois aux efforts de Maheu, du Saint-Siège, et de la communauté catholique. Maheu est, de toute la période étudiée, le directeur général le plus engagé dans le rapprochement des catholiques avec l’Unesco[536]. D’athée, il est devenu agnostique, adhérant à « l’eschatologisme participatif chrétien » de Teilhard de Chardin[537].
Ce rapprochement peut se saisir avec netteté sur le plan chronologique. Dans son discours d’entrée en fonction, en novembre 1962, Maheu declare : « un de mes prédecesseurs, au moment, comme je le suis, de prêter serment à l’Organisation, demanda la permission de la conférence générale d’élever jusquà son Dieu une courte prière. Quant à moi, à qui de pareils recours demeurent fermés, et pour qui toute la grâce est dans l’histoire de l’Homme, c’est à une communion de foi dans l’avenir de l’Homme que je vous invite à procéder avec moi ». Il évoque la maxime de Teilhard de Chardin : « Tout ce qui monte converge »[538]. En décembre 1962, dans La Croix, le Père Russo, conseiller ecclésiastique et membre du CCIC, signe un important article très élogieux sur l’Unesco. Il souligne la nécessité selon lui pour l’Unesco de développer des conceptions qui impliquent « une communion plus profonde dans des valeurs spirituelles », et de s’associer plus étroitement avec des organisations internationales catholiques, afin de mieux prendre en considération « toutes les composantes intellectuelles et spirituelles » des peuples[539]. Cela constitue un geste important de l’Eglise en direction de l’Unesco. L’année suivante, en 1963, le pape Jean XXIII, dans l’encyclique Pacem in Terris, affirme une véritable proximité de vues entre l’Eglise et l’Unesco. Cette encyclique est reçue avec beaucoup de faveur par Maheu[540], qui s’affirme « fermement convaincu que l’Unesco est appelée à être une grande force spirituelle »[541]. En juin 1963, Maheu fait une déclaration à l’occasion de la mort de Jean XXIII, et souligne que celui-ci s’est, en tant qu’observateur permanent du Saint Siège auprès de l’Unesco, « appliqu[é] à déceler et à montrer, avec autant de probité que de clairvoyance, la solidarité des œuvres qu’une même vocation de paix inspira aux deux institutions différentes certes de nature, mais l’une comme l’autre consacrée à la promotion de l’esprit dans le monde »[542].
Bertoli, le nonce apostolique en France, œuvre activement à ce rapprochement. En 1960, dans un discours intitulé « Le Saint Siège et l’essor des organisations internationales », il affirme la volonté de l’Eglise d’œuvrer au développement de l’Unesco ; il souligne la « singulière coïncidence » entre l’idéal de l’Unesco et celui de l’Eglise : « Comment l’Eglise pourrait-elle ne pas adhérer aux fins que nous trouvons inscrites dans les préambules des chartes de ces institutions : bien du genre humain, élévation de l’homme, amélioration matérielle et spirituelle de sa condition, recherche d’une meilleure compréhension mutuelle entre les peuples, collaboration étroite pour de grandes entreprises culturelles, scientifiques, techniques, économiques et sociales ? ». Il affime qu’à côté des raisons « doctrinales », il y a aussi des raisons « pratiques » qui concourent à amener l’Eglise à collaborer avec les organisations internationales : en effet, l’Eglise assure « un grand nombre de tâches ayant un aspect temporel, dans l’accomplissement desquelles elle rencontre nécessairement les organisations internationales ». Il affirme que l’Unesco, la FAO et l’OMS, « dont l’expérience est parfois encore assez limitée, semblent pouvoir trouver dans ces contacts [avec les missionnaires catholiques] un enrichissement précieux, bénéficiant de la sagesse séculaire de l’Eglise et apprenant en même temps à mieux la connaître »[543].
Benelli, observateur du Saint Siège auprès de l’Unesco, fait un discours au congrès de Téhéran sur l’élimination de l’analphabétisme organisé par l’Unesco en 1964, soutenant le projet de l’Unesco de campagne d’alphabétisation, et faisant l’éloge de l’idéal de l’Unesco qui consiste à « organiser un monde où la justice règnerait et d’où seraient exclus l’égoïsme, la peur et le besoin, promouvoir une société où la solitude foncière de l’homme serait équilibrée par une communication aussi large que possible des biens matériels et surtout des richesses de l’esprit » ; il souligne « l’heureuse convergence de cet idéal de l’Unesco avec l’idéal même d’une société chrétienne »[544]. Le pape Paul VI lui-même soutient le projet de l’Unesco de campagne d’alphabétisation[545]. En 1964, le nonce Bertoli affirme, à la conférence générale, que c’est « très directement qu’elle [l’Eglise] entend appuyer l’œuvre de l’Unesco » ; « nous attachons un grand intérêt au travail de l’Unesco ». Mais il affirme la position de l’Eglise, qui est que l’Unesco ne peut « répondre à elle seule à ttes les aspirations de la personne humaine ». Il souligne aussi « l’expérience séculaire » de l’Eglise en matière d’alphabétisation, qui fait selon lui de l’Eglise le guide naturel de l’Unesco dans sa campagne d’alphabétisation[546].
En 1964, Berredo Carneiro se rend en mission à Rome pour représenter l’Unesco au couronnement du pape Paul VI. Celui-ci lui remet à cette occasion la Grand Croix de l’Ordre de Saint-Sylvestre[547]. En 1966, des conférences sont organisées à l’Unesco sur le thème « Une rencontre de cultures sous le signe de la coopération et de la paix : le Concile oecuménique Vatican II ». Elles sont présidées par Maheu, et Mgr. Giovanni Benelli, observateur permanent du Saint-Siège, y joue un grand rôle. Des conférences y sont prononcées par divers ecclésiastiques, et par des personnalités comme René Cassin et Jacques Maritain[548]. Une grande convergence de vues et une véritable sympathie rapproche Maheu et le successeur de Jean XXIII, Paul VI. Celui-ci poursuit la politique de rapprochement entre l’Unesco et l’Eglise : avec le Concile Vatican II (1962-65) et l’encyclique Populorum Progressio (1967), il s’efforce de placer l’Eglise au cœur du monde, et crée à cette fin des « conseils », sortes de ministères. Le Conseil « Justice et Paix », en particulier, consacré à la paix, développe des relations étroites avec l’Unesco[549]. Paul VI dedicace cette encylcique à l’ONU, à l’Unesco et à la FAO. Cette encyclique reçoit des échos importants dans la presse[550]. En 1967, Maheu fait un discours pour accueillir et approuver l’encylique Populorum Progressio[551]. Celle-ci lui donne l’idée de convoquer une conférence mondiale sur le développement[552]. Maheu déclare que cette encyclique « trouvera en [l’Unesco] une résonance toute particulière », et qu’elle est « le gage de la coopération active de l’Eglise à la campagne d’éducation de base et d’alphabétisation fonctionnelle que l’Unesco s’attache à promouvoir à travers le monde ». Il souligne le « profond accord » qu’elle révèle entre les vues du pape et celles de l’Unesco. Il affirme que « la conception humaniste du développement intégral » est commune à l’Unesco et à la papauté. « La conversion de chacun à l’œuvre de salut de tous qu’est le développement, c’est la grande mutation spirituelle qui s’impose à l’humanité contemporaine »[553]. Dans ces années, le gouvernement américain est très favorable à l’augmentation du rôle de l’Eglise à l’Unesco[554].
Il n’y a pas que des accords entre l’Unesco et l’Eglise, mais aussi des divergences. Ainsi, pour le CCIC, en 1960, l’Unesco ne doit pas s’engager dans des actions opérationnelles de grande ampleur, mais « son rôle doit demeurer limité aux réalisations pilotes qui peuvent avoir un effet d’exemple, d’entraînement, et à la détermination de normes d’orientations »[555]. En 1961, Maurice Quéguiner, dans un article dans Le Mois à l’Unesco, critique le concept du « développement communautaire », et sa tendance à « donner donner partout la primauté, sinon l’exclusivité, à l’économique, [à] acentuer l’emprise de l’État sur toute la vie des personnes et des groupes, [à] ignorer ou [à] sous estimer la famille et les quelques organisations privées existantes » ; il exprime la crainte que le développement communutaire ne conduise à « une socialisation universelle », et le regret qu’ « il n’y a[it] guère de souffle spirituel dans cette entreprise »[556].
La collaboration entre l’Unesco et l’Eglise est affaiblie par le conflit interne qui oppose dans ces années le CCIC, dirigé par Jean Larnaud, et la Nonciature, en particulier l’observateur du Saint-Siège, Mgr. Benelli. Celui-ci, qui conçoit de grandes ambitions pour l’Eglise, et qui selon Larnaud avait « l’étoffe pour être pape »[557], développe l’ambition de faire du CCIC une courroie de transmission de la politique du Vatican, notamment d’en faire le promoteur du projet d’un grand programme d’alphabétisation du Vatican. Le CCIC refuse de se soumettre à la politique jugée « dictatoriale » du Vatican[558], tenant à poursuivre sa fonction de représentation de la population catholique, dans la diversité de ses tendances, rassemblée dans les diverses OIC. Jean Larnaud, dans une lettre confidentielle à Veronese en 1966, évoque ces problèmes : « j’ai récemment ecrit à Mgr Dell’Acqua pour lui dire que je savais que le Saint Père avait eu « du souci » au sujet de l’Unesco et, paraît-il, de notre centre. (…) la presidente de la conférence des OIC a très bien dit au pape qu’il n’y avait aucune animosité personnelle dans cette affaire, mais simplement que l’on souffrait avec cette difficulté du manque de précision quant aux relations entre les Centres et les Observateurs du Saint Siège »[559]. Le conflit se noue à l’assemblée des OIC à Londres en juillet 1966[560]. Larnaud et Francois Russo sont en conflit avec la présidente de la conférence des OIC, Pilar Bellosillo[561]. Ce conflit affaiblit la coopération entre l’Eglise et l’Unesco.
Durant son second mandat (1968-74), Maheu intensifie encore la proximité de l’Unesco avec les conceptions spirituelles et religieuses. Il se rapproche personnellement davantage encore des dignitaires ecclésiastiques et des personnalités intellectuelles chrétiennes. Il développe des relations de cordialité et de confiance avec Mgr Zabkar, successeur de Mgr Benelli au poste d’observateur permanent du Vatican à l’Unesco ; celui-ci, moins ambitieux que Benelli, se montre très conciliant, à la fois avec l’Unesco et avec le CCIC[562]. En février 1970, l’Unesco organise un Colloque sur « l’éducation et le développement de l’homme », dans lequel, comme l’exprime le rapport, plusieurs participants insistent « sur l’importance de la méditation ou de la foi religieuse »[563]. En 1971, dans son appel à la solidarité internationale pour les réfugiés de Palestine, Maheu cite les propos de Paul VI, qui soutient l’action de l’Unesco auprès des réfugiés palestiniens[564]. En 1973, Maheu écrit à Jean Guéhenno pour lui exprimer son admiration[565]. Et dans un article dans la Revue des deux mondes, en 1974, il rend hommage à l’action menée par le cardinal Daniélou en faveur de l’Unesco[566]. Enfin, il est à noter que pendant le second mandat de Maheu, le futur pape Jean-Paul II, familiarisé avec l’Unesco par Jean Larnaud qu’il côtoie au sein du conseil pontifical pour les laïcs, développe un grand intérêt pour l’organisation et se lie avec Maheu. Plus tard, devenu pape, il rendra visite à l’Unesco[567]. À partir du milieu des années 1970, la conférence des OIC cessant faute de moyens de financer le CCIC, l’Unesco prend en charge une partie de son financement[568]. En janvier 1972, Veronese dit du bien de l’Unesco au pape[569]. En avril 1972, Maheu rend visite au pape, et inaugure une exposition sur la Bible dans la bibliothèque du Vatican, dans le cadre de l’Année internationale du livre[570]. En 1972, un comité de coordination est créé au sein du Vatican pour participer à l’Année internationale du livre par diverses actions (expositions, émissions sur radio Vatican, développement des bibliothèques catholiques…) ; Maheu se réjouit de cette coopération importante du Saint Siège à l’Année internationale du livre[571]. En février 1973, Maheu recoit le « Prix Montaigne », décerné par la fondation d’esprit spiritualiste F.V.S. de Hambourg[572]. En 1974, Maheu et M’Bow recoivent pour l’Unesco le prix Jean XXIII[573]. Tous ces éléments témoignent de l’orientation de plus en plus importante de l’Unesco vers une sensibilité spiritualiste et chrétienne tout au long des années de mandat de Maheu.
Le discours d’adieu de Maheu, en novembre 1974, est marqué par un esprit très spiritualiste, et par des accents quasiment religieux :
« Unesco [...] permets-moi de te saluer une dernière fois avec toute ma ferveur en te désignant par les noms qui te conviennent le mieux sous les divers visages où j’ai appris à te connaître. Je te salue Idée - grande idée qui proclames le primat de l’esprit dans le cours des événements. Je te salue Effort - travail qui n’a de cesse pour traduire la fraternité des peuples en coopération effective et féconde des États. Je te salue amitié - humaine communion […]. Par-dessus tout, je te salue Promesse - promesse immémoriale de l’Homme aux hommes, que chaque époque répercute à sa manière et qui aujourd’hui s’incarne particulièrement en cette institution et dans cette entreprise dont nous sommes les serviteurs. Message de liberté, de dignité et de paix, je te salue Promesse »[574].
Plusieurs fonctionnaires de l’Unesco sont pendant ces années favorables à l’esprit religieux. Ainsi, en 1975, Yvan de Hemptinne estime que l’Unesco pourrait donner un « regain extraordinaire » à « l’esprit religieux dans le monde », qu’il concoit au sens de « ‘relier’ les hommes entre eux et avec les puissances cosmiques, y compris les puisances physico-chimiques qui gouvernent nos équilibre terrestres » ; il estime que cela apporterait « un supplément d’âme et d’esprit aux civilisations contemporaines qui en ont tant besoin »[575]. De même, Deleon estime que l’Unesco a fait une erreur en voulant « passer outre les phénomenes de religion et leur impact sur les phénomenes éducatifs »[576].
Ce rapprochement avec la religion semble être fait en partie sous l’impulsion de l’opinion. Ainsi, en janvier 1974, dans le courrier des lecteurs du Courrier de l’Unesco, un lecteur britannique déplore le caractère selon lui trop laïque du supplément « Copernic raconté aux enfants », paru dans le numéro d’avril 1973 ; il se dit « inquiet de ce qui semble être une attaque incroyablement superficielle contre la théologie », et estime qu’« un tel article ne peut qu’embrouiller l’esprit des jeunes »[577].
En 1969, un prêtre catholique américain, le révérend Alexandre Ranasinghe, rédige une these de doctorat sur La mission culturelle de l’Unesco. Cela montre l’intérêt des milieux catholiques pour l’Unesco. Dans cette étude, il souligne la proximité d’inspiration entre l’Unesco et les idéaux chrétiens, malgré l’absence (qu’il déplore) de références religieuses dans son acte constitutif. Il rend hommage à Torres Bodet pour avoir, le premier, introduit le nom de « Dieu » à l’Unesco dans son premier discours. Il condamne la tendance « séculariste » de l’Unesco, mais approuve son orientation croissante vers la religion. Il voit dans les idées de l’Unesco une proximité avec la philosophie thomiste. Son approbation de l’orientation religieuse de l’Unesco est liée à son anticommunisme. Il incite les catholiques à rester vigilant à l’égard de l’Unesco et de ses possibles orientations séculières[578].
En 1971, le catholique Maurice Barbier, dans une étude sur L’Eglise catholique et l’Unesco, se montre favorable à « encourager une présence pluraliste et une action diversifiée des catholiques à l’Unesco », mais se fait également critique envers l’Unesco. Il affirme qu’« incontestablement, il y a une affinité profonde entre l’Eglise et l’Unesco, car leur champ d’intérêt est partiellement commun ». Il souligne le rôle important joué par Benelli, « ambassadeur convaincu et catalyseur efficace dans les relations entre l’Eglise et l’unesco ». Il reconnaît que la coopération entre l’Eglise et l’Unesco est « loin d’être désintéressée d’un côté comme de l’autre ». Il souligne « la personnalisation et la centralisation des rapports entre l’Eglise et l’Unesco » dans les dernières années ; il estime que l’intérêt des OIC pour l’Unesco décline, alors que celui du pape augmente. Il juge que la coopération entre l’Unesco et l’Eglise a eu « des résultats incontestables » sur le plan des idées, mais « décevants en ce qui concerne la coopération pratique ». Notamment, « peu familiarisés avec les nouvelles techniques de l’alphabétisation fonctionnelle, ils [les catholiques] n’apportèrent qu’une contribution très limitée dans ce domaine. » Pour lui, l’essentiel est surtout que « les catholiques ont contribué à empêcher l’Unesco de tomber dans une idéologie positiviste et matérialiste qui aurait pu lui être fatale très rapidement ». Il estime aussi que si « les deux institutions [...] se donnent ainsi la main, c’est pour se renforcer mutuellement, alors que toutes deux, pour des raisons différentes, sont plus ou moins menacées à l’intérieur et discréditées à l’extérieur. Cette alliance défensive peut apparaître comme une sorte de collusion entre l’Eglise et l’Unesco. Cette collusion aiderait deux institutions bureaucratiqus à surmonter leurs difficultés internes et externes et aurait un effet conservateur pour l’une et pour l’autre, en dépit des objectifs apparemment nobles qu’elles se donnent ». Pour lui, l’idéologie de l’Unesco « aurait besoin d’être critiquée sérieusement aussi bien dans son principe que dans ses réalisations »[579].
Dans ces années, le CCIC œuvre activement au rapprochement entre Unesco et Eglise, et à la promotion de l’Unesco parmi les catholiques[580]. Edoardo Rovida, observateur permanent du Saint Siège auprès de l’Unesco de 1969 à 1971, le père François Russo, conseiller ecclésiastique du CCIC, Jean Larnaud, secrétaire du CCIC, François Gomart, représentant de la Confédération internationale des charités catholiques auprès de l’Unesco, Renée Level, representante de l’Union mondiale des organisations féminines catholiques auprès de l’Unesco ; Alfred Martinache, representant de la JOC internationale auprès de l’Unesco, participent à ce rapprochement entre l’Eglise et l’Unesco[581]. Ce rapprochement se fait aussi sous l’influence des ONG chrétiennes qui ont des accords avec l’Unesco, comme la confédération internationale des syndicats chrétiens[582].
Ce rapprochement se saisit aussi sur le terrain. Durant toute cette période, les milieux missionnaires catholiques fournissent un soutien important à l’Unesco. En effet, des relations de collaboration et de complémentarité se tissent entre l’Unesco et les missionnaires dans le cadre des projets d’alphabétisation sur le terrain, les missionnaires tendant souvent à se placer dans la position valorisante de guide par rapport à l’Unesco[583]. Maria Tabellini observe en 1962 que l’action menée dans le cadre du projet d’éducation de base du Cambodge est propice à la religion, qu’elle a eu pour effet de « renforc[er] les valeurs effectives de la religion, surtout en ce qui concerne la pratique des principes de tolérance, de compréhension et de charité humaine »[584]. Dans le même esprit, la commission Faure échange des vues avec le pape Paul VI[585]. En outre, en 1974, dans le cadre du projet d’éducation extrascolaire Unesco-Pnud mené au Rwanda, l’Unesco observe le rôle prépondérant de l’Eglise catholique dans l’éducation au Rwanda, par le biais de structures d’éducation (cours, presse, radio), et s’efforce de collaborer avec elle[586]. L’attitude de l’Eglise par rapport à l’Unesco n’est pas exempte d’un sentiment de supériorité. Plusieurs ecclésiastiques comme Mgr Benelli, observateur du Saint Siège, affirment l’idée d’une nécessaire subordination de l’Unesco à l’Eglise dans le domaine de la réflexion morale et spirituelle, étant donné que l’Unesco ne possèderait pas la dimension de transcendance qui est celle de l’Eglise[587].
Les années de Maheu sont donc celles d’une intense collaboration, d’un rapprochement croissant entre l’Eglise et l’Unesco[588]. On peut penser qu’il a été opéré par Maheu pour des raisons stratégiques, afin de renforcer la place de l’Unesco sur la scène internationale et dans l’opinion publique, plus que pour des convictions religieuses qu’il n’avait pas. Il s’est ensuite poursuivi sous le successeur de Maheu, M’Bow. Celui-ci, musulman pratiquant, s’est employé à renforcer les liens entre l’Unesco et les organisations religieuses, non plus seulement chrétiennes, mais notamment musulmanes[589].
Malgré cette impressionnante action de synthèse accomplie par Maheu, des doutes et des remises en cause s’expriment peu à peu au cours de ses douze années de pouvoir.





1.5.5. Avec le temps… : doutes et désenchantement.

Des doutes et des incertitudes sur les orientations.

Les orientations données à l’Unesco par Maheu ne sont pas exemptes de remises en cause et de critiques, et des doutes importants subsistent sur plusieurs aspects de ces orientations.
C’est tout d’abord l’ambition de Maheu de définir une philosophie de l’Unesco qui est l’objet de remises en cause. Dans l’ouvrage UNESCO, paru en 1962, Jean Thomas affirme de manière catégorique : « il n’y a pas et il n’y a jamais eu jusqu’ici de doctrine de l’Unesco » ; il estime que l’Unesco se caractérise par une « pensée éminemment pratique, voire pragmatique, puisqu’elle se traduit aussitôt en actes et n’a d’autre justification que dans l’action »[590]. Maheu d’ailleurs semble se contredire lui-même à ce sujet, puisque, parallèlement à ses déclarations sur la nécessité d’élaborer une « philosphie » de l’Unesco, il affirme que l’Unesco « ne doit pas être dogmatique et doctrinaire », que « l’Unesco ne doit pas avoir de dogme, ne doit pas inventer une doctrine, et surtout ne doit pas donner l’impression qu’elle cherche à imposer une doctrine ». Il reconnaît qu’« on n’est pas tout-à-fait d’accord » sur la nature de la « fonction morale » de l’Unesco, et que lui-même « ne saurait prétendre détenir une vérité définitive » à ce sujet. Il se veut prudent et estime qu’on doit se borner à définir « ce que cette fonction morale ne doit pas être »[591].
D’autre part, un débat se développe sur la question de la régionalisation du programme. Celle-ci est soutenue par les États du Tiers Monde, à qui elle profite, mais rencontre la désapprobation des États occidentaux. Elle se poursuit durant tout le mandat de Maheu, bien qu’elle soit désapprouvée par le Secrétariat et par Maheu lui-même. Celui-ci estime que l’Unesco doit s’efforcer de se garder de la « tentation » de créer des « institutions régionales ». Il pense que la création et le soutien de telles structures par l’Unesco exigent « des efforts disproportionnés avec le rendement effectif », et déplore qu’en Afrique « sévit une véritable inflation » d’institutions régionales créées sous l’égide de l’Unesco. « J’ai nettement l’impression que ce régionalisme institutionnel est pour nous une cause de déperditions d’énergie considérables, et, en attendant qu’il soit procédé à une évaluation attentive des structures régionales existantes, je ne suis pas favorable à la création d’institutions nouvelles de ce genre », affirme-t-il en 1967[592]. Face aux exigences de décentralisation et de régionalisation des activités qui sont faites par les États du Tiers Monde, les États membres occidentaux ainsi que l’URSS réaffirment la nécessité d’une centralisation des actions et d’une concentration du programme[593]. Le gouvernement français prône une meilleure « planification » du programme de l’Unesco et la « concentration des efforts sur les projets les plus importants », grâce à l’adoption d’une « méthode sélective », et préconise l’abandon des projets qui ne concernent qu’un petit groupe d’États membres[594]. Les États membres déplorent l’absence de clarté de la position de l’Unesco sur cette question[595].
Une autre source d’incertitude est constituée par la question de savoir si l’Unesco doit, pour remplir son but au mieux, agir de préférence au niveau local, par le moyen de « projets pilotes », expérimentaux, ou bien à un niveau beaucoup plus large. La première solution présente l’avantage de pouvoir agir avec efficacité, avec beaucoup de moyens, et de pouvoir observer des résultats concrets rapides ; la seconde permet en revanche de toucher beaucoup plus de personnes. Jean-Claude Pauvert et Acher Deleon, hauts fonctionnaires du département de l’éducation, défendent durant ces années des opinions opposées sur la question. Si Jean-Claude Pauvert défend le « principe de subsidiarité »[596], qui consiste à se concentrer sur le niveau local pour ensuite remonter vers les niveaux plus larges, en revanche Acher Deleon estime que l’Unesco devrait se consacrer plutôt aux actions menées à un large niveau[597].
Par ailleurs, durant les dernières années du mandat de Maheu, des doutes s’expriment aussi au sujet du rôle de la culture et de l’éducation comme facteur du développement, indépendamment des aspects économiques[598]. Plus généralement, c’est le présupposé conceptuel de l’Unesco selon lequel favoriser l’éducation, la science et la culture favoriserait la paix, qui est de plus en plus remis en question. En 1971, Charles Frankel remet en question ce présupposé : « Il faut bien reconnaître que la communication intellectuelle au-delà des frontières s’accompagne de dangers et de risques évidents. […] Les mauvaises idées s’importent comme les bonnes et les échanges entre nations peuvent être aussi bien négatifs que positifs ». Il observe que jusqu’à présent, les diverses tentatives de communication internationale ont généralement échoué, et constate la frustration engendrée par cet échec[599]. Sulwyn Lewis fait le même constat et exprime « des doutes sur l’efficacité des contacts culturels en tant que moyen de rendre les relations internationales plus harmonieuses » ; il estime que c’est sans fondement que l’Unesco « tient pour acquis que l’éducation, les échanges culturels et tous les contacts entre nations favorisent la compréhension mutuelle et l’amitié entre les hommes »[600], et par conséquent que c’est à juste titre que le Préambule de l’Acte constitutif de l’Unesco a été taxé de « slogan confus »[601]. De tels doutes sont partagés et exprimés par plusieurs hauts fonctionnaires, tels Paul Lengrand et Jacques Havet[602].
Enfin, au début des années 1970, à l’ONU et à l’Unesco, l’action opérationnelle est remise en cause, à cause de sa dimension d’ « aide », d’ « assistance », accusée de maintenir les États bénéficiaires dans une attitude passive et dominée. Conséquence de cette remise en cause, en 1974 l’ONU modifie sa conception de l’aide au développement, estimant que « ses schémas de pensée et ses modèles d’opération, qui datent du début des années 1960, ne correspondent plus aujourd’hui exactement aux besoins et aux possibilités des différentes catégories de pays en voie de développement » :
« Le service d’assistance publique internationale doit être conçu non comme une œuvre épisodique de charité ou une sorte d’assurance de la quiétude des riches contre les sursauts de révolte des misérables, mais essentiellement comme une mesure réparatrice de justice, en attendant les changements qui doivent être apportés dans l’ordre social international. Il s’agit de réaliser une organisation économique mondiale équitable et bénéfique pour tous. […] Sur le plan des idées, la notion d’aide - notion simpliste, toujours humiliante, et souvent même dangereuse, dans la mesure où elle s’accompagne de l’admission de la validité générale, voire de la supériorité des modèles économico-socio-culturels des pays ‘donateurs’ - doit céder la place à celle de coopération »[603].
Toutes ces incertitudes sont liées en partie à l’importante dimension d’innovation qu’ont comporté les deux mandats de Maheu : l’alphabétisation fonctionnelle[604], l’UNISIST[605], l’intégration de la technologie à l’éducation[606], en sont quelques exemples[607].
En mars 1963, au Sénat américain, Lucius Battle, secrétaire d’État adjoint pour les affaires culturelles, affirme que les activités de l’Unesco sont encore trop nombreuses, hétéroclites, dispersées, et se déclare « extrêmement critique sur […] la sélection des programmes »[608]. La même année, le sénateur Church déplore que « que beaucoup de ceux qui sont employés par l’Unesco ont anciennement fait partie de la bureaucratie coloniale, française, anglaise, hollandaise ou belge ». Battle renchérit : « il est assez vrai que l’Unesco a eu du personnel qui a simplement flotté dans une sorte d’aura internationale et qui ne représente pas nécessairement les meilleures personnes pour une organisation de ce genre »[609].
Ainsi, de nombreuses remises en causes et incertitudes au sujet des orientations à donner à l’Unesco caractérisent les années de mandat de Maheu. Ces années sont aussi marquées par une certaine désillusion et par un scepticisme croissant en ce qui concerne le bilan de l’action de l’Unesco.

Un bilan teinté de désillusion et de scepticisme.

Cette désillusion se fonde d’une part sur la constatation de la persistance du clivage entre clan latin et clan anglo-saxon, malgré une réduction de leurs divergences grâce aux efforts de Maheu. La persistance, après trente ans d’existence de l’Unesco, de ces divergences entre clan latin et clan anglo-saxon constitue un échec patent pour l’organisation[610].
D’autre part, la désillusion est due à la persistance de l’occidentalocentrisme encore au début des années 1970 dans les programmes. À titre d’exemple, en avril 1963, le Comité des publications déplore l’ « unilatéralité » dans la répartition géographique des auteurs des articles du Courrier de l’Unesco, malgré les « sérieuses tentatives [qui] ont été et sont toujours faites pour élargir, grace à des recherches sur place et à des contacts avec les commissions nationales et les ONG, le réseau des auteurs »[611]. De même, les deux centres pour le développement du livre créés avec l’aide du PNUD en Afrique à partir de 1972 fonctionnent exclusivement en anglais et en français. Et en 1960, la région Europe est représentée par près du tiers des sièges au conseil exécutif[612]. Cela constitue un problème majeur, et devient l’objet de dénonciations de plus en plus virulentes. L’Unesco subit ainsi des critiques très dures de la part des économistes et anthropologues tiers-mondistes. Ceux-ci dénoncent les actions de développement culturel et éducatif menées par l’Unesco dans le Tiers-Monde comme étant « de puissants vecteurs de la culture occidentale »[613]. Ils estiment que l’Unesco et l’ONU font preuve d’hypocrisie en exposant des théories et des déclarations d’intention généreuses à l’égard du Tiers Monde sans se donner les moyens de les faire passer dans les faits. Pour Jean-Pierre Lycops, ce décalage entre le discours et l’action serait conscient et intentionnel, et aurait pour but de faire jouer à l’Unesco le rôle d’alibi, afin de désamorcer les revendications. Il dénonce donc ce qu’il considère comme une « mystification », comme « tout un monde d’intrigues à des fins politiques ou même personnelles » derrière la « façade rassurante » du système des Nations Unies. Pour lui, les agences de l’ONU, « obéissant aux intérêts des capitaux qui les financent », mènent en réalité une action « très loin de l’idéal neutre et désintéressé qu’elles se proposent »[614]. Il dénonce aussi l’esprit ethnocentriste de leurs fonctionnaires, et accuse ces agences d’être « un ‘bureau de placement’ pour le reclassement des anciens administrateurs coloniaux, belges, français, hollandais ou anglais »[615]. De même, pour le Québecquois Daniel A. Holly, l’action de l’Unesco d’assistance technique au Tiers Monde, « loin de partir des besoins réels » de ces pays et de viser à encourager leur « authentique développement national », concourrait en fait à « renforcer leur dépendance idéologique » par rapport à l’Occident[616]. « En définitive, ce qui est atteint, c’est la reproduction de la structure du système mondial. Il en résulte une nouvelle forme de dépendance des pays du Tiers Monde et leur acceptation du modèle de développement occidental »[617]. De même Sélim Abou observe que derrière les notions d’ « aide au développement » et de « transfert de technologie » se décèlent les intérêts économiques des Occidentaux, car ces transferts de technologie sont rentables pour eux[618]. René Dumont et Marie-France Mottin dénoncent :
« Les rapports cyniquement optimistes, [...] rédigés en termes technocratiques, vides de contenu, [...] empilés sur les étagères des organisations internationales, des administrations locales et des antichambres de ministres [...] noient la réalité et nient la vie dans un langage codifié, une langue d’ordinateur [...], qui fait rentrer tout le monde dans un ordre technocratique international. » [619]
La critique d’une certaine hypocrisie des conceptions de l’Unesco, du décalage entre les principes bien pensants et les réalisations, s’exprime de manière de plus en plus large au début des années 1970, en dehors même des cercles tiers-mondistes. Ainsi, Raymond Aron critique « l’oecuménisme hypocrite » de l’Unesco, et estime que l’organisation a finalement pour principale fonction de donner bonne conscience aux pays développés[620]. En 1970, le membre britannique du conseil exécutif, William Mathieson, secrétaire adjoint au ministère du développement de l’outre-mer, ancien administrateur colonial, est, comme l’observent les États-Unis, resté imprégné de conceptions liées au colonialisme, et les exprime souvent au conseil exécutif, ce qui est en contradiction avec les conceptions de l’Unesco[621]. En 1972, Soljenitsyne, dans son discours à l’occasion de la remise du prix Nobel de la Paix, affirme : « il y a un quart de siècle, etait née l’ONU, avec les grands espoirs de toute l’humanité. Hélas, dans un monde immoral, elle aussi est devenue immorale »[622].
Au sein même du personnel de l’Unesco, la rhétorique bien-pensante et consensuelle de l’ouvrage de Maheu La Civilisation de l’universel, est l’objet de railleries ironiques[623]. Parmi les fonctionnaires de l’Unesco, se développe de manière croissante une critique de l’extrême prudence idéologique de l’organisation, qui se traduit souvent par la langue de bois, et qui empêche le développement de véritables réflexions. Jacques Havet, regrette que la mission de l’Unesco « d’ouvrir un foyer de réflexion en profondeur et de libre dialogue sur les grands problèmes humains de l’heure [ait été] mise en veilleuse par excès de prudence »[624]. De même, Emile Delavenay déplore le refus constant de l’Unesco d’aborder des sujets controversés, et estime que cela l’a condamnée à demeurer dans la superficialité[625]. E.R., ancien fonctionnaire, dénonce « l’angélisme bavard » de l’Unesco, sa tendance à « se donner bonne conscience », et critique sa rhétorique « drapée de vaine autosatisfaction »[626].
Dans les années 1968-74, la désillusion et le scepticisme se répandent donc au sein du personnel : quelle contribution peut apporter l’Unesco aux réflexions sur les grands problèmes du monde si elle ne peut disposer pour cela d’aucune liberté de parole ? Anne Grinda a une conscience très vive de la perte de foi en l’Unesco par le personnel au fil de ces années ; le travail à l’Unesco est de moins en moins considéré comme une mission sacrée, comme l’accomplissement d’un idéal[627]. E.R. souligne la prise de conscience croissante par les fonctionnaires des « transgressions » et des « travestissements » de l’idéal de l’Unesco[628]. Le fait que Paul Lengrand ne consacre qu’un seul chapitre de son autobiographie Le métier de vivre à sa carrière de fonctionnaire international est également révélateur de ce désenchantement[629]. Cette désillusion générale choque et déçoit les nouveaux fonctionnaires qui entrent alors à l’Unesco avec l’intention de se dévouer à son idéal. Ainsi, Sorin Dumitrescu évoque sa déception lors de la cérémonie de prestation du serment de loyauté, en 1969 :
« J’étais très motivé par le texte du serment. […] Je connaissais le texte par cœur et je me serais porté volontaire pour le prononcer soit en français, soit en anglais. Mais le représentant […] demanda directement à un Français et à un Américain de lire le serment dans leur langue maternelle. À ma grande déception, ils le firent comme une litanie ennuyeuse, qui n’avait rien de solennel. » [630]
Cette désillusion est aussi le fait des représentants des États membres. À la conférence générale et au conseil exécutif s’exprime de manière croissante, même de la part de délégués convaincus par l’idéal de l’Unesco, comme Pablo Neruda, l’idée que l’Unesco a « beaucoup de points faibles », et qu’elle a apporté beaucoup de « déceptions et d’incertitudes »[631]. En 1972, les États-Unis dénoncent avec une vigueur accrue le flou et la timidité des conceptions de l’Unesco[632].
Maheu lui même est, en 1970, saisi de doutes au sujet des conceptions directrices de l’Unesco, étant très déstabilisé et fragilisé par une contestation dont il est l’objet de la part de son personnel. Il confie son désarroi à son collaborateur le Soviétique Sema Tanguiane[633]. En effet, une table-ronde du personnel organisée en 1970 dans le cadre d’une contestation générale de l’Unesco venue de l’intérieur, se livre à une critique acerbe du socle conceptuel de l’organisation, dénonçant son flou[634], son caractère consensuel, et son manque d’audace et de libre-pensée :
« Dans une structure dont les divers éléments communiquent mal, dans un organisme dont les grandes orientations se décident sans dialogue et sans respect mutuel suffisant entre qui les prépare et qui les décide, où le droit de parler ne se délègue pas plus que les responsabilités, dans une organisation, enfin, où il est si facile de trouver à cause de son caractère intergouvernemental toutes les contradictions internes du monde, il n’est pas surprenant que s’élabore si souvent une littérature tout spécialement conçue pour ne rien exprimer de neuf, de difficile ou de dangereux, tant d’actions dans lesquelles on se refuse à affronter l’essentiel. […] Nombre de fonctionnaires du Secrétariat ont conscience du fait que, à force de ne rien vouloir dire « qui dépasse », l’Organisation gaspille son crédit et accroît son retard par rapport à l’évolution des idées dans le monde. Les programmes eux-mêmes se ressentent de ce défaut d’audace et d’imagination, de ce défaut de confiance en soi. […] Il y a danger à voir l’Unesco non seulement affadir son image mais faillir à sa mission si le Secrétariat ne formule que des propositions répondant au souci de ne pas heurter les idées (connues ou présumées) des divers États membres. […] Cette tendance à la recherche préalable du consensus des États membres vide d’ailleurs progressivement la conférence générale de son sens. »
Le rapport de la table ronde dénonce la censure et le secret qui caractérisent le fonctionnement de l’Unesco : « un contrôle proche de la censure est pratiqué sur l’information destinée au ‘monde extérieur’ ; cette dernière se transforme insensiblement en propagande pour l’Organisation »[635]. Il critique le choix des programmes, élaboré plus en fonction des thèmes en vogue et du hasard que des réels besoins de la communauté internationale[636].
En outre, dans les dernières années, l’heure est au pessimisme sur les perspectives du monde et de la paix : ainsi, en 1970, le colloque de l’Unesco sur « l’éducation et le développement de l’homme » constate que la civilisation occidentale est « secouée par une série de crises profondes » et que « plus peut-être qu’à aucun autre moment de l’histoire, l’avenir de l’humanité s’annonce incertain, sinon sombre »[637].
A la fin de la période, le bilan est donc en demi-teintes, de l’aveu même des dirigeants et anciens dirigeants[638]. Si pour certains, comme pour les Soviétiques, la persistance de divergences conceptuelles, et de luttes idéologiques, au sein de l’Unesco, apparaît comme un phénomène normal et même sain[639], en revanche pour de nombreux fonctionnaires comme pour la plupart des États membres, ces désaccords conceptuels apparaissent comme le signe d’un échec, et entraînent un jugement sévère sur l’Unesco. Ainsi, à la Conférence générale de 1972, Prem Kirpal, président du Conseil exécutif, affirme que l’Unesco n’a pas atteint le but qu’elle s’était fixé dans son Acte constitutif[640]. En 1973, Maheu lui-même reconnaît officiellement que l’Unesco, comme l’ensemble du système des Nations Unies, « traverse en ce moment une phase particulièrement délicate, voire difficile »[641].
Ces incertitudes et ces remises en cause se poursuivent et s’accentuent après 1974[642]. Le départ de Maheu met fin au fragile équilibre entre tendances conceptuelles opposées qu’il s’était consacré à réaliser par ses efforts de synthèse harmonieuse ; le mandat de son successeur M’Bow entraînera une rigidification des conceptions de l’Unesco, et de vifs désaccords à ce sujet.

Epilogue. L’Unesco de M’Bow (après 1974) : la fin de « l’âge d’or » de l’Unesco.
La succession de Maheu, remplacé par Amadou Mahtar M’Bow en 1974, était lentement amorcée depuis quelques années, bien que Maheu aurait souhaité s’il en avait eu la force entamer un troisième mandat[643], et qu’il ait pendant plusieurs années plutot promu Mahdi Elmandjra comme son « dauphin »[644]. Membre du conseil exécutif, M’Bow s’y était fait remarquer pour sa compétence et son efficacité. En novembre 1970, Maheu l’avait nommé assistant directeur général pour l’éducation[645] ; à ce poste, il s’était engagé avec succès dans une rénovation des activités de l’Unesco[646]. M’Bow, par ses qualités personnelles et en tant que ressortissant d’un État africain, avait ainsi le profil parfait pour devenir le successeur de Maheu. Sénégalais, il est issu d’une famille ouolof ancienne et illustre mais analphabète[647]. Il est marqué dans son enfance par la famine qu’a connu le Sénégal en 1928-30 : « J’avais alors 8 ou 9 ans, et j’ai vu beaucoup de jeunes de mon âge mourir de faim », raconte-t-il à la presse[648]. Pendant la guerre, il s’engage dans l’armée de l’air ; « je tenais à faire mon devoir d’homme libre » ; il échappe de peu à la captivité, puis retourne à Dakar en octobre 1940. Dès le ralliement du Sénégal à la France libre, il se porte à nouveau volontaire dans l’aviation. Après la Libération, il retourne à Paris, où il fait des études à la Sorbonne[649]. Il devient chef de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France, il s’emploie à « réhabiliter l’héritage africain »[650]. Puis il rentre au Sénégal et y enseigne[651]. Considéré par les fonctionnaires de l’époque comme « un grand directeur général », « un directeur général remarquable » pour l’action menée durant son premier mandat (1974-1980), M’Bow a ensuite déçu au cours de son second mandat (1980-86), par la radicalisation de ses conceptions vers le communautarisme et par son goût croissant pour le pouvoir[652]. On observe en outre une évolution dans le personnel après 1974, de profil nettement moins intellectuel que par le passé[653].

Des conceptions qui se radicalisent vers le communautarisme.
Comme Maheu avant lui, M’Bow s’efforce de concilier universalisme et multiculturalisme, « unité et diversité » de la culture[654]. Pour lui, le but de l’Unesco est d’atteindre « une vraie symbiose culturelle, qui ne soit ni la domination d’une forme particulière de culture, ni une espèce de cosmopolitisme culturel, dérivé de la mise en commun de ce qui, dans chaque culture, n’est pas essentiel et se prête à la banalisation »[655]. À la conférence générale de 1974, il affirme que cette dualité contribue à « la vitalité de l’Unesco », et estime que l’organisation est « sur le point d’atteindre un des fondements essentiels de son existence : l’universalité »[656]. Cependant, au fil de son mandat, M’Bow s’engage surtout en faveur du multiculturalisme et de la défense des identités culturelles africaines ; s’affirmant comme le porte-parole et le défenseur des pays du Tiers Monde, il considère son élection comme « une manifestation de considération et d’estime envers des régions et des peuples - ceux du Tiers Monde - qui ont été si longtemps tenus à l’écart des centres de décision et des foyers d’influence universelle ». Il déclare puiser son inspiration pour sa nouvelle mission « dans le génie du peuple africain, dans sa sagesse »[657]. Il promeut à cet effet la notion de « dimension culturelle du développement », de « finalité culturelle du développement » ; l’Unesco doit s’attacher à promouvoir dans le Tiers Monde « un développement intégré, où les facteurs économiques, sociaux et culturels, indissociablement liés, contribuent ensemble au progrès »[658]. Il met l’accent en particulier sur l’importance de la maîtrise de la technologie et de l’information par les États du Tiers Monde.
Cette attitude radicale de M’Bow de défense des intérêts économiques et culturels des États du Tiers Monde engage l’Unesco dans une polémique. Le tournant multiculturaliste de l’Unesco est de plus en plus critiqué, non seulement pour des raisons politiques et économiques par les États occidentaux, mais aussi pour des raisons culturelles, de la part d’anthropologues, d’ethnologues, d’intellectuels. Ceux-ci observent que la supposée érosion des cultures, qui a justifié le tournant multiculturaliste de l’Unesco, est un phénomène dont la gravité a été abusivement exagérée. Ils relativisent le phénomène, par référence aux nombreux exemples d’acculturation dans l’histoire[659]. Ils soulignent « l’extraordinaire capacité des cultures à résister à l’érosion », à créer des spécificités culturelles, à produire de la différenciation culturelle[660].
En outre, de nombreux intellectuels mettent en garde contre les dangers du multiculturalisme, lorsqu’il se transforme en communautarisme. Sélim Abou observe que la revendication multiculturaliste, portée à l’extrême, « débouche sur la fermeture aux autres au nom d’une authenticité vue comme un retour aux sources »[661]. Pour Alain Finkielkraut, cette revendication a pour effet de « de menacer l’unité sociale et politique, d’enrayer, voire d’inverser, la dynamique d’intégration »[662]. Fred Constant observe que « les politiques multiculturelles encouragent indirectement l’auto-exclusion des groupes qu’elles prétendent précisément protéger et promouvoir, en les tenant en marge de la communauté dominante »[663]. Charles Taylor et Michael Walzer soulignent eux aussi les dangers du relativisme culturel, qui tend à produire une réification des identités, et à entraîner le retour de communautés fermées et oppressantes pour l’individu.
Le multiculturalisme est ainsi conçu par ces intellectuels comme une attitude intégriste, régressive. Poussée à l’extrême, la théorie multiculturalisme aboutit en effet à une remise en cause des droits de l’homme, conçus comme une forme de pensée typiquement occidentale, dont l’imposition à tous les peuples constituerait une forme d’ethnocentrisme[664]. En 1986, dans La Défaite de la pensée, Alain Finkielkraut dénonce ainsi ce qu’il conçoit comme un renversement des conceptions de l’Unesco, une perversion de ses idéaux. L’Unesco en serait ainsi arrivée à cautionner une conception rétrograde de la culture, niant la liberté et l’originalité de l’individu, puisque selon cette conception communautariste, « les êtres humains tirent toute leur substance de la communauté à laquelle ils appartiennent », que « l’identité personnelle des individus se confond avec leur identité collective ». Ainsi, selon Alain Finkielkraut, « ni vu ni connu, sous la bannière inchangée d’un mot indiscutable [celui de culture], l’Unesco propage désormais les valeurs que son mandat originel lui prescrivait de combattre »[665]. Il observe :
« Ne parler de culture qu’au pluriel, c’est refuser aux hommes d’époques diverses ou de civilisations éloignées la possibilité de communiquer autour de significations pensables et de valeurs qui s’exhaussent du périmètre où elles ont surgi »[666]. « C’est aux dépens de sa culture que l’individu européen a conquis, une à une, toutes ses libertés, c’est enfin, et plus généralement, la critique de la tradition qui constitue le fondement spirituel de l’Europe, mais cela, la philosophie de la décolonisation nous l’a fait oublier en nous persuadant que l’individu n’est rien de plus qu’un phénomène culturel. » « Honteux de la domination si longtemps exercée sur les peuples du Tiers-Monde, on se jure de ne plus recommencer et [...] on se refuse à les protéger contre les méfaits ou les abus éventuels de la tradition dont ils relèvent. Afin d’atténuer la brutalité du déracinement, on les remet, pieds et poings liés, à la discrétion de leur communauté, et l’on en arrive ainsi à limiter aux hommes d’Occident la sphère d’application des droits de l’homme, tout en croyant élargir ces droits. »[667]
De même, René Gallissot observe que la notion d’ « identité culturelle », si elle professe la défense de minorités opprimées, « sert aussi à perpétuer un différentialisme qui n’est pas loin de l’idée de race, et peut supporter tous les nationalismes, xénophobies et ethnocentrismes »[668]. Il dénonce « la peur du mélange, l’obsession de la pureté, la hantise de la contamination »[669] qui caractérise les défenseurs des identités culturelles, ce qui les rapproche d’une attitude raciste, à travers le concept d’ « ethnicité », concept au « caractère ambigu, insaisissable et équivoque »[670].
C’est également dans le cadre des critiques faites au mouvement tiers-mondiste que la politique menée par M’Bow est l’objet de contestations croissantes[671]. Ainsi, Régis Debray critique le concept de Tiers Monde, « vocable européo-centrique et aliénant par essence »[672]. Il admet « qu’une solidarité spéciale unit les trois continents, mais du dehors plus que du dedans : [...] c’est une unité en creux, pour ainsi dire, une communauté négative »[673]. Avec la multiplication des conflits inter-tiers-mondistes, l’illusion de l’unité du Tiers Monde s’effondre d’elle-même. Ainsi disparaît peu à peu, comme l’observe Yves Lacoste, « l’idée qu’il existe une solidarité fondée entre les nombreux États dont les populations ont subi la domination coloniale et continuent d’en subir les séquelles »[674].
De vifs débats se développent ainsi durant les deux mandats de M’Bow au sujet de l’orientation multiculturaliste de l’Unesco, soumettant l’organisation à des polémiques importantes[675]. Cela contribue à un vif sentiment de désillusion chez le personnel.

Un sentiment de désillusion chez le personnel.
Durant les deux mandats de M’Bow, l’atmosphère d’idéalisme, d’espoir en l’avenir, décline au sein du personnel. Pour la plupart des fonctionnaires, l’idéal de paix qui est celui de l’Unesco n’apparaît plus comme un but réaliste[676]. Tocatlian se dit frappé par l’atmosphère de défaitisme de l’Unesco après Maheu :
« Sous Maheu, il y avait une effervescence, une agitation, dans les couloirs ; les gens étaient actifs, passionnés par ce qu’ils faisaient ; il y avait en permanence des groupes de travail qui cherchaient une salle pour se réunir, pour discuter ; il n’y avait pas de salles pour tout le monde. Après, cela a changé : il n’y a plus rien, tout est calme, endormi, on a une impression de désert, d’inactivité. » [677]
Dans le même esprit, le poète Yves Bonnefoy compare l’Unesco des années 1970 au « Palais de la Belle au Bois dormant », il évoque les « couloirs vides, dépeuplés, irréels », l’impression de « désert »[678]. Pour Michel Prévost, Maheu a été « le dernier directeur général à faire de l’exécution du programme la raison d’être de l’Unesco »[679]. Jean-Baptiste de Weck observe qu’après Maheu, « ses successeurs ont vu peu à peu s’étioler la confiance »[680]. La crise conceptuelle que connaît l’Unesco après 1974 a alors, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Unesco, souvent été interprétée avec fatalisme, considérée comme la preuve d’un échec auquel l’Unesco aurait été prédestinée dès sa création, étant donné ses buts vagues et contradictoires et l’absence d’accord sur ses conceptions directrices[681].


Au terme de trente années d’existence, l’Unesco a donc donné lieu à un riche et intense foisonnement de réflexions au sujet de la paix et de l’épanouissement de l’homme, et des moyens d’y parvenir. Ces réflexions se sont traduites par l’affrontement de conceptions diverses, parfois opposées. Elles ont été enrichies par l’expérience retirée de leurs tentatives d’application pratique. Par le développement de toutes ces réflexions, l’Unesco a fourni une contribution essentielle à la recherche de la paix. Cependant, l’échec à définir des conceptions directrices fermes a affaibli la portée de son action. Les dilemmes entre action opérationnelle et action intellectuelle, entre conception universaliste et conception communautariste de la culture, n’ont pas été résolus.
Toutefois, malgré les divergences et hésitations récurrentes, l’Unesco a connu une évolution conceptuelle nette au fil de ces années : initialement tournée vers la coopération intellectuelle et scientifique et vers la reconstruction des pays dévastés par la guerre, elle s’est graduellement ouverte aux besoins des pays du Tiers Monde, et a développé à leur intention une action d’assistance technique et d’alphabétisation. D’autre part, des préoccupations initialement absentes, comme la protection du patrimoine, ont émergé et pris une importance croissante. Ainsi, une évolution s’est effectuée dans la conception que s’est faite l’Unesco de la culture comme facteur de paix et de bonheur. L’idée que la culture contribue à la paix par le progrès intellectuel qu’elle permettrait dans l’esprit des hommes, ainsi que par le rapprochement culturel entre les peuples qu’elle induirait, a peu à peu été supplantée par l’idée que c’est plutôt par son impact sur le développement économique qu’elle pourrait contribuer à la paix. D’autre part, à la volonté initiale, optimiste, de créer une nouvelle société, une nouvelle culture, donc à une conception reposant sur une idéalisation de l’avenir, a peu à peu succédé la volonté de conserver, de protéger, le patrimoine (culturel comme naturel), donc une conception reposant plutôt sur une valorisation du passé. Cependant, ces évolutions n’ont pas été si schématiques, les conceptions ne se sont pas succédées l’une à l’autre de manière exclusive ; par son effort de synthèse, Maheu a dans une certaine mesure pu concilier, dans les années 1960 et le début des années 1970, des conceptions à première vue divergentes.
Malgré cette difficulté à définir des conceptions claires, l’idéalisme est demeuré important au sein de l’organisation durant toute la période 1945-74, par opposition à la période qui a suivi. Alimenté par l’enthousiasme exalté de Huxley et par la « foi » de Torres Bodet, il a connu une certaine éclipse sous Luther Evans et Veronese, avant de renaître avec vigueur grâce à l’immense énergie mise par Maheu pour faire de l’organisation une grande force d’influence internationale. Malgré le flou qui les a caractérisées, les conceptions de l’Unesco ont ainsi réussi, pendant une grande partie de la période envisagée, à drainer les enthousiasmes et les espoirs de nombreux individus. Si elles ont été caractérisées par tant d’hésitations et de fluctuations, c’est aussi en partie à cause des pressions politiques qui ont pesé sur elle durant toute cette période. C’est ce qu’il s’agit d’analyser à présent.



[1] Rapport de R. Schuman, 3 août 1947, doc. cité, p. 10. Et : A. Métraux, Itinéraires I, 25 novembre 1952, p. 395 : « Ma conception des élites ne semble pas plaire à Laves » (opposition Métraux / Laves). Cf. aussi Peter Lengyel, op. cit., p. 10.
[2] Lien-Link n°80 : « Jaime Torres Bodet. Thoughts on the one-hundredth anniversary of his birth », par Alfredo Picasso de Oyague. Publiant des recueils de poèmes depuis l’âge de seize ans, il a fondé en 1928 une revue littéraire, Contemporaneos.
[3] PER/ST/8, discours cité, p. 2 .
[4] Ibid., p. 1-2. Il a notamment travaillé alors au projet d’une collection de traductions d’œuvres représentatives de la littérature ibéro-américaine.
[5] DG/161, discours cité, p. 11 : « dans une large mesure, l’Unesco renoue avec la tradition de l’IICI ». Et PER/ST/8, p. 2 ; DG/1, p. 5. Pourtant, il se dit conscient de la « fragilité » de l’IICI, et affirme que l’IICI « a laissé à l’Unesco une succession lourde de responsabilités ».
[6] DG/35, discours cité, p. 5.
[7] L’Unesco en 1950, ses buts…, op. cit., p. 9.
[8] DG/11, discours cité, p. 3.
[9] DG/73, discours cité, p. 5.
[10] DG/1, discours cité, p. 12. « Je crois en l’avenir de l’Unesco parce que je crois en l’avenir de l’Homme ».
[11] Alfredo Picasso de Oyague, article cité : Torres Bodet avait souvent à l’Unesco des conversaitons littéraires avec Caillois, Soupault, et Radakrishnan.
[12] Mirèse Akar, « Portrait : DG de l’Unesco, René Maheu … », art. cit.
[13] 12 C/INF/12, 16 novembre 1962 : discours prononcé par R. Maheu devant la conférence générale lors de son entrée en fonctions, p. 2.
[14] Le Monde, 23-24 janvier 1949, p. 3, article cité.
[15] Note pour le ministre italien, 18 août 1950 (doc. cité), p. 3-4. « lo spirito europeo e latino ».
[16] Rapport de Jean Thomas, 22 mars 1948, doc. cité.
[17] FR, Relations culturelles 1951-52. Oeuvres diverses. Carton 242 : note pour le secrétariat des conférences, 25 juillet 1951.
[18] Article nécrologique de Jean-Jacques Mayoux, Le Monde, 24 décembre 1987. Professeur d’anglais à la Sorbonne de 1952 à 1972. Il est en outre, et reste jusqu’à la fin de sa vie, l’un des principaux animateurs de la Société européenne de culture, qui encourage le dialogue entre les intellectuels de l’ouest et de l’est.
[19] « La France accueille M. J. Torres Bodet, MM. Schuman, Bidault et Delbos à la commission nationale française », in Courrier de l’Unesco, février 1949, p. 3 : Robert Schuman affirme devant la commission nationale française : « ce n’est pas la France qui diminuera l’importance du mandat reçu par l’Unesco ».
[20] Georges Bidault est président de la délégation française à la conférence générale de 1948. Cf. FR, Nantes, carton 117, rapport confidentiel de G. Bidault à Robert Schuman, 26 avril 1949, 45 p.
[21] cf. Charles Ascher, op. cit., p. 71.
[22] Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 65.
[23] Huxley, Memories II.
[24] Biogr. Montessori.
[25] Pierre Dominique Gaisseau, auteur de Forêt sacrée, magie et rites secrets de Toma, Paris, 1953 ; ouvrage écrit à la suite d’une mission en Guinée pour l’Unesco ; Jean-Henri Servier, auteur de La civilisation berbère, Paris, 1951. Cf. Journal Métraux, 10 février 1953, p. 475.
[26] Journal Métraux, 5 mars 1952 : « rencontre avec J.P. Sartre au café Pont Royal. Sartre veut faire une brochure sur Race et économie, en reprenant le point de vue marxiste, qu’il modifierait dans le sens de la finalité plutot que de la causalité ».
[27] Cl. Lévi Strauss et Didier Eribon, De près et de loin, Paris, éditions Odile Jacob, 1990, p. 43.
[28] Interview Lévi Strauss.
[29] Cl. Lévi Strauss et Didier Eribon, op. cit., p. 90.
[30] Journal Métraux, 19 juin 1953 : « visite de Balandier qui hésite à prendre le poste offert par Lévi-Strauss, ne pouvant cumuler le CNRS et l’Unesco ». Interview Balandier.
[31] Who’s Who in France 1975-76 , article sur G.H. Rivière.
[32] Michel Leiris, Journal, Paris, Gallimard, NRF, p. 904 (mission aux Antilles, mars-juillet 1952).
[33] E. Chniti, op. cit., p. 569.
[34] EU, box 2254 : lt. d’Arthur Compton à Allen, confidential report on 3rd session Unesco general conference, nov.- dec. 1948, p. 2 : « European Latins » ; « This group is greatly influenced by French intellectual leadership and often does not share the US emphasis on « mass » participation in Unesco ».
[35] RU, FO 371/88915 : memorandum de Paul Matthews au Foreign Office, 26 janvier 1950, intitulé « Unesco », p. 3. « there seems to be a certain drift back to the pre-war International Institute of Intellectual Cooperation, and this drift is particularly inspired by the French, to whom the present DG pays very great attention ».
[36] Ibid., p. 5 : « the growth of French as opposed to Anglo-American influence in Unesco » ; « of a predominantly French cultural background » ; « The DG himself considers himself French in sympathy » ; « is in fact French in his cultural outlook ».
[37] Ibid., p. 3 : « a real risk of Unesco being divided in its own mind on what its proper functions should be, unless a very definite stand is taken agaisnt the French position in these matters ».
[38] EU, box 1600, lettre confidentielle de K. Holland à Ch. Thomson, 16 janvier 1950, sur les activités de l’Unesco : « he maintained that the French Culture Boys were in the ascendency in Unesco » ; « ‘action’ program », s’oppose à la conception française, qui est celle d’un « ‘conceptual’ or ‘philosophic’ program ».
[39] Film Cimetière dans la falaise, n°2093, par Jean Rouch, 1951.
[40] EU, box 2254 : La bourse égyptienne, 2 déc. 1948 : « Un entretien avec le comte Jacini, président de la délégation italienne à l’Unesco », p. 1 et 6, par M.C. Boulad.
[41] DG/161, 7 janv. 1952, p. 11.
[42] Ascher, box 150 : lettre de Jack .. ? (illisible) à Ascher, 28 oct. 1949, p. 2 : « The Organization is faced this year with some semantical problems in view of the change from English to French as the primary language ».
[43] EU, box 2254 : rapport confid. de K. Holland à Ch. Thomson, p. 3 et 6. « Increased French interest and cooperation in Unesco [...] will raise problems with us in fields where French emphasis on cultural matters may run counter to our strong interest in mass communications ».
[44] Ascher, box 150 : lettre de Jack .. ? (illisible) à Ascher, 28 oct. 1949, p. 1 : « Huxley was so intensely personal in his approach, the present DG is, on the other hand, intensely impersonal and at the same time intensely sensitive to political forces, which Huxley was not » ; « With the coming of the new DG and his own particular method of doing things, programme making underwent a revolution rather than an evolution. Many of the things which had been learned through painful experience in 1947 and 1948 have had to be relearned during the first nine or ten months of this year ».
[45] P. Lengyel, op. cit., p. 27-28.
[46] EU, box 2254 : memorandum to the secretary on the Unesco conference at Beirut, nov. 17-déc. 11, 1948, par George V Allen, p. 2-3 : « a high intellectual level » ; « The fact that no session of the General conference has yet achieved the high intellectual and moral level that many people seem to expect may be an indix of the immaturity and relative weakness of Unesco » ; « the intellectual aridity and low level of discussion, the absence of outstanding addresses ».
[47] EU, box 1600 : rapport de Constance Roach, membre de la délégation américaine à la 4e conférence générale de l’Unesco : « a business meeting ».
[48] W. Laves, « Unesco and the achievement of peace », art. cit.
[49] OHRO, interview d’Evans, p. 315-316, 615.
[50] L’assistance technique en vue du développement économique au service de l’homme, Ecosoc, 1950, 39 p., p10 ; OHRO, interview d’Evans, p. 315-316.
[51] DG/179, 24 juin 1952, p. 9.
[52] DG/168, 6 fév. 1952, p. 5.
[53] 14 EX/SR.4.rev. (séance privée), 8 février 1949, p. 2, 4. Torres Bodet affirme que « dans un monde aussi divisé, au point de vue politique, que celui où se trouve l’Unesco depuis sa création, on ne saurait négliger le risque que des groupes régionaux pourraient faire courir à l’universalité de l’action de l’Organisation ». Il estime qu’il vaut mieux ne pas soulever cette question lors d’une séance publique du conseil exécutif ou de la conférence générale, « de peur de donner lieu à des controverses d’ordre politique » ; Seydoux : « C’est en restant fidèle au principe de l’universalité que l’Unesco peut espérer survivre. […] Le régionalisme éloignerait trop l’Unesco des individus qui peuplent les Etats membres. Si elle se contente d’entretenir des rapports avec les commissions nationales et les grandes organisations régionales, elle n’entrera en réalité en contact avec personne, et nous verrons dans les différentes parties du monde se former peu à peu d’autres Unesco ». Seydoux se déclare « résolument partisan de l’universalime et hostile au régionalisme ».
[54] « Création d’un bureau régional de l’Unesco pour l’hémisphère occidental », Courrier de l’Unesco, juillet 1949, p. 1-2.
[55] M.H. Holcroft, op. cit., p. 64-67 : « the most potent of all influences in the changing of attitudes ».
[56] RU, box 2254 : M.C. Boulad, « Un entretien avec le comte Jacini, président de la délégation italienne à l’Unesco », La Bourse égyptienne, 2 décembre 1948, p. 1 et 6.
[57] Congrès, vol. 96, 81e congrès, 2e session, 3 janv. 1950-2 janv. 1951 : article : « God in the UN », p. 16176.
[58] Interviews Larnaud et Deliance ; J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 111. Il fait des gestes envers les représentants des différentes religions, et s’efforce de maintenir l’équilibre entre elles : ainsi, à sa visite en 1949 dans un temple de Ceylan conservant une relique de Bouddha, fait pendant sa visite au Vatican en 1950.
[59] Public papers …, op. cit., vol. II : Dag Hammarskjöld, 1953-56, 716 p., p. 96-97 : message de Hammarskjöld à la 4e conférence de la commission nationale américaine, 15 septembre 1953. Il félicite la commission nationale américaine pour son « sens de fraternité humaine, jailli de la foi chrétienne, qui trouve son expression dans le respect de la dignité et de la valeur de la personne humaine devant Dieu et ses apôtres » (« the sense of human brotherhood, sprung out of the Chrisitian faith, finding its expression in respect for the dignity and worth of the human person before God and his fellow men »).
[60] Interview Deliance.
[61] RU, FO 371/101440 : mémorandum confidentiel de J. Somers Cocks à Paul Mason, 2 octobre 1952 ; memoranum de Godfrey, 3 octobre 1952 : « help to safeguard European christian traditions » ; lettre de P. Mason, 3 octobre 1952.
[62] « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », communication faite par Mgr. Bertoli, nonce apostolique en France, à l’Académie diplomatique internationale, 15 nov. 1960 (retranscrite dans La Documentation Catholique, Paris, 5 fév. 1961, et en partie dans le Mois à l’Unesco, janv-fév. 1961.
[63] Veronese, carton 34 : « L’Unesco vue par un catholique », par Alba Zizzamia, juin 1953, in The Sign (journal catholique américain). Zizzamia est correspondante auprès des Nations Unies pour le service d’information de la « National catholic welfare conference ».
[64] Tzentzenhuaro commence à vivre ; bilan d’une année d’éduc de base, Paris, Unesco, 1953, 37 p., p. 12 : « ils s’étaient déjà montrés disposés à coopérer avec les éducateurs que le gouvernement mexicain [leur] avait envoyés », et « ils avaient une tradition d’ ‘éducation de base’ remontant au XVIe siècle, époque où Don Vasco de Quiroga, envoyé à Mexico par le gouvernement espagnol, avait mis fin à leur esclavage, ouvert des écoles dans toute la région, fondé un collège et organisé ce qu’on appellerait aujourd’hui l’enseignement professionnel » ; A. Zizzamia, « l’Unesco vue par un catholique », art. cit. ; Courrier de l’Unesco, fév. 1952, p. 3-4 : « Patzcuaro : huit mois d’une expérience passionnante », par Tibor Mende : il dresse un parallèle entre l’action du Crefal et celle de l’évêque missionnaire Vasco de Quirogua, « ce saint personnage », envoyé par le roi d’Espagne, qui, « dev[enu] rapidement populaire sous le nom de « Tata Vasco », enseigna aux villageois différents métiers, un par village, et les Tarasques les pratiquent depuis lors ».
[65] M. Quéguiner, Education de base…, op. cit., p. 61-62 ; 6C/PRG/30, 3 juill. 1951 ; Unesco, 50 années …, op. cit., p. 95 ; Courrier de l’Unesco, fév. 1955, p. 16-26 : « ‘Los Unescos’. Les experts de l’Unesco », par D. Behrman ; EU, box 1562 : lettre confidentielle de R. À. Hurwitch au département d’état, 31 oct. 1957 ; 372/8/MP 01, I : lt. de Tor Gjesdal au DG, 8 fév. 1957.
[66] La santé au village, une expérience d’éducation visuelle en Chine, Paris, Unesco, 1952, 129 p.
[67] Maurice Quéguiner, Education de base…, op. cit., p. 13. Quéguiner est à cette époque conseiller ecclésiastique ; il devient dans les années 1960 supérieur général des Missions étrangeres de Paris (Veronese, carton 66 : lt. de J. Larnaud et François Russo à Pilar Bellosillo, 25 juill. 1966, 4 p.).
[68] Maurice Queguiner, Education de base…., op. cit., p. 93-94.
[69] Film La télévision au village, 16 mm, NB, vidéo, 23’ 40, produit par Télécinex pour l’Unesco, réalisé par Henry Cassirer, 1958.
[70] Ceux qui ne peuvent attendre. L’œuvre d’assistance technique de l’Unesco en Asie du sud-est, Paris, Unesco, 1952, 39 p., p. 22-23.
[71] Interview Lestage.
[72] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 299 : « frustrada por la especializacion excesiva de los representantos gubernamentales. […] El educador pretendia que todo se dedicase a la educacion. El artista y el literato, que todo se dedicase a la cultura. Y el sabio, que todo se eliminara, menos la ciencia ».
[73] EU, box 1601 : rapport hebdomadaire de K. Holland, 9 mars 1950 : « the DG permits too many projects to be undertaken and the secretariat is just swamped »; box 1600 : télégramme confidentiel de Kenneth Holland au département d’état, 27 janvier 1950, 4 p. : « I wish the DG would be more critical of new projects » ; IT, note pour le ministre, 18 août 1950, doc. cité, p. 2-3 : le gouvernement italien critique « la disperzione delle forze, […], il programme di eccessiva vastità e di scarsa praticità che nessuno riesce ancora a ridurre sufficientemente ».
[74] EU, box 1602, lettre confidentielle de M. DePalma à M. Abraham, 24 mars 1950 ; « basic philosophy ».
[75] PER/ST/8, discours cité, p. 3.
[76] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 57 : « demasiado abundante y demasiado disperso ».
[77] Ibid., p. 300 : « una lamentable antitesis » ; « siguen rutas distintas ».
[78] Discours de W. Laves, 13 avril 1950, discours cité, p. 9 : « the Organization can no longer vote its program without having a clearer understanding of what it wishes to accomplish and what are the best means for accomplishing that result. The program has been expanded not on the basis of deliberate choices but essentially by a process of accretion. This has been encouraged by special interests […]. But this is not the way in which a public, international organization with a purpose and with limited funds ought to be run ».
[79] Discours de Walter Laves, 13 avril 1950, doc. cit., p. 8 : « the program is lacking in realism » ; « determine more precisely the objectives they have in mind to be reached by Unesco’s program […]. With such a clarification the effectiveness of Unesco would be immeasurably increased ».
[80] W. Laves, « Unesco and the achievement of peace », art. cit. : « the obscurity of the constitution » ; « the uncertainty and lack of direction of the general conference » ; « vast number of activities lacking in precise orientation » ; « Unesco’s purpose has been obscured and confused by the constitution itself, which declares that the organization exists to contribute to peace and security through education, sciences, and culture, but then gives plausible (though not in my judgment adequate) justification for activities that merely promote education, sciences and culture for their own sake » ; « divided almost in the manner of a university curriculum into areas of knowlegde ».
[81] Ascher, box 149 : The formulation of Unesco programme, by Robert S. Smith, Harvard, 31 janv. 1949, 131 p., p. 115, 120-121 : « a unifying principle for Unesco ».
[82] ONU, RAG-2/76, box 11 : rapport de la délégation des Nations Unies sur la 4e session de la conférence générale, de Louis Gros à Dr. Sze, 7 nov. 1949, p. 2.
[83] Ascher, box 146 : lt. de Sharp à Ascher, 12 juin 1950 : « complicated program which only a few delegations understand ».
[84] ONU, RAG-2/76, box 11 : lettre de Gustavo Duran à H. Laugier, 7 juin 1950.
[85] RP, 19 mai 1953 : Revue de Paris, mai 1953 : article de P.-L. Bret.
[86] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 48 : « un equilibrio mejor de la inteligencia ».
[87] The Book of Needs (of 15 war-devastated countries in education, science and culture), I, Paris, Unesco, 1947, 111 p. ; vol II, 1949, 139 p.
[88] Comme la Politique d’Aristote, le Discours de la méthode de Descartes, et le Don Quichotte de Cervantes.
[89] Collectif, Autour de la nouvelle déclaration des droits de l’homme, Paris, Sagittaire, 1949. Y ont participé notamment Gandhi, Teilhard de Chardin, Aldous Huxley, Salvador de Madariaga.
[90] Courrier de l’Unesco, nov. 1951, p. 9 : « Un nouveau message d’amitié et de paix » : timbres sur l’ONU, l’Unicef et l’Unesco, de différents pays [annexe 13].
[91] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 252-255.
[92] CUA/28, 3 août 1951.
[93] Si elle publie en 1949, dans Autour de la nouvelle déclaration des droits de l’homme, un texte écrit quelques années auparavant et défendant explicitement les droits de l’Inde à l’indépendance, c’est que, justement, au moment de la publication de cet ouvrage, l’Inde a désormais acquis son indépendance. Autour de la nouvelle déclaration des droits de l’homme, op. cit., p. 162-165 : « La conception hindoue des droits de l’homme », par S.V. Puntambekar, 1947 : « Quant à nous, en Inde, nous voulons être libérés de la domination etrangère et de la guerre civile. La domination étrangere est néfaste. Notre pays en a souffert pendant des siècles. Nous devons la condamner, sous sa forme moderne comme sous sa forme ancienne. Notre pays doit être indépendant ».
[94] RU, FO 371/88919 : lettre de J. Chadwick à M. Ormerod, 14 avril 1950. À Montréal, à la réunion du Canadian Council for Reconstruction Through Unesco, en 1950, deux Colonial fellows du Commonwealth présentent des contributions.
[95] Tel Marcel Maquet, gouverneur du Congo belge et membre de la délégation belge à l’Unesco. Cf. RP/9/49, 22 mars 1949 : article de M. Maquet sur l’Unesco dans La revue coloniale belge, Bruxelles, 1er mars 1949.
[96] 408.01 : mémorandum confidentiel de Marcel Destombes, service des relations extérieures, au directeur général, 29 août 1951, 4 p., « Projet de rapport aux Nations Unies sur l’emploi des langues indigènes dans l’éducation » ; memorandum confidentiel de Marcel Destombes, service des relations extérieures, au directeur général, 6 septembre 1951, « Visite au Colonial Office, Londres, 30-31 août 1951 », 4 p. ; Memorandum de Marcel Destombes, 29 août 1951, doc. cité : il a rencontré M. Van Hove, directeur de l’éducation et des cultes, au ministère des colonies.
[97] 408.1 : mémorandum confidentiel de Maheu, ODG, à Blonay et Guiton, 10 septembre 1951, 5 p., « Rapport intérimaire sur l’emploi des langues vernaculaires dans l’enseignement », p. 4. Pour Maheu, « en aucun cas on ne saurait soumettre à un examen préalable de quelques Etats le texte d’un rapport où l’on prétend exprimer les vues de l’Organisation, surtout sur une question aussi délicate que celle qui fait l’objet du présent rapport et qui se prête si aisément à la controverse politique ».
[98] E. Delavenay, op. cit., p. 370.
[99] US National Commission for Unesco, Informal report of the US Delegation to the seventh session of the general conference of Unesco, november 12th-december 11th, 1952, 30 p., p. 5.
[100] PER/ST/8, 20 mai 1949, discours cité, p. 2-3 : « la tâche de l’Unesco est immense et ne peut être menée à bien en l’espace de quelques années ; ceux qui y travaillent actuellement ne sont que des précurseurs qui préparent l’Unesco de l’avenir » ; DG/166, 26 janvier 1952, discours cité, p. 3-4 : « les progrès sont lents - il serait vain de le dissimuler ».
[101] DG/35, discours cité, p. 1. Il souligne les « grandes difficultés que l’Unesco a rencontrées sur sa route » depuis sa création.
[102] DG/9/49, 11 avril 1949, discours cité, p. 2.
[103] Ibid.
[104] DG/35, discours cité, p. 3.
[105] DG/6/49, 21 février 1949, p. 3-4 ; PER/ST/8, 20 mai 1949, p. 2-3 ; « période critique de sa croissance ».
[106] DG/9/49, 11 avril 1949, p. 6.
[107] Ascher, box 146 : lt. de Sharp à Ascher, 12 juin 1950 : Torres Bodet est déçu et ennuyé de l’hésitation d’Alva Myrdal à décider si elle prend le poste de chef du département des sciences sociales ou non.
[108] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 159 : « tuve, a cada momento, la sensation de no estar realizando plenamente cuanto deseaba. Al final de cualquier esfuerzo, me encontraba a mi mismo, solo ».
[109] Ibid., p. 251 : « empresas que aparecian destinadas a la derrota » ; « lentitud ».
[110] M. Prévost, op. cit., p. 30. « J’ai depuis souvent pensé que son unique tort avait été de rêver trop tôt l’Unesco telle qu’elle devait être » ; DG/74/5, 20 mai 1974, p. 5 et 7 : Maheu a reproché à Torres Bodet la grande amertume que celui-ci a exprimé dans ses Mémoires au sujet de l’Unesco ; mais il comprend que « l’Unesco l’avait d’autant plus déçu qu’il l’avait ardemment, et je dirais farouchement, aimée. Il était évident qu’il en éprouvait une grande amertume ». « Peut-être est-ce notre civilisation qui l’a tué ». Et J. Huxley, Memories II, op. cit., p. 67.
[111] M.H. Holcroft, op. cit., p. 60-61 : « misgivings ».
[112] FR, NUOI carton 334 : note confidentielle du ministère des affaires étrangères, 27 mars 1953 ; il affirme qu’en 1952, le département d’état américain a reproché à Carneiro « d’avoir montré un manque de foi profonde dans le destin de l’Unesco ».
[113] RP/6/49, 2 mars 1949 : Opéra (Paris, 16 fév. 1949) contient un article de Gabriel Marcel, délégué français à la conférence générale de Beyrouth ; il souligne les « dangers […] évidents » qui menacent l’Unesco.
[114] Antonina Vallentin, « Paix. état de conscience », art. cit., p. 3-4.
[115] Ascher, box 145 : lt. de M. Montagnier à Ascher, 11 août 1950.
[116] Alfred Métraux, Pierre Verger, Le pied à l’étrier, correspondance, 12 mars 1946-5 avril 1963, Paris, éditions Jean-Michel Place, 1994, 309 p., p. 104-106.
[117] Ascher, box 145 : New York Times, 13 fév. 1950 : « Top US Aide Resigns Position with Unesco » ; Benton, box 388 : lt. confid. de Laves à Torres Bodet, 5 janv. 1950 ; lt. confid. de Torres Bodet à Laves, 7 janv. 1950.
[118] FR, NUOI carton 835 : document « très confidentiel », 17 juillet 1950 ; DG/195 ; ONU, RAG-2/76, box 11 : rapport des Nations Unies sur la 5e session de la conférence générale de l’Unesco, par Gustavo Duran, 21 juill. 1950, 16 p., p. 4 : « Après deux jours de séances secrètes des chefs de délégations pendant lesquels les affaires courantes de la conférence sont restées pratiquement en suspens, la crise créée par la démission du DG a été conjurée ».
[119] OHRO, interview de Luther Evans, p. 354-355 : démission de Torres Bodet en 1950 : « it didn’t seem to us to make sense. So we all got down on our knees and begged him to stay ».
[120] Benton, box 388 : télégramme de M. Reed, du département d’état, à Benton, 14 juin 1950 : « ill-considered, ill-timed » ; « this egoistical display of temper ».
[121] Ascher, box 146 : lt. de Walter Sharp à Ashcer, 28 juin 1950 : il évoque « the fantastic developments at Florence ». « the DG’s tour de force [...] left everyone gasping. His letter of resignation, which he at first insisted on publicizing, was apparently a « stinker ». John Maud is reported to have been infuriated by it. If it had not been for clever under-cover lobbying by the Latinos, aided by the French, the DG’s bluff might well have been called. At any rate, it will be the last time he can resort to such a manoeuvre with impunity ».
[122] Journal Métraux, 22 novembre 1952 ; 25 novembre 1952.
[123] Informal report of the US Delegation to the seventh session ..., doc. cit., p. 2 : « dramatic » ; « moments of great hope » ; « moments close to despair ».
[124] OHRO, interview de Luther Evans, p. 370 : « Torres Bodet realized that the underdeveloped countries had a majority against the big powers in budgetary matters » ; « a great affection » ; « admiration ».
[125] X 07.83 Torres Bodet, III : compte rendu de la visite du DG à Genève, par R. Maheu, 25-26 avril 1949, 8 p., p. 5-6.
[126] Trygve Lie, In the Cause of Peace. Seven Years with the United Nations, The Macmillan Company, New York, 1954, 473 p. ; chap. 22, p. 406-419 : « Resignation ».
[127] G. Archibald, op. cit., p. 154.
[128] Interview Deleon.
[129] « M. John W. Taylor est nommé DG adjoint de l’Unesco », Courrier de l’Unesco, décembre 1950. Article sur Taylor sur le site internet de Columbia University : de 1951 à 1954, il a planifié la création du CETA.
[130] Courrier de l’Unesco, déc. 1950 : « M. John W. Taylor est nommé DG adjoint de l’Unesco ». Site internet Columbia university, « John W. Taylor ». En prenant le poste de DG adjoint, il aurait dit : « J’ai l’impression que la position que j’ai le privilège d’occuper est celle pour laquelle je me suis préparée toute ma vie ».
[131] M. Prévost, op. cit., p. 29.
[132] Article « John W. Taylor » sur le site internet de Columbia University : de 1954 à 1971, il est directeur exécutif du CETA.
[133] OHRO, interview de Luther Evans, p. 229.
[134] E. Delavenay, op. cit., p. 373 ; G. Archibald, op. cit., p. 154-156.
[135] 2 XC/Résolutions et comptes rendus, 7e séance pléniere, 4 juillet 1953, p. 110-113. Cité par G. Archibald, op. cit., p. 158.
[136] Discours de W. Laves, 13 avril 1950, discours cité, p. 4 : il avait dit: « Many of these activities must be undertaken slowly. Their cumulative effect will be noted only gradually ». (« beaucoup de ces activités [de l’Unesco] doivent être entreprises lentement. Leur effet cumulé s’observera seulement peu à peu »).
[137] Journal Métraux, 10 août 1953.
[138] J. Huxley, Memories, II, op. cit., p. 68 : « practical-minded Texan character ».
[139] T.V. Sathyamurthy, « Twenty Years of Unesco : An Interpretation », International Organization, 21, n°3, 1967, p. 620 : « a true votary of functionalism, pure and simple ».
[140] E. Delavenay, op. cit., p. 373.
[141] Lien-Link n°82 : « Luther H. Evans, librarian et directeur général » par Gérard Bolla.
[142] Christiane Desroches-Noblecourt, La Grande Nubiade, ou le parcours d’une égyptologue, éditions Stock-Pernoud, 1992, Paris, 539 p., p. 130.
[143] Interview Keating.
[144] 34 EX/SR 1-4, 15 juin 1953, p. 19. Evans fait une proposition de résolution affirmant que l’Unesco « ne préconise pas un gouvernement mondial » ; mais le conseil exécutif décide de ne pas examiner ce projet de résolution.
[145] P. Lengyel, op. cit., p. 26.
[146] EU, box 1564 : commentaires des Etats-Unis sur le projet de programme et budget pour 1959-60.
[147] OHRO, interview de Luther Evans, p. 487, 492, 510.
[148] OHRO, interview de Luther Evans, p. 804 : « in serving in Unesco, I became increasingly aware of the tremendous importance of various parts of the world knowing about all the other peoples, cultures and civilizations ».
[149] OHRO, interview de Luther Evans, p. 510, 312.
[150] Leonard Cottrell, One Man’s Journey, 1955, London, Robert Hale, 263 p., p. 215.
[151] OHRO : interview d’Evans, p. 581-582 : « There’s a big temptation in a world audience like this dealing with very significant problems of the future of mankind to get up and make some very eloquent and hearttrending speeches, tear-jerking speeches, soaring to great eloquence and calling upon the leaders of countries to lead their people to a change of soul and heart, call upon the leaders to have some sense and have some humanity » ; my speeches to the general conference were down-to-earth, some people would say pedestrian, speeches about the improvement of Unesco and not about Unesco creating a world spirit of some kind that would dominate mankind » ; p. 629 : « I resisted temptations to unrealistic calls upon people for religious conversion in the interest of peace or making great orations about a new spirit of humanity must pervade all mankind in order that we might achieve peace. Instead of having a whole spirit in the House of high-falutin nonsense and emotional blabber, which is so common among people who suport the UN and the agencies, instead of letting that appeal to me, I took a pedestrian, realisitc, managerial stance and tried to focus attention on precisely what we proposed to do [...]. I think that emotional appeals to men must be made. My conviction, however, was that the head of Unesco was not the person to do it. Let the political leaders of the member countries do it. Let the Pope do it. Let the religious leaders all over the world do it. Let the intellectuals around the world do it. But the DG of Unesco is a manager of a small operation with big objectives and little money, where he is trying by good management to improve things ».
[152] Journal Métraux, 27 oct. 1955.
[153] XO7.21(44) NC, II : actes de la première conférence des commissions nationales européennes pour l’Unesco, Aix-en-Provence, 29 mai-2 juin 1956, 35 p., p. 6-7.
[154] Journal Métraux, 22 mars 1955.
[155] Gérard Bolla, article cité.
[156] « Vittorino Veronese, nouveau directeur général de l’Unesco », Courrier de l’Unesco, décembre 1958, p. 33. ODG/17, 1958. 125 EX/SR.1-28, p. 13 ; 10 C/NOM/29 : notice biographique de Veronese. Revue italienne Studium, n°6, 1993, Rome, p. 819-834 : « Vittorino Veronese e l’Unesco » par Maria Luisa Paronetto Valier, p. 820.
[157] 125 EX/SR.1-28, p. 13 ; 10 C/NOM/29 : notice biographique de Veronese.
[158] Courrier de l’Unesco, mai 1959, p. 25 : extrait de la conférence « La jeunesse face au monde d’aujourd’hui », par Veronese.
[159] Ascher, box 145 : New York Times, 6 déc. 1958 : « A Tweedy Intellectual. Dr. Vittorino Veronese. À man of many talents ». « European Intellectual » ; « to place more stress on the cultural and aesthetic aspects of Unesco » ; « On any college campus he would immediately be taken for a professor ».
[160] X 07.83 Veronese, II : Images, 6 fév. 1960, p. 3 à 6 : « Vittorino Veronese s’est fait le chantre des monuments de la Nubie », p. 3-4.
[161] L’Unità, 23 novembre 1958, cité dans la lettre de Gaston Palewski au ministre, du 26 novembre 1958. NUOI carton 836.
[162] Veronese, carton 23 : communiqué de presse n° 2159, Paris, 2 nov. 1961 : démission du directeur général de l’Unesco. 60 EX/Décisions : aceptation de la démission du directeur général et hommage à M. V. Veronese ; Chronique de l’Unesco, déc. 1961, vol. VII, n°12 : « La démission de M. Vittorino Veronese et la nomination de M. René Maheu au poste de DG p.i. », p. 439-444.
[163] Veronese, carton 23 : deux letttres de Veronese au président du conseil exécutif, Mohamed Awad (l’une publique, l’autre confidentielle), 14 oct. 1961.
[164] EU, box 823 : lt. de Dean Rusk à G. Shuster, non daté, 1961, p. 1-2.
[165] Gérard Bolla, article cité. Richard McKeon, « Communication and Community as Philosophy », Ethics, vol. 63, n°3, avril 1953, p. 190-206. Paola Ottolini, Per una politica internazionale per l’educazione ai diritti umani e alla pace : il ruolo educativo dell’Unesco, tesi di Laurea, Padoue, 1993, p. 115.
[166] RU, ED 157/32 : février 1955 : « A brief appraisal of the education programme of Unesco », 13 p. « Unesco’s task is to help others to help themselves : to act as a stimulant, pump-primer or catalyst. This strict limitation on Unesco’s function is not always well understood » ; X07.21(44)NC, II : actes de la première conférence des commissions nationales européennes pour l’Unesco, Aix-en-Provence, 29 mai-2 juin 1956, 35 p., p. 14-19 : rapport de M. Vandenborre.
[167] FR, NUOI carton 333 : note confidentielle de la direction des relations culturelles, RC.BOI.UN, au sujet de la 37e session du conseil exécutif de l’Unesco.
[168] EU, box 1566 : rapport confidentiel de Robert McBride à F.W. Jandrey, 21 octobre 1958, intitulé « Reasons why the US should support Dr. Vittorino Veronese for DG of Unesco » ; « a competent administrator » ; « faithful ally of the Western cause, is solidely backed by his government and by the Vatican. He has a conservative background » ; « he would not be liable to take an exclusively European view of intellectual problems. This should reassure those who consider Unesco tends to excessive cocentration on problems of European intellectuals ».
[169] Elhem Chniti, op. cit., p. 571.
[170] RFA, Bestand B 91, Referat 601, Band 16 : ambassade de RFA, rapport de K. Pfauter sur les sessions de la commission nationale indienne, 24 février 1956. Ibid. : « Glaring Gap in UN Practice and Profession. Azad’s Criticism in Unesco Body », Hindustan Times. Ibid. : « Unesco urged to help backward areas. Mr. Azad’s address to Indian Commission », et « Fund for publication of works of art. Maulana Azad’s appeal », in Times of India, 7 février 1956, p. 1 et 7. Ibid. : discours de M. Azad, 6 février 1956.
[171] OHRO, interview de Luther Evans, p. 411.
[172] Biogr. Guy de Lacharrière.
[173] Note RC.BOI.UN, doc. cité.
[174] NUOI 1946-1959, (S 50), carton n°333 : note confidentielle de la direction des relations culturelles (service des échanges culturels, BOI, service de l’Unesco), n°RC.BOI.UN, au sujet de la 37e session du conseil exécutif de l’Unesco, programme ‘rénové’.
[175] Veronese, carton 34 : discours du président de la commission nationale italienne pour accueillir Evans, 1953, 16 p., p. 14.
[176] E. Delavenay, op. cit., p. 373.
[177] Emile Delavenay, « Mes souvenirs de J. Thomas », article cité.
[178] Gérard Bolla, article cité.
[179] EU, box 1566 : lettre confidentielle de l’ambassade américaine à Paris au département d’état, 15 octobre 1958, 8 p., p. 3 : « His tendency to call a spade a spade, his rough and ready cantakerousness, his presumed disrespect for things « Cultural » with a capital C and his declared preoccupation with the needs of underdeveloped areas have produced considerable resentment and dislike among Western and Southern Europeans ».
[180] Journal Métraux.
[181] E. Delavenay, op. cit., p. 375.
[182] Ibid., p. 373. « Son français était adéquat mais sans nuances ».
[183] O. Felgine, op. cit., p. 366.
[184] 42 EX/38, annexe I : répartition par nationalité des membres du Secrétariat.
[185] X07.21(44)NC, II : « Séance plénière de la commission nationale française pour l’Unesco », 25 juin 1956, 70 p., p. 3.
[186] EU, box 1558 : « official report of joint Unesco-IBE conference on public education », Genève, 9-17 juillet 1956, 16 p., p. 15 : « the communications and ideas of the public education conference are flavored very strongly by the French language and french educational practice ».
[187] E. Delavenay, op. cit., p. 395.
[188] FR, NUOI carton 835, note du 16 septembre 1959.
[189] 2 XC/Résolutions et comptes rendus, 7e séance pléniere, 4 juillet 1953, p. 110. Cf. G. Archibald, op. cit., p. 158.
[190] EU, box 1558 : lettre de Russell Forrest Egner, the Religious Generations Foundation, 29 septembre 1956, à l’assistant secrétaire d’état, Francis Wilcox ; il a essayé de mettre en place un symposium de l’Unesco pour formuler une philosophie religieuse dans le but d’unifier les nations du monde. Egner affirme qu’Evans lui a dit : « the spiritual problem of the world must be solved ».
[191] Extrait d’un psaume ; cité dans F. Valderrama, op. cit., p. 126.
[192] Unesco and catholic collaboration, ..., p. 19-34 : « Unesco. Its Achievements and Projects », par C.J. Nuesse.
[193] J.-B. de Weck, « Pourquoi et comment je suis entré à l’Unesco », article cité : il évoque comme l’une des principales influences ayant déterminé son entrée à l’Unesco « le rôle des chrétiens, les pélerinages de Chartres et de Vézelay, dès 1945, pour la réconciliation franco-allemande ».
[194] Chef du centre de documentation sur l’éducation de l’Unesco. Cf. Leo Fernig, article cité, p. 2.
[195] Délégué permanent de l’Italie à l’Unesco de 1953 à 1963 ; cf. biogr. Pompei : 21 C/NOM/13, 23 mai 1980, CV de Pompei.
[196] Veronese, carton 23 : 10 C/VR.17 (secret), 22 novembre 1958, 24 p., p. 7-8.
[197] Protestant pratiquant, petit-fils de pasteur, très marqué par le mouvement des Eclaireurs auquel il adhère dès l’enfance et dont il deviendra président en 1960. Cf. André Zweyacker, « Louis François : 1904-2002 », sur le site internet de la FFCU (fédération française des clubs Unesco).
[198] 10 C/VR.17, doc. cité, p. 7-8.
[199] 372 (8) MP01 A 22, III : ED/159, 18 avril 1958. Il s’agit du R.P. Eduardo M. Gomez.
[200] Archives CCIC, doc. CCIC, « Aperçu sur la 11e conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1960 », p. 1-2 : le Saint-Siège était représenté à la 11e Conférence générale par une délégation présidée par Mgr. Bertoli, Nonce apostolique en France, et comprenant : Mgr Pedroni, Observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, le Révérend Père Russo, s.j. Conseiller Ecclésiastique du CCIC auprès de l’Unesco, M. J.A.A. Poncin, président des Enseignants catholiques des Pays-Bas et vice-président de l’UMEC, et M. Jean Larnaud, secrétaire général du Centre Catholique International de Coordination auprès de l’Unesco.
[201] Le Mois à l’Unesco, n° 23, août- sept. 1960, p. 7-8 : « Le R.P. Russo désigné comme conseiller ecclésiastique du CCIC-Unesco ».
[202] Le Mois de l’Unesco, n°24, janv.-fév. 1961, p. 5 : Pedroni travaillait ces dernières années auprès de la Secrétairerie d’Etat au Vatican dans la section chargée des organisations internationales catholiques.
[203] Le Mois de l’Unesco, n°24, janv.-fév. 1961, p. 34.
[204] Le Mois de l’Unesco, n°24, janv. fév. 1961, p. 44 : article « Congrès catholiques à l’Unesco » ; n°25, mars-avril 1961, p. 31.
[205] Archives du CCIC, doc. CCIC, aperçu sur la 11e conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1960 », p. 6-7.
[206] Souvenir de jean Thomas, op. cit., témoignage d’Antoine Pietri, p. 32-36 : Jean Thomas « se refusa nettement, alors que nous étions en philosophie, à participer à ces réunions dites « philosophiques », mais de caratère nettement confessionnel, que tenait le ‘cercle Montalembert’ qui tentait de réunir les élèves catholiques du lycée ».
[207] M.-L. Paronetto Valier, « Vittorino Veronese e l’Unesco », article cité.
[208] Interview Larnaud. M.-L. Paronetto Valier, article cité.
[209] Mgr. Bertoli, « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », discours cité, 15 nov. 1960.
[210] Interview Larnaud.
[211] Veronese carton 22 : lettre de félicitation de la nonciature apostolique en France, 28 novembre 1958.
[212] X 07.83 Veronese, II : Images, 6 fév. 1960, p. 3 à 6 : « Vittorino Veronese s’est fait le chantre des monuments de la Nubie », p. 3-4.
[213] RP, 16 nov. 1955 : l’Osservatore Romano (Vatican, 20 oct. 1955) note avec satisfaction la reception amicale accordée par l’Unesco au Père Domenico Milani, directeur du Centro Educazione Missionaria (CEM).
[214] Veronese carton 22 : lt. de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemain de son élection.
[215] Veronese, carton 22 : lettre de Veronese à André Ruszkowski (Office catholique international du cinéma), 19 décembre 1958.
[216] Veronese, carton 22 : lettre de Mgr. Carlo Bayer, secrétaire général de Caritas Internationalis, à Veronese, 28 novembre 1958.
[217] Veronese carton 25 : lette de Ramon Sugranyes de Franch, président de Pax Romana-MIIC (mouvement international des intellectuels catholiques) à Veronese, 12 septembre 1958 : il l’appelle : « mon cher Vittorino » et le tutoie, ce qui témoigne de leur proximité ; lettre de Veronese à Ramon Sugranyes de Franch, 18 octobre 1958.
[218] Veronese, carton 22 : de nombreuses associations catholiques nationales et internationales félicitent Veronese pour son élection.
[219] Ibid., lettre de J.M. Domenach, au nom de la revue Esprit, félicitant Veronese pour son élection, 5 décembre 1958.
[220] Ibid., 25 nov. 58 : lettre de félicitation du rédacteur en chef de La Croix, le révérend père Wenger.
[221] Ibid., lettre d’A. Vanistendael, secrétaire général de la Confédération internationale des syndicats chrétiens, felicitant Veronese, 4 décembre 1958.
[222] Ibid., lettre de Jean Larnaud à Veronese, non datée, au lendemain de son élection ; Veronese, carton 23 : lettre de Veronese à G.N. Shuster, 9 août 1961 : « Prions ensemble pour cette noble cause de l’Unesco ».
[223] Veronese carton 22 : lt. d’André Ruszkowski à Veronese, 23 nov. 1958.
[224] Ibid., lettre de Carlo Bayer à Veronese, 28 nov. 1958 : « dare all’Unesco quell’impronta che proviene dalla nostra Fede Christiana ».
[225] Ibid., lettre de Larnaud à Veronese, lettre citée.
[226] EU, box 1562 : lettre confidentielle de Robert A. Hurwitch, second secrétaire d’ambassade, au département d’état, 31 octobre 1957 : le projet Sutatenza de l’Unesco en Colombie est « a Catholic Church endeavour ».
[227] lettre de Larnaud à Veronese, lettre citée.
[228] Veronese, carton 22 : lt. de Veronese à André Ruszkowski, Rome, 19 décembre 1958 : « actuar con suma prudencia » ; « el ambiente de la Unesco y la desconfianza que inspiro a los miembros de los Estados de corriente materialista ».
[229] 11 C PRG/1, 12 août 1960, annexe I.
[230] Interview Jean Larnaud, 4 mars 2004.
[231] Hemptinne : manuscrit : « l’homme microscopique » par Pierre Auger. Etude critique et comentaires par Y. de Hemtinne. Cest un ouvrage de P. Auger. Commentaires de Hemptinne, 28 juill. 1954.
[232] RP/3/49, 17 avril 1953 : Etudes, « Unesco et éducation de base » par Maurice Quéguiner, membre du CCIC.
[233] Ex : Le Mois à l’Unesco, déc. 1959, p. 33 : « Les catholiques et les objectifs de l’Unesco », p. 41-42 : « Du 2 au 8 janv. prochain, Pax Romana organisera sous les auspices de l’Unesco une réunion concernant l’influence des grandes religions dans la vie actuelle des peuples en Orient et en Occident », à Manille, p. 50 : « Du 29 sept. au 2 oct. s’est tenue à Denver dans le Colorado la VIIe conférence nationale des Etats-Unis pour l’Unesco. […] M. J. Peter Grace, un catholique bien connu, a déclaré au cours d’une intervention fort remarquée que l’Unesco devrait coopérer plus étroitement avec l’Eglise en Amérique latine. Il a souligné « qu’un programme éducatif et culturel en Amérique latine qui négligerait les riches traditions de la vie spirituelle de ce continent serait inefficace, stérile et sans doute inacceptable pour ces peuples » ».
[234] Le Mois à l’Unesco, n°22, mai-juin 1960, p. 51.
[235] Le Mois à l’Unesco, n°22, mai-juin 1960, p. 52-53 : « La JOC internationale à l’Unesco ».
[236] Ex. : n°4, vol. I d’août 1959 du bulletin Orient-Occident, qui contient tout un paragraphe sur les religions ; 3 A 31 Manuals on Cultural Integration of Immigrants, II : doc. « L’intégration culturelle des immigrants », par le RP Fernando Bastos de Avila, SJ, et Manuel Diegos, 26 juill. 1957, 40 p.
[237] OHRO, interview d’Evans, p. 679-680 : « there was a strong move to have a catholic DG. Huxley had been regarded by some as an anti-Christ. He really wasn’t, but he had that reputation. Torres Bodet was a Mexican and hence a Catholic pro forma, but they regarded him as unsatisfactory on the Catholic front as they did a Protestant. And I was Methodist and they didn’t like that ».
[238] 372 (8) MP01 A 22, I : mémoire de R. Maheu, sans titre, 45 p., p. 37.
[239] X 07.83 Maheu, IIa : lt. de Jacques Havet à N. Lund, MC ; 28 juin 1960.
[240] EU, box 820 : Vadim Zagladine, « A l’Unesco », in Temps Nouveaux (Moscou), 3 juin 1960, 6 p., p. 6.
[241] Interview Larnaud.
[242] RU, ED 157/32 : « A brief appraisal of the education programme of Unesco », février 1955, 13 p. « This springs from the different, and to some extent opposite interests of the highly developed and underdeveloped countries ».
[243] Ainsi l’Indien Maulana Azad s’efforce de faire correspondre l’esprit de l’Unesco avec l’enseignement de Panch Shila Jiya Lal Jain, secrétaire général de la United Schools Organization (USO) of India (Unesco in schools, 1964, New Delhi, USO Book agency, 64 p. p. 57).
[244] Il est d’ailleurs membre du comité de direction de l’Institut italien pour l’Afrique. Cf. « Vittorino Veronese, nouveau DG de l’Unesco », in Courrier de l’Unesco, décembre 1958, p. 33. ODG/17, 1958, « le Dr. Veronese est présent à l’Unesco depuis que l’Organisation a ouvert à l’Italie la voie des Nations Unies ». Conseil exécutif, 125 EX/SR.1-28, p. 13. 10 C/NOM/29 : notice biographique de Veronese. M.L. Paronetto Valier, article cité. EU, box 1566 : lettre confidentielle de Robert McBride à F.W. Jandrey, 21 octobre 1958 : « Reasons why the US should support Dr. Vittorino Veronese for DG of Unesco ».
[245] E. Delavenay, op. cit., p. 375.
[246] RU, FO 371/117530 : UN department, memorandum de H.F. Bartlett, 14 mars 1955.
[247] RU, FO 371/117530 : The policy of H.M.G. towards Unesco, minutes of meeting held at the Foreign Office on 4 avril 1955.
[248] CUA/55, 29 octobre 1953, 4 p., p. 1.
[249] OHRO, interview de Luther Evans, p. 475-476.
[250] Ascher, box 145 : New York Times, 6 déc. 1958 : « Italian Inducted as Unesco’s Chief ».
[251] Journal Métraux, 30 sept. 1954.
[252] E. Delavenay, « Mes souvenirs de Jean Thomas », article cité. L’Unesco est dans les années 1950 « une Maison où beaucoup aspirent à régner sur des idées mais ne parviennent guère à concrétiser des aspirations, ou même des velléités ».
[253] Reinhold Niebuhr, « The Theory and Practice of Unesco », in International Organization, vol. IV, 1950, p. 3-11, p. 6. Il rappelle que quelques-uns des plus terribles conflits de l’histoire se sont déroulés entre peuples voisins qui se connaissaient bien.
[254] W. Laves et Ch. Thomson, op. cit., p. 276 et suiv.
[255] Jacques Havet, « Une tâche passionnante », in Nouvelles du Secrétariat, mars 1957, p. 16.
[256] Chantal Morelle et Pierre Jacob, Henri Laugier. Un esprit sans frontières, Bruylant, LGDJ, 1997, 412 p., p. 309 et 312. Il se dit clairement « en désaccord sur la politique qui oriente l’Unesco », dans sa communication à la réunion des commissions nationales européennes de l’Unesco, en 1956, p. 282, 310.
[257] P. de Berrêdo Carneiro, Vers un nouvel humanisme, Paris, Seghers, 1970, 335 p., p. 239-241.
[258] Alfred de Grazia, « The World Intelligentsia and Unesco », in American Behavioral Scientist, 4 janvier 1961, p. 3. Cité par J. Sewell, op. cit., p. 205, et par G. Archibald, op. cit., p. 277.
[259] Interview P. Koffler.
[260] DG/58, discours de L. Evans, « L’Unesco et les forces de l’avenir », 11 octobre 1958, p. 1 ; Lien-Link n°83 : « Exercice d’admiration filiale. Le dialogue posthume de deux écrivains combattants, Jean et Michel Prévost, père et fils », par E.R. (ancien fonctionnaire n’ayant donné que ses initiales) : « les interminables couloirs de l’Y futuriste de la place Fontenoy ». Cf. aussi Emmanuel Devouge-Lamielle : Ville et culture : analyse du discours suscité par la création du siège de l’Unesco à Paris, Paris, thèse, 1975.
[261] DG/212, Paris, 5 déc. 1958 : discours de Veronese lors de son installation, p. 5.
[262] EU, box 4247 : Vittorino Veronese, « L’Unesco face aux problèmes d’aujourd’hui », Rome, 8 mai 1961.
[263] Jean-Baptiste de Weck, article cité. Il mentionne comme influence déterminante pour son entrée à l’Unesco en 1950 sa participation dès 1946 comme ouvrier au village Pestalozzi pour les enfants orphelins de guerre, à Trogen, en Suisse.
[264] J.-B. de Weck, article cité. Il mentionne son engagement dans l’Union fédéraliste interuniversitaire (UFI).
[265] Ibid. Interview Hemptinne : Yvan de Hemptinne, belge, entre à l’Unesco en 1954.
[266] Lien-Link n°85 : nécrologie de Paul Lengrand par Pierre Henquet : la femme de Lengrand, Lucienne Lengrand, avait travaillé pour l’Unesco avant son mari, à la division de la jeunesse ; elle a comme lui travaillé à l’association « Peuple et culture ».
[267] Lien-Link n°83 : « De Bucarest à Abidjan : un itinéraire atypique », par E.R. Arrivé de Bucarest à Paris en 1957, ayant fui la Roumanie socialiste, il fait divers petits métiers à Paris, puis rencontre à Saint-Germain-des-Prés un jeune administrateur américain qui l’invite à rejoindre l’Unesco.
[268] 12 C/INF/12, 16 novembre 1962 : discours de Maheu lors de son entrée en fonctions, p. 3 : il évoque « le souvenir de mes grands-parents paternels avec qui s’est écoulée mon enfance et qui étaient illettrés. Ils ne savaient ni lire ni écrire ». Biogr. Maheu, notice biographique « R. Maheu ».
[269] E. Delavenay, « René Maheu, cinquante ans de souvenirs », in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 59-62., p. 59.
[270] Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée, p. 436-439, cité par E. Delavenay, « René Maheu, cinquante ans de souvenirs », article cité, p. 59. C’est Maheu qui a fait connaître Sartre à Beauvoir, cousine de sa femme.
[271] J.-P. Sartre, Les Mots, Paris, Gallimard, 1963, p. 162-164. « Nizan et Maheu savaient qu’ils feraient l’objet d’une agression sauvage, qu’on les arracherait au monde tout vifs, pleins de sang ».
[272] Journée d’hommage à René Maheu, Cahier I, op. cit., p. 17-20 : article de Jean Musitelli.
[273] Ibid., p. 62-75 : article de Jean Maheu : « Son fils et sa petite-fille se souviennent ».
[274] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit. Mirèse Akar, interview de Maheu, L’Orient-Le Jour, 6-12 janvier 1973, doc. cité, p. 13.
[275] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit.
[276] Ibid., article de J.-B. de Weck, p. 70 : « Il était l’ami de toutes les cultures, il respectait les valeurs spirituelles et religieuses ».
[277] « L’homme est un être des lointains. Il tend constamment à l’horizon de lui-même ». Discours de R. Maheu, 4 novembre 1966, en séance plénière de la conférence générale. Cf. aussi Alberto Wagner de Reyna (délégué permanent du Pérou auprès de l’Unesco), Idée et historicité de l’Unesco, Paris, Unesco, 1968, p. 21 : il faut « penser l’Unesco à la lumière d’Aristote ». « En plein accord avec Aristote, l’Unesco fait naître la paix extérieure de la paix intérieure ou éthique ».
[278] RP, 14 sept. 1962 : Le Monde, Le Figaro, L’Aurore, Le Parisien libéré, France soir, Paris Presse.
[279] 12 C/INF/12, 16 novembre 1962, doc. cité, p. 1.
[280] Journée d’hommage à René Maheu, Cahier II, op. cit., p. 91-95 : Ricardo Diez-Hochleitner, « La passion de l’action ». Il cite des paroles que Maheu lui a dites.
[281] Encyclopedia Universalis, 1976, p. 503-504 : article « René Maheu » par Jean Thomas.
[282] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 14.
[283] Interview radiophonique de René Maheu, France Culture, 22 janvier 1974. INA.
[284] Jean Maheu, « Son fils et sa petite fille se souviennent », article cité.
[285] Discours de Maheu le 13 nov. 1964, sur Shakespeare. Cité dans : Journée d’hommage à René Maheu, Cahier I, op. cit., p. 62-75 : Jean Maheu : « Son fils et sa petite-fille se souviennent ».
[286] Biogr. Maheu, allocution de Maheu au personnel, 14 novembre 1974 ; « ces convictions se sont renforcées, n’ont cessé de se renforcer tout au long de ces années ».
[287] R. Maheu, « Le cardinal Daniélou et l’Unesco », Revue des deux mondes, juillet 1974.
[288] ODG/DG/699/2203, 22 mars 1971 : allocution de Maheu à l’ouverture du cycle de conférences sur la question raciale et la pensée moderne.
[289] Interview de Maheu par Mirèse Akar, doc. cité, p. 14.
[290] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., texte de M. Barbey, p. 4. « L’Unesco a contribué directement à la formation de sa personnalité et c’est elle qui a inspiré sa vocation ».
[291] Discours de William Benton, en novembre 1963 à Chicago, à une conférence de la commission nationale américaine (cité dans Congrès, vol. 109, 88e congrès, 1e session, 9 janv.-30 déc. 1963 : 4 déc. 1963, Senate, p. 23225-23226 : « Report on recent Unesco developments » : M. Ribicoff, Connecticut). Dans ce discours, Benton rapporte que Maheu lui aurait dit : « little by little, I have merged my life with that of the organization ».
[292] René Maheu, La civilisation de l’universel, Paris, R. Laffont, 1966, p. 24.
[293] Interview de Maheu par Mirèse Akar, doc. cité, p. 13.
[294] Jean Maheu, « René Maheu, la pensée en action », in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 11-19.
[295] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 47. Interview Bolla.
[296] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 51.
[297] S. Dimitrescu, « Autorité et ouverture d’esprit », in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 87-90, p. 87.
[298] Ibid., p. 84.
[299] André Chakour, « Finance et confiance », René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 55-56.
[300] J. Torres Bodet, Memorias III, op. cit., p. 18 : « René Maheu, en quien sempre adverti una aspiracion de justicia internacional y un noble deseo de colocar los ideales de la Unesco por encima de las ambiciones nacionalistas ».
[301] Interview Larnaud.
[302] interview Deleon.
[303] J. Huxley, Memories II, op. cit., p. 67 : Maheu : « a brilliant and indefatigable Frenchman, deeply interested in every aspect of Unesco’s many sided programme ».
[304] RU, PREM 11/5185 : « Visit of Maheu, record of meeting with Prime Minister », 10 avril 1964, note confidentielle intitulée : « considerable intellectual gifts. He has a ready grasp of complex problems and situations, and the ability to present his ideas lucidly » ; « his characteristically French intellectual gifts » ; « a genuinely international civil servant ».
[305] Encyclopedia Universalis, 1976, p. 503-504 : article « René Maheu », par Jean Thomas.
[306] Le Figaro, 15 nov. 1974, article « Un Africain à la tête de l’Unesco. Amadou M’Bow : de la cause du petit paysan ouolof au Palais dela Culture », article de Jean d’Ormesson.
[307] 77 EX/PRIV/SR.1 (prov.), 16 avril 1968, p. 4-5. Propos de Barbey.
[308] Ibid. Propos de Wagner de Reyna.
[309] Ibid., p. 4, Barbey.
[310] Ibid., p. 5, Carneiro.
[311] Ibid., Hampâté Bâ, p. 5.
[312] Ibid., Barbey, p. 4.
[313] Décision adoptée par acclamation, le 8 octobre 1974, à la 95e session du conseil exécutif.
[314] Le prix René Maheu de la fonction publique internationale a pour but de « promouvoir le prestige de la fonction publique internationale au service de la coopération internationale, conformément à l’esprit de la Charte des Nations Unies et de l’Acte constitutif de l’Unesco ». (Association du personnel, STA/74/66, 14 octobre 1974).
[315] Maheu, « Faut-il envoyer des casques bleus au Liban ? », Le Monde, 21-22 décembre 1975, p. 21.
[316] Jean Maheu, « Son fils et sa petite-fille se souviennent », article cité.
[317] W. Preston, Hope and Folly. The US and Unesco, 1945-85, Minneapolis, University of Minnesota Press, 1989, p. 89.
[318] Interviews Foecke, Grinda, Tocatlian, Hemptinne. Grinda : « Maheu avait une grande ambition pour l’Unesco. Il était très rigoureux. Il était imprégné de l’idéal de l’Unesco. Il avait une réelle vision de l’Unesco, ce que les autres directeurs généraux n’ont pas eu par la suite ». R. Diez-Hochleitner, « La passion de l’action », in Journée d’hommage à René Maheu, Cahier II, op. cit., p. 91-95 : il évoque « l’attachement indéfectible porté par les ‘anciens’ ». Jean-Baptiste de Weck, « En pensant à René Maheu, mon directeur général », in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 69-70 : « René Maheu a dirigé l’Unesco lorsque le monde croyait encore à la cause universelle de la paix par l’éducation, la science et la culture. Il dirigeait une équipe qui était forte de cette certitude ». E.R., « De Bucarest à Abidjan », article cité : il travaille « au sein d’une merveilleuse équipe qui prenait très à cœur les idéaux de l’Organisation. Parmi eux l’éminent pédagogue, homme des Sciences de l’éducation hors pair, le docteur A.V. Baez, le physicien Nahum Joël, le mathématicien hongrois G. Soos, le chimiste Robert Maybury, tant d’autres encore ».
[319] EU, box 823 : lettre confidentielle de George N. Shuster à Dean Rusk, 23 juin 1961, 3 p. : « in almost startling fashion » ; « It [Unesco] is today unquestionably one of the great educational agencies of the world » ; « I think the organization will carry on somehow, simply because it must do so. There is no imaginable substitute for it ».
[320] Article d’Acher Deleon, p. 63-64, in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit.
[321] Lien-Link n°78 : courrier du P.R. Rakotomalala : « L'Unesco a connu son âge d'or avec Maheu secondé par Adiseshiah ».
[322] Interview Larnaud.
[323] Lien-Link n°83 : « Sandy Koffler. Un battant », par René Caloz. Cf. aussi interview Rex et Elise Keating.
[324] P. Lengyel, op. cit., p. 52. « The organization was at its zenith » ; « an outstanding reputation ».
[325] Interview Foecke.
[326] Esther Dartigue, op. cit., p. 119, au sujet du personnel de la division de l’Amérique latine.
[327] Jean-Baptiste de Weck, « En pensant à René Maheu, mon directeur général », in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 69-70.
[328] Henry Cassirer, Un siècle de combat ..., op. cit., p. 166.
[329] OHRO, interview d’Evans, p. 630-632. « I see a very great future for Unesco » ; « a greater and greater contribution ».
[330] John Fobes, « La fonction publique internationale », in Journée d’hommage à René Maheu, Cahier I, op. cit., p. 30-33.
[331] Lien-Link n°82 : « Entrer à l’Unesco comme entrer en religion ? », par Zacharie Zachariev.
[332] Lien-Link n°84 : article de Nino Chiappano, « Le fonctionnaire international et ses dilemmes ».
[333] Article d’Acher Deleon, in René Maheu. Portrait-souvenir par ses collaborateurs, op. cit., p. 63-64.
[334] Interview Tocatlian.
[335] Lien-Link n°85 : article « Paris, avril 1968 », par Jacques L. Boisson.
[336] Interview Grinda.
[337] Lien-Link n°83 : « La deuxième génération de stagiaires », par Anne Willings Grinda
[338] Lien-Link n°83 : nécrologie d’Yvan de Hemptinne, par Michel Batisse : « Travailleur acharné, il avait un sens particulièrement intransigeant du service public. Son courage et sa droiture étaient sans faille ». Interview Hemptinne.
[339] Interview P. Koffler : cette équipe mangeait à la même table, qui réunissait « les hommes les plus inspirés intellectuellement de l’Unesco » ; Lien-Link n°83 : « Sandy Koffler. Un battant », par René Caloz : « véritable fièvre de travail » ; Koffler était « accablé de travail » ; « en toute chose, il ne se satisfaisait qu’avec la qualité optimale. Il vouait à cette exigence toute son énergie, tout son temps. Aucun détail ne lui paraissait négligeable. Devant la difficulté, il fonçait avec talent et fougue » ; « la loyauté de Sandy à l’égard de l’Unesco, des Nations Unies et de leurs idéaux était évidente et inébranlable ».
[340] Biogr. Akihiro Chiba : Nostalgia for the Place de Fontenoy, Bangkok, non daté, non paginé, recueil de poèmes. A. Chiba rédige ce recueil en 1991 au moment où il part à la retraite après trente ans de service à l’Unesco. « Nostalgia for the place de Fontenoy » : « Here came a man/To the place de Fontenoy/On a bright sunny day of May 61/Young and full of passion/Starting with commitment/The mission he has chosen/As a lifetime vocation ». « Spirit of Sofia » : « Unesco was a precious sign of hope/For those who stood up at the ruin of devastation/And destruction,/40 years ago, for world reconstruction/Unesco has been a noble symbol for universality and solidarity/For those who believe in mutual advancement and progress/Trough intellectual cooperation ».
[341] M. Prévost, op. cit., p. 56, 58-59.
[342] RU, ED 121/1163 : confidential, record of conversation between the minister of state, M. Peter Thomas, and the DG of Unesco, M. Maheu, at the Foreign Office on april 13, 1964.
[343] Lien-Link n°85 : nécrologie de Paul Lengrand par Pierre Henquet : Lengrand a pris sa retraite en 1970, mais a continué apres cette date à entreprendre des missions pour l’Unesco.
[344] Pour la somme symbolique d’un dollar par an. Interview Pauvert. Il a lui même travaillé vingt ans bénévolement pour l’Unesco apres sa retraite. Interview Batisse : Batisse a continué lui aussi à travailler bénévolement pour l’Unesco.
[345] Interview Mme Koffler.
[346] 17 C/VR.5, 22.11 : intervention de Pablo Neruda.
[347] Report of the US delegation to the 17th session of the general conference, doc. cit., p. 4 : chap. 2, « US Stake in Unesco » : « through cooperation in matters of the intellect, an international community of free people ».
[348] Interview Larnaud.
[349] Collectif, Organisations internationales à vocation universelle, op. cit., p. 39.
[350] P. Jones, op. cit., p. 88-89.
[351] Le Monde, 15 nov. 1974, p. 38 : « Unesco. Après douze ans de mandat. M. René Maheu quitte la direction générale de l’organisation », par Jean-Pierre Clerc ; sous-titre : « Un intellectuel aux avant-postes de l’histoire ».
[352] J.-B. Duroselle, Histoire diplomatique de 1919 à nos jours, p. 623-625.
[353] Yves Brunswick, op. cit., définit le développement comme « un processus de progrès et de transformation des sociétés, qui résulte d’une combinaison de changements techniques, sociaux, mentaux d’une population, qui la rendent apte à faire croître, cumulativement et durablement, son produit réel global ».
[354] L. Dollot, op. cit., p. 105.
[355] P. Gerbet, op. cit., p. 481.
[356] D. Colard, op. cit., p. 110 ; Mohammed Bedjaoui, « Un point de vue du Tiers Monde sur l’organisation internationale », art. cité, p. 246.
[357] D. Colard, op. cit., p. 259 ; Jean-Pierre Biondi, Les anticolonialistes, 1881-1962, Paris, Robert Laffont, 1992, 388 p. (notamment la 4e partie : « De l’anticolonialisme au tiers mondisme, 1945-1962, p. 241-343).
[358] Il est significatif de constater le grand nombre de recherches universitaires portant sur l’action de l’Unesco en Afrique (voir bibliographie). Pierre Gerbet, « Les nouveaux Etats et les organisations internationales », in Les nouveaux Etats dans les relations internationales, Paris, Colin, Cahiers de la Fondation nationale des sciences politiques, n° 121, 1962, p. 469-471. Louis Dollot, op. cit., p. 108. Interview Deleon.
[359] H. Nafaa, L’Egypte et l’Unesco, p. 630.
[360] Louis Dollot, op. cit., p. 108. Pierre Gerbet, « Les nouveaux Etats et les organisations internationales », art. cit.
[361] Unesco in a decisive decade, US National Commission for Unesco, 51 p., 1964, p. 2.
[362] ONU A/1708 (XVI), et 1710 ; 12 C/Res.8.1, 14 C/Res.9.1-2, 16C/Res.9.1.
[363] « More self-examination of Unesco’s role in development took place in the years 1960-62 than in all the years after 1946 » (John Fobes, « Unesco, management of an international institution. Facilitating and understanding economic and social change », in R.S. Jordan (éd.), Multinational cooperation : economic, social and scientific development, Oxford University Press, New York, 1972, p. 110-150, p. 113, cité dans P. Jones, op. cit., p. 110).
[364] Benton, box 397 : New York Times, 23 oct. 1963 : « Foreign Affairs. The appetite of slavery », par C.L. Sulzenberger.
[365] Benton, box 397 : mémorandum confid. de Mrs. Smythe à Benton, 12 nov. 1964 : évoque le livre Patron de New York par Bernard Dadie, aux éditions Présence africaine.
[366] P. Jones, op. cit., p. 110.
[367] P. Jones, op. cit., p. 101.
[368] M. Prévost, op. cit., p. 43. Biogr. Adiseshiah. Né en 1910 en Inde, il étudie l’économie, la banque et les flux monétaires à Madras, puis à la London School of Economics et à Cambridge. Enseignant à l’Université de Calcutta, puis directeur du Département d’Economie de l’Université de Madras, il travaille à l’Unesco de 1948 à 1970. Lien-Link n°78 : « René Maheu : A real man for all seasons » par Erwin Solomon : « Malcolm Adiseshiah – another extraordinary person ».
[369] « L’Unesco se propose de donner une nouvelle orientation à son action, déclare au Monde M. René Maheu », propos recueillis par J.-Cl. Berry, Le Monde, 21 août 1963, p. 1-2.
[370] M. Prévost, op. cit., p. 43 ; interview Balandier.
[371] Sandra Bigliani, Ingresso dei paesi del terzo mondo nell’Unesco e nuovi caratteri dell’Organizzazione.
[372] M. Prévost, op. cit., p. 86-87 : « Dans le hall des conférences, les complets vestons croisaient désormais les boubous de toutes les couleurs » ; conférence générale de 1960, 11 C/19, 6.1, annexe 2.
[373] P. Gerbet, op. cit., p. 55.
[374] Archives du CCIC, doc. CCIC, Aperçu sur la 11e conférence générale de l’Unesco, 14 nov.-15 déc. 1960 ». p. 13.
[375] Conférence générale de 1962.
[376] R. Maheu, op. cit., p. 258-272 : discours de Maheu, 7 juillet 1966, devant le Conseil économique et social.
[377] DG/67/4 : déclaration de Maheu, 12 juillet 1967, devant le Conseil economique et social, p. 5.
[378] cité dans F. Valderrama, op. cit., p. 145.
[379] « Unesco has a critical role to play in bringing the educational techniques of the developed world to the newly emerging nations of man’s family » (discours de Johnson n° 3741, cité dans : Congrès, vol. 112, 89e congrès, 2e session, 10 janv.-22 oct. 1965 : 21 octobre 1966, House, p. 28705-28706).
[380] William Benton, « The Defenses of Peace : Progress Report on Unesco », Saturday Review, 7 mars 1964 : « a swing of 180 degrees » (cité dans : Congrès, Vol. 110, 88e congres, 2e session, 18 mars 1964, Senate, p. 5646-5649).
[381] Rapport de William Benton en novembre 1963 à Chicago, à une conférence organisée par la commission nationale américaine. (Cité dans Congrès, Vol. 109, 88e congrès, 1e session, 4 décembre 1963, Senate, p. 23225-23226). Et en avril 1964, Eugene Sochor, assistant directeur de la commission nationale américaine, affirme : « Notre mission en tant qu’Américains coïncide avec celle de l’Unesco. Nous recherchons l’amélioration éducative et sociale dans le monde » (« Our mission as Americans coincides with that of Unesco. We seek educational and social betterment throughout the world » ; Eugene Sochor, « A New Look at Unesco », cité dans : Congrès, Vol. 110, 88e congrès, 2e session, 8 avril 1964, Senate, p. 7273-7275).
[382] EU, LAB 13/2566 : « Confidential report of the working group on Unesco », par Barbara Castle, minister of overseas development, 42 p., p. 5 : « The full realisation of Unesco’s objectives is not possible when poverty is so widespread and opportunities for education, science and culture are limited to so few countries. It is, therefore, right that Unesco should give a high degree of priority to development » ; p. 7 : « a catalyst and a clearing house for the intellectual world ». E. Chniti, op. cit., p. 681 : en 1964, le traitement des affaires de l’Unesco par le gouvernement britannique est transféré vers le nouveau ministère de la coopération ; ce changement est significatif de la conception de l’Unesco par le Royaume-Uni, comme étant essentiellement une agence d’aide au développement.
[383] X 07 A 120/197 UNSA : commentaires de la délégation allemande à la 70e session du conseil exécutif sur le futur programme et budget, 3 p., p. 1. L’Unesco devrait insister davantage « sur l’aspect moral et éthique des activités poursuivies » ; Commentaires de la commission nationale italienne sur le programme et budget 1967-68, 17 p., p. 1-2 : elle incite l’Unesco à mettre l’accent sur les « idéaux éthiques, sous peine de descendre à un pur technicisme » ; observations et commentaires du gouvernement français sur l’avant-projet condensé de programme et de budget pour 1967-68, 27 p., p. 8-10.
[384] XO7.21(44)NC, III : Commission nationale française pour l’Unesco, « Suggestions de caractère général concernant les programmes futurs de l’Unesco », juin 1961, 18 p., p. 15.
[385] X 07.83 Lengrand, I : « Projet de déclaration sur les relations avec l’Unesco et la collaboration envisagée avec le CIC », par le directeur de l’enseignement et des affaires culturelles et scientifiques, mars 1966.
[386] Commission nationale française pour l’Unesco, « Suggestions de caractère général concernant les programmes futurs de l’Unesco », juin 1961, doc. cité, p. 15 ; FR, NUOI carton 836 : note pour la Direction des affaires politiques, 27 février 1962, n°518 ACT/2/0 ; et : XO7.21(44)NC, IV : « Commentaires et propositions du gouvernement français au programme et budget de l’Unesco pour 1965-66 », 25 juin 1963, 14 p.
[387] « Commentaires et propositions du gouvernement français au programme et budget de l’Unesco pour 1965-66 », 25 juin 1963, doc. cité, p. 2-4 et 11.
[388] XO7.21(44)NC, III : « Point de vue de la France sur les orientations de l’Unesco. Commission nationale, stage préparatoire à la conférence générale », 3 novembre 1960, p. 3.
[389] Commentaires de la commission nationale italienne sur le programme et budget 1967-68, doc. cité, p. 9-10. L’Italie exhorte à ne pas « diminuer le poids concret et la place précise que les activités culturelles ont au sein de l’Unesco ».
[390] L. Dollot, op. cit., p. 105.
[391] EU, box 821 : lettre de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 8 novembre 1960 : « betraying its original mission of pursuing the great objectives of peace and international understanding common to all member nations, by progressively becoming an international relief agency for the cultural have-nots ».
[392] Rapport de la conférence annuelle de la commission nationale américaine, 26-28 avril 1962, par Philip Coombs, (cité dans Congrès, Vol. 108, 87e congrès, 2e session, 17 mai 1962, Senate, p. 8729-8730) ; Unesco in a decisive decade, p. 2-3 : « La commission nationale américaine est consciente du danger que l’Unesco devienne simplement une autre agence d’aide » (« The US National Commission is aware of the danger that Unesco may become merely another aid agency »).
[393] X 07 A 120/197 UNSA : « US Government Comments and Recommendations on Unesco’s program and Budget for 1967-1968 », 31 mai 1965, 11 p., p. 10.
[394] Interview de Maheu par Mirèse Akar, 1973, doc. cité, p. 15.
[395] EU, box 3213 : 15 USGC/21/1, « Coopération with the UNDP », 3 p.
[396] EU, box 3212 : « Report of the US delegation to the 77th session of the executive board », par W. Benton, novembre 1967, 15 p., p. 14-15 : « most satisfactory » ; « demonstrates that Unesco has perhaps come of age » ; « Unesco : the dream comes of age » ; « Unesco has come of age as an agency providing development assistance to an emerging new world in the fields of education, sciences, culture » (« l’Unesco est arrivée à maturité en tant qu’agence fournissant une assistance au développement au nouveau monde émergent ») ; box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 décembre 1970, 56 p., p. 9-10. « Unesco has established a number of education enters and institutes throughout the world to decentralize its work, a practice which the US government has consistently favored ».
[397] FR, NUOI carton 836 : rapport de Jean-Fernand Laurent sur la 83e session du conseil exécutif, 24 octobre 1969.
[398] OHRO, interview Evans, p. 703 : « Mr. Aid to Member States and Mr. Technical Assistance » ; « a brilliant job », p. 707.
[399] OHRO, interview de Luther Evans, p. 561-562.
[400] Benton, box 396 : lt. de Benton à Robert Wade, 8 nov. 1965.
[401] Benton, box 394 : memo confid. de Robert H.B. Wade à Benton, 22 mai 1967.
[402] FR., Nantes, carton 6 : lt. de Jean-Fernand Laurent à Couve de Murville, ministre des affaires étrangères, 1er juin 1967.
[403] DG/1962 : allocution de Maheu à l’ouverture de la 4e conférence des commissions nationales de l’Unesco des pays d’Europe, Sofia, juin 1962, p. 6-7.
[404] Interview Pauvert.
[405] R. Maheu, La culture dans le monde contemporain. Problèmes et perspectives, Paris, Unesco, 1973, p. 23, et La civilisation de l’universel, op. cit., p. 42.
[406] Interview Pauvert.
[407] Sa mise en place est d’ailleurs réalisée par un fonctionnaire de l’Unesco détaché à la Banque mondiale. Cf. André Varchaver, « Maheu et le système des Nations Unies », Journée d’hommage à René Maheu, Cahier II, op. cit., p. 96-100.
[408] Interview Pauvert, .
[409] RU, PREM 11/5185 : note confidentielle: « René Maheu. Record of Meeting with Prime Minister », 10 avril 1964.
[410] XO7.21(44)NC, IV : discours de Maheu devant la commission nationale française, 11 mai 1963.
[411] EU, box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 décembre 1970, 56 p., p. 51.
[412] Yves Scavenius, Géopolitique de l’Unesco, thèse de droit public, Paris IV, 1995, p. 218-221, 237.
[413] Ecrivain malien, spécialiste des traditions orales africaines, « légendaire figure de sage africain » (M. Conil-Lacoste, op. cit., p. 443). Membre du conseil exécutif de 1962 à 1970, membre du Comité scientifique international pour la rédaction d’une Histoire générale de l’Afrique (1971-1978).
[414] H.A. Bâ affirme : « L’Afrique a ses formes d’éducation propres, [...] et il serait criminel de violer cette personnalité ». « Que l’Unesco nous donne les moyens nécessaires : la méthode pour atteindre ce but doit être beaucoup plus la nôtre que celle de savants étrangers à la mentalité de nos pays ». Cf. Y. Scavenius, op. cit., 232-235 et 375.
[415] Interview Pauvert.
[416] Ricardo Diez-Hochleitner, « La passion de l’action », art. cit.
[417] Augustin Girard, Développement culturel : expériences et politiques, Paris, Unesco, 1972 ; S. Lewis, Réflexions préalables sur les politiques culturelles, Paris, Unesco, 1969.
[418] Les droits culturels en tant que droits de l’homme, Paris, Unesco, 1970.
[419] Le Monde, 21-22 déc. 1975, p. 21, p. 1 et 21 : « M. René Maheu est mort » ; et « Un homme d’action et de conviction » par Jean-Pierre Clerc. p. 21
[420] Michel Batisse, « Partager la science », art. cit. ; M. Prévost, op. cit., p. 168.
[421] Report of the US delegation to the 17th session ..., doc. cit.
[422] René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit. : article de M. Batisse, p. 36-37
[423] Rapport du DG sur 1962, 218 p., p. 61 ; M. Prévost, op. cit., p. 168, 140, 149, 150, 160 ; René Maheu, « L’évolution de l’Unesco de 1960 à 1962 », Chronique de l’Unesco, oct. 1962, vol. 8, n°10, p. 357.
[424] M. Prévost, op. cit., p. 155-156.
[425] S. Dumitrescu, article dans René Maheu. Portrait-souvenir…, op. cit.
[426] René Maheu. Portrait-souvenir …, article de M. Batisse, p. 36-37.
[427] EU, box 823 : « confid. report on the eight session of the international advisory committee on research in the natural sciences programme of Unesco, prepared by W.A. Noyes, New Delhi », 21 oct. 1961, 6 p., p. 2.
[428] EU, box 3341 : rapport de l’ambassade américaine à Paris au département d’état, 14 août 1965, p. 5 : « a tighter, better conceived program than the Secretariat has produced in the recent past ».
[429] Report of the US delegation to the 17th session ..., doc. cit. : « We believe that Unesco has done a commendable job in revamping the program and in giving it a more pragmatic and cohesive orientation that it has been lacking for years ».
[430] EU, box 827 : memorandum de conversation avec Maheu, 16 octobre 1962, 4 p., p. 2-3.
[431] M. Prévost, op. cit., p. 243.
[432] DG/1964 : discours de Maheu au terme de la discussion générale à la conférence générale, 2 novembre 1964, p. 7, 9, 10.
[433] Article d’Acher Deleon, in René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 63-64 ; M. Prévost, op. cit., p. 178, évoque au sujet d’Adiseshiah « l’admiration que j’éprouvais pour la très vaste culture, la sûreté de jugement, et la fermeté des idées, de ce diable d’homme, à qui je crois toujours que l’Unesco a dû un bon tiers de son âme ». Francis Blanchard, « Les amitiés au sein des Nations Unies », Journée d’hommage à René Maheu, Cahier I, op. cit., p. 30-33.
[434] DG/127, discours de Maheu à l’occasion du XXe anniversaire de l’Unesco, 1966.
[435] EU, box 825 : memorandum de Coombs à Cleveland, compte rendu d’une réunion avec Maheu, 12 avril 1962 : « balancing role ».
[436] R. Maheu, op. cit., p. 271.
[437] Interviews Tocatlian et Balandier.
[438] 12 C/INF/12, discours de Maheu, 1962, discours cité, p. 3.
[439] Benton, box 401 : lt. de Carr à Benton, 5 juin 1964 : resumé de sa conversation avec Maheu : Maheu lui dit « I am a teacher at heart. I was a teacher before I became DG of Unesco and when I work with teachers I am working with my own people ».
[440] Hemptinne : dossier « science et technologie ».
[441] Mirèse Akar, « Portrait : DG de l’Unesco, René Maheu …. », art. cit.
[442] Encyclopedia Universalis, 1976, p. 503-504 : article « René Maheu », par Jean Thomas.
[443] Maheu « cherchait un difficile compromis entre son goût pour l’abstraction des concepts et la nécessité de demeurer neutre à l’égard des idéologies des Etats membres », Raymond Aron, Mémoires, Paris, Julliard, 1983, p. 86.
[444] R. Maheu, La Civilisation de l’ universel. Inventaire de l’avenir, 1966, Paris, R. Laffont, p. 270-272. Cf. aussi : Conférence générale de 1962, rapport du directeur général, p. 57.
[445] Journée d’hommage à René Maheu, Cahier II, op. cit., p. 56-61, Michel Batisse, « Deux fronts pour un même combat ».
[446] X 07 A 120/197 UNSA : observations et commentaires du gouvernement français sur l’avant-projet condensé de programme et de budget pour 1967-68, 27 p., p. 8-10.
[447] Fr, Nantes, carton 104 : lt. de Jean-Fernand Laurent au ministre des affaires étrangères, 6 janv. 1970.
[448] X 07 A 120/197 UNSA : commentaires de la commission nationale italienne sur le programme et budget 1967-68, 17 p., en français, p. 9-10.
[449] Lien-Link n°74 : nécrologie de Jeanne Herrsch par Jacques Havet.
[450] Lien-Link n°82 : « Entrer à l’Unesco comme entrer en religion ? » par Zacharie Zachariev. Lien-Link n°80 : nécrologie de Jacques Havet par Nicolas Bodart et René Ochs ; Lien-Link n°80 : critique de « Dossier classé » de Henri Lopes, par Ninno Chiappano.
[451] Lien-Link n°86 : nécrologie de René Habachi, par Marie-Odile Bonnerot : Habachi, ami d’Emmanuel Mounier, de Teilhard de Chardin, « personnaliste méditerranéen », « au confluent des penseurs d’Orient et d’Occident, du Moyen Age et de la modernité ». Cf. René Habachi, Le Transgresseur, Paris, Desclée de Brouwer, 1984.
[452] Lien-Link n°75 : nécrologie d’Eduardo Jonquières. Lien-Link n°81 : « Education for all : about 50 years ago : the Major Project in Latin America, 1957-66 », par José Blat Gimeno. Lien-Link, n°75 et 77, articles de N. Chiappano.
[453] Lien-Link n°83 : « Frank Malina and Unesco. Yesterday, Today and Tomorrow », par John E. Fobes. Cf. aussi : http:www.olats.org/pionniers/malina/malina.shtml. Interview Koffler.
[454] Biogr. René Bergeaud : ancien élève de l’ENS, agrégé de lettres, il est entré à l’Unesco en 1961, à la division de l’Afrique du département de l’éducation.
[455] Premier ministre de l’Inde (1966-1977 et 1980-1984). Membre du Conseil exécutif de 1960 à 1964.
[456] Membre du conseil exécutif de 1962 à 1970,
[457] 17 C/VR.5, 22.11. 17 C/NOM/14, 23 août 1972. Membre du Conseil mondial de la paix. Prix international de la paix. Prix mondial Lénine pour la paix. Prix nobel de littérature 1971. Membre du conseil exécutif et ambassadeur et délégué permanent du Chili à l’Unesco.
[458] Cf. R. Hoggart, 33 Newport Street, autobiographie d’un intellectuel issu des classes populaires anglaises, Paris, Seuil, 1991, 288 p. ; R. Hoggart, La culture du pauvre. Etudes sur le style de vie des classes populaires en Angleterre, Paris, Minuit, 1970 ; R. Hoggart, Between Two Worlds, Essays, London, Aurum, 318 p.. En février 1970, il est nommé sous-directeur général pour les sciences sociales, les sciences humaines et la culture (ODG/DG/Memo 30.220, 2 février 1970). EU, box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 déc. 1970, 56 p., p. 20 et 36.
[459] Ibid.
[460] Biogr. Lazarsfeld : scientifique, sociologue et psychologue.
[461] Biogr. Escarpit. Missions pour l’Unesco en Amérique latine en 1969, et plusieurs publications pour l’Unesco sur la promotion du livre.
[462] D’Harcy Hayman, box 3 : CV de D’Harcy Hayman.
[463] RP, 18 décembre 1970 : The New Scientist, Londres, 12 novembre 1970, article de Martin Ennals.
[464] « L’Unesco se propose de donner une nouvelle orientation à son action, déclare au Monde M. René Maheu », propos recueillis par J.-Cl. Berry, Le Monde, 21 août 1963, p. 1-2 ; RU, ED 121/1163 : mémorandum de L.C.J. Martin, 17 septembre 1963, 3 p., « radical reorientation » (Sunday Times, 11 août 1963).
[465] Le Monde, 21 août 1963, article cité.
[466] DG/1964, discours cité, p. 9-10.
[467] Le Monde, 21 août 1963, article cité.
[468] RU, ED 121/1163, lettre d’Edward Boyles à Peter Smithers, 10 septembre 1963.
[469] Vadim Zagladine, « A l’Unesco », 3 juin 1960, art. cit., p. 5. « Une organisation spécialisée dans les échanges scientifiques et culturels a, par définition, le devoir de se pencher sérieuement sur le problème de la coexistence pacifique ». Et : Vadime Sobakine, L’Unesco : problèmes et perspectives, éditions agence de presse Novosti, Moscou, 1972, 134 p., p. 51-56 et 132.
[470] W. Benton, « The Defenses of Peace : Progress Report on Unesco », 7 mars 1964, article cité. « I can conceive that Unesco can contribute to the cause of disarmament by stimulating study of its economic and social consequences. […] But I cannot conceive that the cause of disarmament can be advanced by echoing at Unesco House the negociations taking place at the UN and in keys capitals ».
[471] RP, 13 nov. 1964 : Le Monde, 4 nov. 1964 : cite le discours de clôture de Maheu à la conférence générale. Ce discours est aussi cité par le Journal de Téhéran, 3 nov. 1964.
[472] INA : 31 mai 1965, JT 13h, « congrès international de la police ».
[473] Eugene Sochor, « A New Look at Unesco », avril 1964, article cité : « a large-scale operational agency ».
[474] Hassan Nafaa, L’Egypte et l’Unesco, Paris, université de Paris, 1977, p. 636.
[475] X07.21(44)NC, IV : discours de Maheu devant la commission nationale française, 11 mai 1963 ; X 07.21 (44), I : discours de Maheu devant la Conférence économique africaine et malgache, avril 1964, Marseille.
[476] DG/1964, 2 novembre 1964, discours cité, p. 1-2.
[477] Cf. rapport de W. Benton à une conférence organisée par la commission nationale américaine, novembre 1963, Chicago (cité dans Congrès, Vol. 109, 88e congrès, 1e session, 4 décembre 1963, Senate, p. 23225-23226). X 07 A 120/197 UNSA : propositions de la commission nationale soviétique sur le programme et budget 1967-68, 18 p., 31 mai 1965, p. 4-10.
[478] EU, box 827 : mémorandum de conversation avec Maheu lors de sa visite au département d’état le 10 octobre 1962, 16 octobre 1962, 4 p., p. 4 ; RU, PREM 11/5185 : « R. Maheu, confidential record of meeting with Prime Minister », 10 avril 1964.
[479] « R. Maheu, confidential record of meeting with Prime Minister », 10 avril 1964, doc. cité : « il caresse l’espoir que l’Organisation devienne également une source d’influence dans le monde des idées, en particulier à l’égard de ce qu’il appelle ‘les grands problèmes contemporains de la condition humaine’, tels que les relations raciales, les conséquences de la décolonisation, et les conséquences économiques et sociales du désarmement » (« he cherishes a hope that the Organization may also become an influence in the world of ideas, particularly in respect of what he calls the ‘great contemporary problems of man’s estate’, such as race relations, the consequences of decolonisation, and the economic and social consequences of disarmament ») ; lettre d’Edward Boyles à Peter Smithers, 10 sept. 1963, doc. cité ; RU, ED 121/1163 : mémorandum de L.C.J. Martin, « Press interviews of the DG of Unesco », 17 septembre 1963, 3 p. « The publication of these reports is surprising. M. Maheu, as an experienced international official, is well aware of the subjects which are likely to cause controversy in Unesco and has been careful in the past to maintain a strict balance between the West and the Communist bloc » ; EU, box 4247 : télégramme de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 14 septembre 1963.
[480] EU, box 3213 : 15 USGC/0.3, 23 septembre 1968 : position paper, future program resolutions, p. 1.
[481] EU, box 4247 : some miscellaneous observations on Unesco’s 65th executive board meeting, mai 1963, confidentiel, par W. Benton, 14 p. plus annexes, p. 2 : « pillars » ; « Unesco is the heir of the Institute of Intellectual Cooperation ».
[482] J. Thomas, op. cit., p. 52.
[483] Selon le témoignage de Benton. Cf. W. Preston, op. cit., p. 106. Kennedy : « Tell me what you want the US to do for Unesco ? I want a strong Unesco. How can we help ? » Maheu : « I want your intellectual understanding and support and comprehension of Unesco, your perception and insight into Unesco and its problems » ; « grateful ».
[484] W. Preston, op. cit., p. 108 (au point que Maheu interprète qu’ils sont inspirés de l’Unesco, alors que pour les Américains, c’est au contraire l’Unesco qui se serait inspirée de ces principes).
[485] EU, box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 décembre 1970, 56 p., p. 44. « French influence in Unesco, which is considerable ».
[486] FR, cabinet du ministre, Couve de Murville, 180, lettre de M. Couve de Murville à X. Deniau, deputé du Loiret, 25 mai 1968.
[487] R. Maheu, op. cit, p. 29, 40 et 46.
[488] Sulwyn Lewis, Les principes de la coopération culturelle, Paris, Unesco, 1969, p. 17-19 : les artistes doivent être « hautement conscients de l’unité fondamentale de l’expression artistique en dépit de la grande diversité des formes qu’elle revêt ».
[489] Emission sur France Culture, 22 janvier 1974. René Maheu répond à Jean d’Ormesson. Emission citée par Jean Maheu, dans René Maheu. Portrait-souvenir …, op. cit., p. 18.
[490] Conférence générale de 1966, message de De Gaulle, 14C/VR.15, 5.1-4.
[491] Prem Kirpal, « Valeurs culturelles, dialogue entre les cultures et coopération internationale », in Problèmes de la culture et des valeurs culturelles dans le monde contemporain, p. 67-78, 1983, p. 67. Prem Kirpal a été ministre de l’éducation et de la culture en Inde et président du Conseil exécutif de l’Unesco.
[492] R. Maheu, « L’assemblée extraordinaire de l’ONU sur les matières premières. Vers un ordre international nouveau ? », Le Figaro, 20 avril 1974, p. 1 et 6.
[493] R. Maheu, « Les nouvelles voies du ‘mondialisme’. Il est temps de réorganiser la planète », Le Monde, 3 janvier 1975, p. 4.
[494] P. Jones, op. cit., p. 102-104 et 107, « convenient abstraction », « an emotionally-charged concept, used to spur on people of diverse culture, nationality and conviction to unite in common acitivies » ; « often obscure ».
[495] R. Maheu, La civilisation de l’universel, cité dans A. Monclus, op. cit., p. 135-136.
[496] R. Maheu, La civilisation de l’universel, op. cit., p. 233 : « il faut patiemment construire l’unité de l’homme dans le respect mutuel des cultures qui la diversifient sans la diviser » ; A. Wagner de Reyna, op. cit., p. 25-26.
[497] Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale, Paris, Unesco, 1966, article 1.
[498] A. Reszler, A. Browning, « Identité culturelle et relations internationales. Libres propos sur un grand thème », Relations internationales, hiver 1980, n°24, p. 381-399. et Philippe Laburthe-Tolra et Jean-Pierre Warnier, Ethnologie Anthropologie, Paris, PUF, 1993, p. 364-366 ; J.-P. Warnier, op. cit., p. 9 ; Y. Brunswick, op. cit. : l’identité culturelle est « le noyau vivant d’une culture, le principe dynamique par lequel un individu ou une communauté s’appuyant sur son passé, se nourrissant de ses potentialités, accueillant des apports extérieurs en fonction de ses besoins, poursuit le processus continu de sa propre création ».
[499] Le relativisme culturel s’est développé au sein de l’école culturaliste américaine dans les années 1960 en opposition à l’évolutionnisme culturel qui analysait les systèmes culturels à partir d’un seul point de vue, celui de l’ethnologue. Martine Abdallah-Pretceille, L’éducation interculturelle, Paris, PUF, Que sais-je, 1999, p. 26-27. Pierre-André Taguieff, Le racisme, Paris, Flammarion, Dominos, 1997. Taguieff définit l’ethnocentrisme comme une « attitude d’autopréférence de groupe, universellement observable ; une tendance à évaluer toute chose selon les valeurs et les normes propres au groupe d’appartenance du sujet, comme si ce groupe était l’unique modèle de référence ». Cf. aussi Will Kymlicka, Multicultural Citizenship, Oxford University Press, 1995.
[500] Jean Baudrillard, La société de consommation, Paris, Idées, Gallimard, 1970, 316 p. ; George Katona, La société de consommation de masse, Paris, éd. Hommes et Techniques, 1966 ; David Riesman, La foule solitaire, Paris, Arthaud, 1964.
[501] Nicolas Journet, « L’identité culturelle : illusions et conséquences », in Sciences humaines, n° 114, mars 2001, p. 48-49 ; Sélim Abou, L’identité culturelle : relations interethniques et problèmes d’acculturation, Paris, Hachette, 1995, p. 120.
[502] Frantz Fanon et Aimé Césaire accusent la colonisation d’avoir engendré la dépersonnalisation, la déculturation.
J.-P. Warnier, op. cit., p. 79, 82, 91. Warnier évoque l’« ethnocide généralisé » qui s’est produit au XXe siècle. « Tous les aspects des pratiques culturelles sont touchés [...]. La complexité des mécanismes d’érosion culturelle défie l’imagination ». Il souligne la gravité du « traumatisme colonial » qui a entraîné chez les peuples anciennement colonisés un grand déracinement culturel. « Les gisements de souffrance latente sont considérables », chez « des centaines de millions d’êtres humains mal construits, mal socialisés, tiraillés entre plusieurs mondes ».
[503] J.-P. Warnier, op. cit., p. 79, 82, 91 : le tiers mondisme est l’« attitude politique, économique et culturelle de la plupart des pays en développement qui, depuis la conférence de Bandoeng en 1955, ont pris conscience de ce qui les distinguait des pays riches de l’Occident comme des pays socialistes de l’Europe de l’Est. […] L’objectif est d’obtenir sur le plan culturel comme sur le plan économique le rééquilibrage des échanges ».
[504] Jean Lacouture, « Bandoeng : vent d’est sur le Tiers-Monde », L’Histoire, p. 114-118 ; Edmond Jouve, Le Tiers-Monde dans la vie internationale, Paris, Berger-Levrault, 1986, p. 49-60. Après la Conférence « tricontinentale » de La Havane (janvier 1966), les idées tiers-mondistes se répandent largement en France, par des publications, telle la revue Tricontinental publiée par François Maspero, et des ouvrages d’économistes (Le pillage du Tiers Monde, par Pierre Jalée en 1969), et de géographes (Géographie du sous-développement par Yves Lacoste en 1965).
[505] Jean-Pierre Lycops, L’agression silencieuse ou le génocide culturel en Afrique, Paris, éd. Anthropos, 1975, p. 216.
[506] J. Ziegler, Le pouvoir africain, Paris, Maspero, 1977, p. 242.
[507] Définition de P. Bourdieu et J.-Cl. Passeron (in La reproduction, éléments pour une théorie du système d’enseignement, Paris, Minuit, 1970, p. 18) : « tout pouvoir de violence qui parvient à imposer des significations et à les imposer comme légitimes en dissimulant les rapports de force qui sont au fondement de sa force, ajoute sa force propre à ces rapports de force ».
[508] Philippe Decraene, op. cit., préface.
[509] René Dumont, Marie-France Mottin, L’Afrique étranglée, Paris, Seuil, coll. Points politique, 1980, p. 35 et 81.
[510] P.-A. Taguieff, op. cit., p. 104.
[511] Conseil exécutif, 73e session, 22 juillet 1966, 14/C/31.
[512] Déclaration des principes de la coopération culturelle internationale, Unesco, 1966, article 1.2.
[513] Déclaration sur les droits culturels en tant que droits de l’homme, Unesco, 1966, article 5.
[514] lettre de R. Maheu à Jacques Berque, 17 juin 1969 (citée dans : Jean Maheu : « Son fils et sa petite fille se souviennent », article cité).
[515] R. Maheu, La civilisation de l’universel., p. 233.
[516] R. Maheu, La culture dans le monde contemporain. Problèmes et perspectives, 1973, p. 12, 13, 22.
[517] Report of the US delegation to the 17th session ..., doc. cit.
[518] Interview de Maheu par Mirèse Akar, doc. cité.
[519] Louis Dollot, op. cit., p108.
[520] Pierre-André Taguieff, Le racisme, Paris, Flammarion, Dominos, 1997 ; Martine Abdallah-Pretceille, L’éducation interculturelle, Paris, PUF, Que sais-je, 1999, p. 26-27 ; A. Reszler, A. Browning : « Identité culturelle et relations internationales. Libres propos sur un grand thème », Relations internationales, hiver 1980, n°24, p. 381-399 ; Philippe Laburthe-Tolra et Jean-Pierre Warnier, Ethnologie Anthropologie, Paris, PUF, 1993, p. 364-366, 9.
[521] Nicolas Journet, « L’identité culturelle : illusions et conséquences », in Sciences humaines, n° 114, mars 2001, p. 48-49 ; Sélim Abou, L’identité culturelle, op. cit., p. 120.
[522] A. Salon, op. cit.
[523] J.-P. Warnier, op. cit., p. 108-110.
[524] Alain Finkielkraut, La défaite de la pensée, Paris, Gallimard, 1987, p. 110-118 : sous-chapitre : « Le double langage de l’Unesco ».
[525] A. Finkielkraut, op. cit., p. 116-118.
[526] A. Finkielkraut, op. cit., p. 127, 136-137.
[527] A. Brunswick, op. cit.
[528] P.-A. Taguieff, op. cit., p. 104. Cf. aussi Will Kymlicka et Sylvie Mesure (dir.), Les identités culturelles, revue Comprendre n° 1, PUF, 2000.
[529] R. Dumont, op. cit., préface.
[530] Sélim Abou, op. cit., p. 12.
[531] Fred Constant, Le multiculturalisme, Flammarion, Dominos, 2000. A. Semprini, Le multiculturalisme, Paris, PUF, Que sais-je, 1997, p. 3.
[532] A. Finkielkraut, op. cit., p. 93-95, 109-110.
[533] René Gallissot et alii, L’imbroglio ethnique en 14 mots-clés, Payot, Lausanne, 2001.
[534] Marco Martiniello, L’Ethnicité dans les sciences sociales contemporaines, Paris, PUF, que sais-je, 1995, p. 6.
[535] P.-A Taguieff, op. cit., p. 48-51.
[536] Interview Larnaud.
[537] Jean Maheu, « Son fils et sa petite fille se souviennent », article cité.
[538] 12 C/INF/12, 16 nov. 1962, p. 5.
[539] RP 23 janvier 1963 : article du Père Russo, La Croix, 27-28 décembre 1962.
[540] Le Monde, 21 août 1963, article cité.
[541] DG/1964, discours cité.
[542] Veronese carton 66 : dossier Maheu : déclaration de M. René Maheu sur la mort du pape Jean XXIII, Ottawa, 3 juin 1963.
[543] « Le Saint-Siège et l’essor des organisations internationales », par Mgr. Bertoli, 5 fév. 1961, discours cité.
[544] Intervention de Mgr. Benelli au Congrès mondial de Téhéran, p. 17-26, in L’Eglise et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, Paris, CCIC, 1966, 89 p.
[545] Lettre de Paul VI à Maheu, p. 13-16, in L’Eglise et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, op cit. ; intervention de Mgr. Abimaroun, chef de la délégation de l’Office international de l’enseignement catholique, au Congrès mondial de Téhéran, ibid., p. 27-34. Il soutient lui aussi le projet. En mars 1964, le cardinal Cicognani, secrétaire d’état du pape, écrit à Maheu, l’assurant du soutien du pape pour le projet de campagne contre l’analphabétisme (Veronese, carton 66 : lt. du cardinal Amleto Cicognani à Maheu, 4 mars 1964).
[546] Veronese, carton 66 : intervention de Mgr. Bertoli à la conférence générale de 1964.
[547] SCHM 17 : Le Mois à l’Unesco, n°36, mars-avril 1964.
[548] Un film en est tiré. Film n° 802, 1966. Mgr Benelli : introduction. Cardinal Leo Jozef Suenens, archevêque de Malines-Bruxelles : « A l'écoute et au service des hommes : Vatican II devant le monde et devant l'histoire » ; René Cassin, Président de la Cour Européenne des Droits de l'Homme : « Vatican II et la protection de la personne ». Kenneth Johnstone, Directeur du Département des Affaires Internationales du « British Council of Churches » : « La culture au service de la personne ». J. E. Bencheick, Professeur à la Faculté des Lettres de l'Université d'Alger : « Ce pain de l'esprit dont l'homme a aussi faim : Vatican II et les différentes cultures ». Mgr. André Scrima, archimandrite du Patriarcat Œcuménique de Constantinople : « Contribution de Vatican II à la compréhension et au rapprochement entre individus et communautés ». Jacques Maritain : « Conditions spirituelles du progrès et de la paix ».
[549] Interview Deliance ; Maurice Barbier, L’Eglise catholique et l’Unesco. Vingt-cinq ans de relations, Paris, Centre J.-L. Lebret, « Foi et développement », 1971, p. 6, p. 95.
[550] RP 21 avril 1962 : Le Monde, 29 mars 1967, Le Figaro, 20 avril 1967.
[551] DG 67/2, 19 avril 1967.
[552] Benton, box 394 : mémo confid. de Robert H.B. Wade à Benton, 22 mai 1967.
[553] DG/discours /1967, 19 avril 1967.
[554] EU, box 3339 : télégramme du département d’état à l’ambassade américaine à Paris, 6 mai 1966, p. 4.
[555] Archives du CCIC, doc. CCIC, Aperçu sur la 11e conférence générale de l’Unesco, 14 nov-15 déc. 1960, p. 15.
[556] Le Mois à l’Unesco, janv.-fév. 1961, p. 8-9 : Maurice Quéguiner, « Evolution de l’éducation de base et du développement communautaire ».
[557] Interview Deliance. Benelli est ensuite devenu substitut, puis cardinal de Venise, soit le 3e personnage du Vatican.
[558] Interview Deliance.
[559] Veronese, carton 66 : lt. confid. de J. Larnaud à Veronese, 25 août 1966.
[560] Veronese, carton 66 : assemblée des OIC à Londres, 14-19 juill. 1966.
[561] Veronese, carton 66 : lt. de J. Larnaud et François Russo, conseiller ecclésiastique, à la présidente de la conférence des OIC, Pilar Bellosillo, 25 juill. 1966, 4 p. ; mémoire du CCIC à l’attention de la présidente de la conférence des OIC, sur la prise en charge par l’observateur du Saint-Siège auprès de l’Unesco de l’action de l’Eglise dans le domaine de l’alphabétisation, 25 juillet 1966, 6 p.
[562] Interview Deliance.
[563] Nantes, carton 104 : SHC/CONF.1/13, 24 avril 1970, rapport du colloque sur l’éduc et le développement de l’h, 16-20 fév. 1970, 9 p., p. 6-7.
[564] DG/71, 1er janv. 1971.
[565] Lettre de Maheu à Jean Guéhenno, 30 octobre 1973, citée par J. Maheu, « Son fils et sa petite fille se souviennent », article cité.
[566] R. Maheu, « Le cardinal Daniélou et l’Unesco », Revue des deux mondes, juillet 1974.
[567] Interview Larnaud.
[568] Interview Deliance. Depuis, le financement du CCIC a été assuré à la fois par ses membres, par le Saint-Siège, par l’Unesco, par des organisations privées, et par la fondation Pie XII.
[569] Veronese carton 66 : lt. de Veronese à Maheu, 25 janv. 1972
[570] Film « Voyage de M. Maheu au Vatican », 1972.
[571] DG/72/3, 25 mars 1972, p. 1-2.
[572] Film n°1223, 1973. Prix destiné à « mettre en valeur le rôle joué par des représentants éminents des pays européens de langues romanes dans le maintien des valeurs spirituelles de l’Europe ».
[573] Interview Deliance ; DG/74/15, 23 nov. 1974, p. 2 .
[574] F. Valderrama, op. cit., p. 220-221.
[575] NS/ROU/363, Zinal, sept. 1975 : problèmes planétaires de survie et de développement du genre humain, par Y. de Hemptinne, p. 18.
[576] Unesco, 50 années …, op. cit., p. 36.
[577] Courrier de l’Unesco, janv. 1974 : courrier des lecteurs, p. 42 : P.M.O. Giles, du Royaume-Uni.
[578] Rév. Alex. Ranasinghe, Unesco’s cultural mission. An evaluation of policies, programs, projects, Carlton press, New York, 1969, 160 p. ; p. 58-59, 123-124, 133, 146-149.
[579] Maurice Barbier, L’Eglise catholique et l’Unesco…, op. cit., p. 94-99.
[580] RP, 12 avril 1974 : L’Osservatore Romano, 27 janv. 1974 : « La contribution de l’Unesco à la paix », par le Rév. Francesco Russo, SJ, du CCIC ; L’Eglise et la campagne mondiale pour l’élimination de l’analphabétisme, publié par les soins de l’observateur permanent du Saint-Siège auprès de l’Unesco, CCIC, 1966, 89 p.
[581] Maurice Barbier, L’Eglise catholique et l’Unesco…, p. 6, 95.
[582] X 07 A 120/197 UNSA : lettre d’A. Vanistendael, secrétaire général de la confédération internationale des syndicats chrétiens (CISC), à Paul Bertrand, directeur du bureau des relations avec les organisations et les programmes internationaux, 8 nov. 1965, 6 p.
[583] Interview Deliance.
[584] Centre Unesco Rome : rapport de mission de Maria Tabellini, fév. 1962, UNESCO/EPTA/CAM/1, WS/0262.106, p. 54-57.
[585] Apprendre à etre, op. cit., p. 301-302.
[586] 379.2 (675.571) : rapport de mission ESM/FDC, 7-20 déc. 1974, 8 p. ; cf. aussi Théodore Hanf et alii, Education et développement au Rwanda, problèmes, apories, perspectives, Weltforum Verlag, Munich, 1974 ; « Le développement national », contribution du gouvernement rwandais au séminaire sur l’éducation de base, Unicef, Nairobi, 22-26 oct. 1974 (cités dans ce rapport).
[587] Interviews Larnaud et Deliance.
[588] Daphné Josselin et William Wallace, Non-State Actors in World Politics, Palgrave, New York, 2001, 294 p., chap. 3 : « The Catholic Church as a Transnational Actor », par David Ryall (p. 41-58), p. 50 et 55.
[589] Interviews Larnaud et Deliance.
[590] J. Thomas, op. cit., p. 52.
[591] DG/1964, 2 novembre 1964, discours cité, p. 7-8.
[592] X 07.83 Maheu, IV : ODG/DG/Memo28.511, mémorandum confidentiel de Maheu au DG adjoint et aux sous-DG, 7 février 1967, 5 p., p. 3.
[593] RFA, Bestand B30, Band 544 : remarques générales de la délégation allemande sur le projet de programme et de budget pour 1969-70, chapitre 1 : la délégation allemande souligne « le besoin de clarification des buts et fonctions de l’Unesco », et la nécessité de réduire la prolifération des projets. Et : propositions de la commission nationale soviétique sur le programme et budget pour 1967-68, 18 p., doc. cit., p. 1.
[594] Observations et commentaires du gouvernement français sur l’avant-projet condensé de programme et de budget pour 1967-68, doc. cit., p. 8-10.
[595] X 07 A 120/197 UNSA : commentaires de la commission nationale italienne sur le programme et budget pour 1967-68, 17 p., p. 9-10 : « Il faut éviter la définition d’un complexe doctrinaire qui sort des buts de l’Unesco et est exposé […] au péril de déviations ou préférences idéologiques » ; The United States and Unesco : challenges for the future. Report of the Special National Conference of the US National Commission for Unesco, 1966, par Ronald Gross and Judith Murphy, Academy for Educational Development, 1966, 26 p., p. 19-20 : « Looking toward the Future » par Thomas F. Malone, président de la commission nationale américaine : « Unesco itself should intensify its efforts to re-examine its philosophy and objectives, its program, and its operational approaches » (« l’Unesco elle-même devrait intensifier ses efforts pour ré-examiner sa philosophie et ses objectifs, son programme et ses approches opérationnelles »).
[596] Interview Pauvert.
[597] Interview Deleon.
[598] Interview Pauvert.
[599] Collectif, Dans l’esprit des hommes. Unesco 1946-1971. Vingt-cinquième anniversaire de l’Unesco, Paris, Unesco, 1972, p. 48-50.
[600] S. Lewis, Les principes de la coopération culturelle, op. cit., p. 13.
[601] Ibid., p. 10.
[602] Lien-Link n°85 : nécrologie de Paul Lengrand par Pierre Henquet.
[603] 6e session spéciale de l’assemblée générale de l’ONU, 9 avril-2 mai 1974. RP, 10 juillet 1974 : Le Figaro, 10 avril 1974 : « Vers un ordre international nouveau ? ».
[604] Interview Deleon.
[605] Interview Tocatlian.
[606] Interview Foecke.
[607] Interview Tocatlian. Ce caractère novateur contribuerait à expliquer les incertitudes et les difficultés étant donné les résistances de la société et l’inadaptation de la technologie.
[608] 3 A 31 : Equality of rights between races and nationalities in the USSR : Activities and Procedures of Unesco, Hearing before a subcommittee of the Committee on foreign relations of the United States Senate, 88e congrès, 1e session, 4 mars 1963, p. 19-20, 22.
[609] Ibid., p. 25-26.
[610] EU, box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 décembre 1970, 56 p., p. 44. « French influence in Unesco, which is considerable » ; box 3222 : report of the US delegation to the 84th session of the executive board, juin 1970, 24 p., p. 4.
[611] 3 A 31 : Equality of rights … : 65 EX/12, 29 avril 1963, rapport du Comité des publications, 7 p., p. 5.
[612] NUOI 834, 11e conférence générale, note de Paul Fouchet pour le directeur général, 29 sept. 1960. Cité dans Gaëlle Bourreau, La politique française à l’Unesco durant la période gaullienne, 1958-69 : l’Unesco, un instrument pour le prestige francais, maîtrise d’histoire, Paris I, sous la directon de Robert Frank, 2002, p. 100-102.
[613] J.-P. Warnier, op. cit., p. 67-68.
[614] J.-P. Lycops, op. cit.
[615] J.-P. Lycops, op. cit., p. 170-171, 186, 192, 193.
[616] D. Holly, op. cit., p. 38-39, 122, 123.
[617] D. Holly, op. cit., p152-153, 31. « Le système onusien est une pièce maîtresse du système mondial ».
[618] Selim Abou, op. cit.
[619] Marie-France Mottin, R. Dumont, L’Afrique étranglée, op. cit., préface.
[620] Raymond Aron, Mémoires, op. cit., p. 86.
[621] EU, box 3225 : airgram de l’ambassade américaine de Paris au département d’état, 24 déc. 1970, 56 p., p. 44-46.
[622] « A quarter of century ago, with great hopes from all mankind, the UN Organization was born. Alas, in an immoral world it too grew up immoral », cité dans Shirley Hazzard, Defeat of an Ideal. À Study of the Self-Destruction of the United Nations, Atlantic Little, New York, 1973.
[623] Le personnel le surnomme « la civilisation de l’uni-cervelle » et raille le fait qu’il n’ait pas été rédigé par Maheu mais par Jean Millérioux. Cf. interview Millérioux ; et M. Prévost, op. cit., p. 104 : « Il ne faut pas oublier que Millérioux s’inspire, pour les écrire, des discours de Torres-Bodet, qui étaient écrits par Maheu ».
[624] Lien-Link n°74 : nécrologie de Jeanne Herrsch par Jacques Havet.
[625] E. Delavenay, op. cit., p. 369.
[626] E.R., « De Bucarest à Abidjan : un itinéraire atypique », article cité (l’article n’est signé que des initiales de l’auteur).
[627] Interview Grinda.
[628] E.R., « Exercice d’admiration filiale. Le dialogue posthume de deux écrivains combattants, Jean et Michel Prévost, père et fils ».
[629] Lien-Link n°85 : nécrologie de Paul Lengrand par Pierre Henquet.
[630] S. Dumitrescu, « Quelques semaines avant et apres mon entrée à l’Unesco », in Link-Lien n°87, p. 23-25.
[631] Conférence générale de 1972, 17 C/VR.5, 22.11 : intervention de Pablo Neruda.
[632] Report of the US delegation to the 17th session ..., doc. cité, p. 22-23.
[633] S. Tanguiane, « L’Unesco procède d’un dessein humaniste », 25 août 2000, 7 p., p. 3. (Biogr. Maheu). Maheu estime que cette campagne contre lui est menée par des fonctionnaires opposés à l’engagement de l’Unesco dans des questions de portée éthique.
[634] EU, box 3224 : rapport de la table ronde du personnel, 1970, 150 p., en français, 30 avril 1970, p. 27. « objectifs diffus » ; « priorités et normes mal définies ».
[635] Ibid., p. 15-16, 49.
[636] Rapport de la table ronde de 1970, p. 48-49 : « La ‘prise de décision’ en matière de programmes se fait à l’inspiration sur la base d’une image idéalisée de l’Unesco et des exigences d’une mode passagère, plutôt que sur la base des besoins de la collectivité internationale ou ceux des Etats membres ».
[637] FR, Nantes, carton 104 : SHC/CONF.1/13, 24 avril 1970, colloque sur l’éducation et le développement de l’homme, Paris, Unesco, 16-20 fév. 1970, rapport, 9 p., p. 1-3, 5.
[638] Luther Evans, « An Evaluation of Unesco : One View », International Educational and Cultural Exchange, 7, 2, p. 42-51, février 1971. U’Thant, « Unesco at 25 », School and Society, 100, 2340, p. 186-188, mars 1972. Julian Huxley, « The advancement of education, science and culture », International Understanding at School, 22, p. 5-14, octobre 1971.
[639] Vadime Sobakine, L’Unesco : problèmes et perspectives, op. cit., p. 51-56 et 132-134.
[640] cité par F. Valderrrama, op. cit., p. 207.
[641] CL/2337 : lettre circulaire de Maheu à tous les Etats membres, contenant le texte de sa déclaration du 29 septembre 1973 en séance privée du conseil exécutif (93 EX/PRIV.SR.1 Prov., annexe 1).
[642] Cf. réunion d’experts de l’Unesco sur l’étude du rôle des organisations internationales dans le monde contemporain, Genève, 15-19 mars 1976, SCH.76/CONF.623/9, 8 mars 1976.
[643] 93 EX/PRIV.SR.1 Prov., annexe 1, doc. cit.
[644] P. Lengyel, op. cit., p. 42-43.
[645] EU, box 3222 : report of the US delegation to the 84th session of the executive board, juin 1970, 24 p., p. 14 ; biogr. M’Bow.
[646] Biogr. M’Bow.
[647] Le Figaro, 15 nov. 1974 : « Un Africain à la tête de l’Unesco. Amadou M’Bow : de la cause du petit paysan ouolof au Palais de la Culture », interview de M’Bow par Serge Groussard.
[648] « Amadou Mahtar M’Bow. D’un village du Sahel à la direction générale de l’Unesco », article dans Educafrica, 1977, n°1, p. 5-11, p. 8.
[649] « Un Africain à la tête de l’Unesco…. », art. cit.
[650] « Amadou Mahtar M’Bow. D’un village du Sahel … », art. cit., p. 9.
[651] « Un Africain à la tête de l’Unesco… », art. cit.
[652] Interviews Larnaud, Foecke, Deleon.
[653] Interview Tocatlian.
[654] Titre du premier chapitre d’A. M. M’Bow, Le Temps des peuples.
[655] Discours de M’Bow, « L’Unesco et le monde, idées pour une action de large portée », p. 10, cité dans A. Monclus, op. cit., p. 142.
[656] DG/74/15, 23 novembre 1974, p. 1.
[657] F. Valderrama, op. cit., p. 224.
[658] Amadou-Mahtar M’Bow, Le Temps des peuples, Paris, R. Laffont, 1982, p. 165, 177-181.
[659] A. Salon, op. cit.
[660] J.-P. Warnier, op. cit., p. 21, 78, et 108-110. « Il y a, de par le monde, une production culturelle constante, foisonnante et diversifiée, en dépit de l’hégémonie culturelle exercée par les pays industrialisés ».
[661] A. Brunswick, op. cit.
[662] A. Finkielkraut, op. cit., p. 93.
[663] F. Constant, op. cit., p. 77.
[664] P.-A. Taguieff, op. cit., p. 104. Ainsi se pose la question du respect de coutumes non-conformes aux droits de l’homme. Cf. Références sur la Déclaration de 1948, par Frederico Mayor, Guy Lagelée et Gilles Manceron. (1998). Sélim Abou, op. cit., p. 213. Pour Sélim Abou, les valeurs consignées dans la Charte des droits de l’homme sont un cadre de référence universel, qui ne doit pas être remis en cause. Will Kymlicka et Sylvie Mesure (dir.), Les identités culturelles, revue Comprendre, n° 1, PUF, 2000.
[665] Alain Finkielkraut, La défaite de la pensée, op. cit., p. 110-118 : sous-chapitre : « Le double langage de l’Unesco ».
[666] A. Finkielkraut, op. cit., p. 136-137.
[667] A. Finkielkraut, op. cit., p. 143-145.
[668] René Gallissot et alii, L’imbroglio ethnique en 14 mots-clés, Payot, Lausanne, 2001.
[669] A. Finkielkraut, op. cit., p. 105-106.
[670] Marco Martiniello, L’Ethnicité dans les sciences sociales contemporaines, Paris, PUF, Que sais-je, 1995, p. 6. et P.-A Taguieff, op. cit., p. 48-51.
[671] Dans la préface de L’Identité culturelle, Sélim Abou évoque la « bataille du tiers-mondisme » : « La controverse a débuté dans les milieux intellectuels parisiens en 1983, à la suite de la parution du livre de Pascal Bruckner, Le sanglot de l’homme blanc. Elle s’est développée lors du colloque organisé en 1985 par la Fondation « Liberté sans frontières » sur le thème « Le Tiers Monde en question ». Elle a atteint l’opinion publique, grâce à la presse qui a largement rendu compte des débats du colloque ». Il évoque aussi l’ouvrage d’Yves Lacoste, Contre les anti tiers-mondistes et contre certains tiers-mondistes, 1985. Carlos Rangel, dans L’Occident et le Tiers Monde en 1982 qualifie le tiers mondisme d’« idéologie à la fois confuse et simpliste » qui servirait à « compenser les échecs et les déboires » de la gauche.
[672] Edmond Jouve, Le Tiers Monde dans la vie internationale, Paris, Berger-Levrault, 1986, p. 54-55.
[673] Régis Debray, La critique des armes, Paris, Seuil, tome I, 1974, p. 31.
[674] Yves Lacoste, Unité et diversité du Tiers-Monde, Paris, Maspero, 1980.
[675] Fred Constant, Le multiculturalisme, Flammarion, Dominos, 2000. A. Semprini, Le multiculturalisme, op. cit., p. 3.
[676] M. Prévost, op. cit., p. 325.
[677] Interview Tocatlian.
[678] Interview Bonnefoy.
[679] M. Prévost, op. cit., p. 101.
[680] Jean-Baptiste de Weck, « En pensant à René Maheu, mon directeur général », in René Maheu. Portrait-souvenir par ses collaborateurs, op. cit., p. 69-70.
[681] Abderrazak Nefzaoui, La crise de l’Unesco, Paris 11, thèse de droit public, 1991.